Le Prix découverte Comar d’Or aspire à mettre en avant le travail et le talent des nouveaux auteurs qui bravent l’aventure de l’écriture. Il a révélé de grands noms, aujourd’hui reconnus dans le paysage littéraire tunisien. L’édition de cette année 2024 a récompensé le jeune écrivain Chaker Nacef pour son premier roman «Arch el majanine». Nous l’avons rencontré après la cérémonie et il nous a accordé cet entretien.
Pouvez-vous nous décrire votre parcours avant cette consécration ?
Je suis infographiste, fonctionnaire dans une administration étatique. J’ai commencé à écrire des poèmes en arabe depuis mon jeune âge et j’anime un club de poésie dans un centre culturel. Il s’agit de mon premier roman que j’ai écrit entre 2016 et 2020 et que je n’ai réussi à publier qu’en 2023.
Quelles sont les causes de ce retard de publication ?
Il faut de la persévérance pour voir son manuscrit transformé en livre vendu dans les rayonnages des librairies. Même s’il existe de nombreuses maisons d’édition en Tunisie, faire accepter son projet est difficile. Si vous n’avez pas de réseau dans le monde de l’édition, ou pas de réputation pré-établie, les grands éditeurs, qui nous font tous rêver, auront peu de chances de regarder votre ouvrage. D’ailleurs, j’ai fait une première tentative en 2020 en soumettant mon manuscrit et j’ai essuyé un premier refus après un processus long et extrêmement sélectif. En 2023, j’ai recontacté le même éditeur, j’ai insisté en demandant un entretien et j’ai finalement réussi à le convaincre.
Est-ce qu’il y a d’autres difficultés auxquelles vous vous êtes confronté, en tant que jeune écrivain débutant ?
Comme tous les fonctionnaires, je suis longtemps bloqué dans l’exercice quotidien de mes tâches professionnelles. Cependant, une part importante d’activités culturelles est proposée en dehors des jours de repos ce qui fait qu’une infime minorité de fonctionnaires y a accès. Lorsqu’il s’agit de favoriser la créativité chez les jeunes, ces aspects importants doivent être pris en compte. Les entreprises sont tenues de renforcer la créativité artistique et la participation culturelle de leurs emploiyés dans les colloques, les rencontres et les débats.
Il est crucial de créer un environnement professionnel qui encourage les salariés à sortir des sentiers battus pour s’épanouir et mettre en valeur leurs talents.
En effet, les activités culturelles font partie de ces petits plus qui encouragent à réfléchir de manière critique, à résoudre des problèmes et à explorer des idées innovantes. Pourquoi ne pas adopter différentes mesures et favoriser les autorisations pour les contextes culturels ?
Le temps de travail devrait être repensé en fonction des besoins des salariés et construit autour de la formation professionnelle, du travail et des activités socio-culturelles. On en est loin.
Qu’est-ce qui a impressionné le jury dans votre roman, à votre avis ?
Sachant que tous les thèmes sont déjà abordés, on a l’impression que « tout est dit ». Il faut non seulement une idée originale pour sortir du lot, mais aussi une approche novatrice. Selon les critiques, j’ai fait preuve d’une grande capacité d’imagination pour donner vie à mon intrigue mais également pour produire et décrire des personnages attachants. Je me suis basé sur des scènes de ce qui nous entoure. En fin analyste, j’en ai fait des descriptions imagées des lieux, des attitudes, des émotions, des apparences permettant au lecteur de presque visualiser l’histoire racontée.
Peut-on dire que ce couronnement marque le début véritable de votre carrière de romancier ?
En décernant des prix, cette cérémonie honore les réalisations de la création littéraire et entend attirer sur nous l’attention nationale. C’est une véritable preuve de reconnaissance dans ce choix de carrière qui n’est, en réalité, pas donné à tout le monde et où le talent littéraire seul ne suffit pas. Je dois travailler davantage sur moi-même et je me suis promis de m’attacher davantage à mes rêves et de publier un nouveau roman chaque année ou presque.