Plus on évoque aujourd’hui cette période sombre de l’histoire de la Tunisie, plus on se rend compte du gâchis et de la dispersion causés à l’occasion. Plus on se rend compte aussi que la Tunisie aurait été certainement mieux avec d’autres acteurs, d’autres approches et des visions certainement différentes de celles qui avaient régné à l’envers.
Des responsables ou des hommes politiques qui réussissent ou qui échouent, cela ne trompe pas. Dans de justes proportions bien sûr.
Les partis politiques, Ennahdha en particulier, et les différents gouvernants et décideurs qui ont meublé la décennie noire n’avaient pas la capacité et les compétences nécessaires pour diriger le pays au lendemain de la Révolution. C’était énorme, voire impossible, pour des hommes et des femmes parachutés aux hautes fonctions de l’Etat et clairement incapables de se fondre dans le cadre défini par les exigences de la nouvelle étape. Dans cet environnement, aussi frustrant que décevant, les décideurs de cette phase autodestructrice avaient ignoré cette vérité éternelle : comme on n’imagine et on ne voit pas les problèmes venir, on ne les anticipe pas.
Evoquant la suspension du travail par les pharmaciens grossistes répartiteurs, ainsi que la grève des boulangeries à laquelle 1.500 boulangeries avaient pourtant travaillé normalement, selon la Conect, le porte-parole du gouvernement, Nasreddine Nsibi, et ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, estime que « les conséquences des mauvais choix pris durant les dernières années impactent, à chaque fois, un nouveau secteur ».
Il y a au fait un vrai sujet de réflexion sur les dix années de gouvernance post-révolution, sur la tradition de performance économique qui s’était arrêtée d’un seul coup, sur la culture de la constance et de la régularité qui a disparu au gré des choix et des considérations déplacés. Au fil du temps, le Tunisien découvre aujourd’hui que l’étiquette n’a jamais correspondu ni à la vocation de ceux qui l’avaient trompé, ni aux enjeux de l’étape qui a suivi la révolution. Une étape dans laquelle il n’était plus question de compétence, ou encore de projets et de réformes.
La Tunisie est toujours en vie…
Plus on évoque aujourd’hui cette période sombre de l’histoire de la Tunisie, plus on se rend compte du gâchis et de la dispersion causés à l’occasion. Plus on se rend compte aussi que la Tunisie aurait été certainement mieux avec d’autres acteurs, d’autres approches et des visions certainement différentes. Plus on se rend compte enfin que l’un des plus grands paradoxes qui ont marqué cette période était cette tendance à inverser les rôles. Ceux qui se voyaient, mais qui se croient toujours indispensables, n’étaient pas en mesure, et ne le sont pas encore, de prétendre aux grandes réussites et aux grandes réalisations. Ils n’ont pas compris, et ils ne comprennent pas de nouveau, que la réussite n’est que la conséquence de toute une série d’attitude et d’adoption de valeurs.
Il ne faut pas chercher ailleurs les raisons qui ont amené les décideurs de l’époque à ne pas suffisamment évoluer, à ne jamais travailler les fondamentaux, tout cela en dépit des moyens et des faveurs dont ils bénéficiaient. Dans leur immense majorité, ceux qui étaient aux commandes n’avaient pas de toute évidence une idée de ce que doit représenter une responsabilité, une fonction. Ce qui s’y conçoit, ce qui s’y réalise…
Plus encore, l’action politique n’est plus ce que l’on croit. Même si elle reste toujours prête à accepter certaines rétributions. Elle est entrée dans un genre de rapports progressistes, évolutionnistes. En tout cas loin de l’esprit conservateur et loin des polémiques inutiles, infructueuses, voire absurdes.
Il est toujours utile de rappeler qu’il y avait un turnover chez tous ceux qui avaient été parachutés dans des postes de responsabilité, de remémorer le rôle et les prérogatives de ceux qui étaient aux commandes, que ce soit sur les terrains ou dans les bureaux. Beaucoup d’entre eux avaient découvert les règles de la gouvernance, de l’administration, du management, de l’économie, des finances en débarquant là où ils étaient nommés. Le rôle et les prérogatives de ceux qui sont aux commandes, que ce soit sur les terrains ou dans les bureaux.
Il serait aujourd’hui aisé de citer des exemples de responsables incapables de s’assumer pleinement, ou encore de porter un projet porteur. Des hommes et des femmes ayant touché aux limites de leurs fonctions. Bref, un entourage, un peu juste pour la galerie et pour le spectacle, mais pas assez pour l’efficacité, pour l’action, pour la performance…
Finalement, tout ce que l’on peut dire sur la décennie noire se résume en un constat amer, triste et désagréable : au lendemain de la Révolution et sous les ordres de décideurs novices, néophytes et inexpérimentés, la Tunisie avait raté l’opportunité de réussir la transition tant escomptée, mais elle est toujours en vie. Elle se réinvente et elle finira par prendre le dessus. Il y a toujours un lendemain…