L’entreprise autrement : Tourisme, Kairouan mérite nettement mieux (*)

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Marginalisation tous azimuts, pléthore d’études et de propositions et de décisions, plusieurs actions hélas du type saupoudrage, Kairouan et sa région restent encore à la traîne dans tous les domaines, dont ceux qui avaient fait sa gloire durant au moins quatre siècles, et ce, depuis sa fondation en l’an 50 de l’Hégire (670 ap. J.-C.).

Comment et avec quels habits va-t-elle donc fêter, dans cinq ans (nous sommes en l’an 1445), 14 siècles, lunaires de gloire mélangées de trop de déceptions à tel point que son histoire tumultueuse s’est transformée en une profonde blessure narcissique pour les Tunisiens et même pour les Maghrébins ?

Oui, la capitale de l’Ouest musulman, ville phare de la science, de la spiritualité, des arts, du développement durable (agriculture, artisanat commerce,…), est à la traîne, y compris côté tourisme, et ce, malgré son riche patrimoine culturel et naturel et malgré l’apport décisif et considérable de ses enfants pour le tourisme tunisien.

Elle reste, hélas, pour la énième année consécutive une destination de passage avec pour principale mission celle d’enrichir le produit des destinations voisines et surtout les poches de certains avec zéro impact réel sur la ville et sa région (voir nos précédentes chroniques).

En effet, elle pourrait enrichir son offre autant qu’elle le voudra, elle sera, hélas, toujours exploitée par les zones touristiques voisines car ces dernières accaparent une importante infrastructure hôtelière, des moyens de transport, des guides et des marchés.

C’est pour cela que Kairouan doit devenir une destination touristique à part entière que l’on achète de toute part dans le monde, surtout par les Arabes et les musulmans, d’une façon générale. Pour cela, elle doit d’abord devenir une ville sûre, décrocher le label «ville-jardin» et le label «ville-santé» (traduire, entre autres, propreté, hygiène publique) irréprochables et doit devenir la ville des fontaines-monuments, par excellence, comme elle l’était à ses moments de gloire. Que dire, alors si nous lui ajoutions sa région ?

La ville sainte doit, quant à elle, rester une ville spirituelle (veiller à améliorer la qualité du fameux festival international dédié au Mouled), culturelle, scientifique et une région pour la découverte, le repos et la santé (calme, air sec et pur, sources pour cures). Kairouan doit devenir, aussi, la ville des festivals internationaux de haut niveau, des congrès, des foires spécialisées et des salons.

Comme exemple, nous citerons Marrakech, Avignon (qui ressemble beaucoup à Kairouan côté histoire et vocation), Sharjah aux Emirats et Gyeongju, l’ancienne capitale de la Corée (actuellement, côté Sud). L’on pourrait lui ajouter les tournages de films et les manifestations sportives d’élite et nobles ou liées aux traditions.

Mais tout cela nécessite une véritable mise-à-niveau et à tous les niveaux, dont la route Enfidha-Kairouan, programmée tronçon d’une autoroute (et de manière urgente la sauvegarde du patrimoine, en train de partir en fumée).

L’essentiel c’est que les touristes, qui doivent venir en petits groupes tout au long de l’année, trouvent une offre capable de les retenir au moins trois jours et deux nuitées. Penser alors à développer, à côté de certains hôtels de charme pour bien nantis, de petites unités d’hébergement qui doivent rester abordables, côté prix mais irréprochables, côté hygiène et service minimal (éviter ainsi la tare de notre tourisme classique, basé sur l’hôtellerie et l’hôtelier qui fait tout pour retenir en son sein le touriste). Penser à doter la ville de toilettes publiques bien entretenues.

Il faut aussi user de créativité et exploiter d’une manière intelligente et élégante ce qu’il y a. Exemple, permettre aux touristes d’admirer la ville, du haut de l’imposant minaret de la Mosquée de Oqba, cela ne coûte pas grand-chose mais rapporte gros. Dire, aussi que c’est le premier vrai minaret en Islam, un détail très important mais qui constitue un fort motif de visite. Penser aussi à placer des plaques explicatives devant l’entrée des demeures ayant été habitées par des célébrités.

Autre exemple, confectionner de petits tapis et objets souvenirs (en cuivre, par exemple) avec l’image de ladite mosquée ou celle de la Mosquée dite «du barbier du Prophète» ou des fameux bassins des Aghlabides, des miniatures, des pendentifs, etc. Il faut voir ce grand commerce, à Avignon (Palais des papes, le fameux pont,…) ou tout autour de la mosquée et du sanctuaire d’Eyup Sultan (Abou Ayyoub, le compagnon du Prophète) à Istanbul ou encore côté du musée du Louvre à Paris et aux portes de la Cité interdite à Pékin, etc.

Autre exemple, une demi-journée hammam traditionnel, massages et relaxation, pour les groupes, avec, bien sûr respect de la non-mixité, des séances de tatouage traditionnel soft «hénné et harqous», des visites de la médina à bord de petites autos électriques pour personnes âgées, etc.

Nous avons, pour notre part proposé, depuis 2017, plus de 30 idées de projets, capables de renforcer la destination «Kairouan». Certains d’entre elles ont trouvé la voie de la concrétisation, dont quelques-unes par nos soins, d’autres nécessitent plus de moyens et surtout une réelle et sincère volonté politique.

Citons, en vrac, la place de l’histoire des conquêtes avec des plaques géantes explicatives, le palais des eaux (complexe des fameux bassins et un musée), un grand parc de loisirs (avec attractions, cascades, lac artificiel, jeux aquatiques, cafés et restaurants, etc.), l’observatoire- musée astronomique, la cité du cinéma (premier long métrage).

Citons aussi une faculté pour médecines alternatives (Ecole de médecine de Kairouan), l’Institut Sohnoun pour la magistrature, le conservatoire «Zyriab» de musique, le conservatoire «Cheikh Barraq» pour la psalmodie du Coran et pour l’adhann (l’appel à la prière), le palais de la Kairouanaise (Les fameuses Arwa, Al Fihriyya, Khadija bent Sohnoun, Asma bent al Assad, Om Milel, la célèbre régente…) et un second pour les célébrités de la ville qui sont souvent des célébrités internationales.

Citons enfin, un colloque international du roman (Kairouan a vu naître le premier roman tunisien, de Salah Souissi), un deuxième pour la poésie, un autre dédié aux musiques sacrées et spirituelles, un quatrième pour le livre, une académie du fiqh malékite, un centre d’études et de recherches sur l’Islam en Afrique et en Europe, un festival pour les fameux pains de Kairouan, ressusciter le festival du maqroudh, une grande manifestation pour les sports équestres ?… et la liste est encore longue.

(*) V et fin   

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