JTC 2022 | «Dark Side» de Nizar Saidi (Compétition officielle) : La quête de l’humain dans un univers apocalyptique

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Un univers humain apocalyptique est traduit sur scène à travers l’œuvre théâtrale de Nizar Saïdi «Dark Side», en lice pour le Tanit d’or des Journées théâtrales de Carthage (JTC).

Cette production de «Fanart productions» (2022) n’est pas à sa première représentation en Tunisie. Programmée dimanche à la salle du 4e art, «Dark Side» est de retour sur ce lieu au cœur de la capitale où elle a été récemment présentée, après plusieurs autres rendez-vous durant l’été.

«Dark Side» est mise en scène par Nizar Saïdi d’après un texte de Abdelhalim Messaoudi et Nizar Saïdi. On y propose une lecture assez philosophique de la réalité tunisienne et d’une société prise au piège des changements qui touchent à tous les niveaux. Une fuite en avant d’un monde dominé par l’essor technologique galopant et le diktat de médias sans scrupule.

La pièce réunit un casting intéressant composé de Jamel Sassi, Ramzi Azaïz, Intissar Aïssaoui, Mohamed Chaaben, Ali Ben Saïd, Toumadher Zrelli et Sadok Trabelsi. Elle s’ouvre sur une enquête en cours autour d’un fait divers et le crime horrible contre une femme de ménage dans une municipalité, 52 ans, assassinée par sa propre fille.

Après avoir commis son acte, l’adolescente poste une séquence vidéo sur les réseaux sociaux dans laquelle elle avoue et justifie les raisons derrière son crime. Les enquêteurs, les médias et toute la société civile sont mobilisés pour connaître les véritables raisons qui se cachent derrière son acte.

Cette œuvre pointe du doigt une société prise au piège de la modernité et un cadre familial où les parents sont le plus souvent démissionnaires. Celle qui a tué sa mère incarne l’image d’une jeunesse perdue. Le monde virtuel s’avère être la seule issue pour cette jeune fille qui trouve refuge dans les réseaux sociaux pour s’exprimer sur son malaise.

Au-delà du phénomène de la criminalité, la pièce traite des questions assez contemporaines sur fond d’un crime odieux qui place toute la société sur le banc des accusés et qui a besoin de guérir de ses maux.

«Dark Side» brosse le portrait peu glorieux d’un pays qui va mal. C’est bien le côté obscur de la société : sa jeunesse comme ses adultes, tout le monde est en perte de repères.

Nizar Saïdi est habité par les maux de son époque et ses œuvres versent dans le même questionnement sur l’être, ses maux et son malaise éternel. Dans «Dark Side», il met à nu certaines questions sociétales qu’on évite souvent d’aborder sérieusement.

L’esthétique de la scénographie théâtrale a constitué un atout de plus pour le thème de cette œuvre où chaque acteur a parfaitement incarné son rôle. En une époque faite de contradictions, les personnages de Nizar Saïdi se trouvent en face de leurs vérités et se confient sur les moments de doute et de peur qui les habitent.

«Dark Side» pénètre dans les pénombres de l’être humain : ses peurs, ses angoisses et ses rêves brisés. Plusieurs angles sont ouverts de ce «Dark Side» dans une sorte de mea culpa général.

La déception d’une jeunesse ayant grandi après une décennie douloureuse au bout de laquelle les rêves —des jeunes et moins jeunes—, se sont transformés en cauchemar. La cicatrisation de la plaie semble assez lente et les maux s’accumulent pour ces citoyens, et autres survivants comme eux dans le monde, obligés d’affronter la réalité dans une époque assez difficile.

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