Lancée officiellement en janvier 2021, la Zlecaf réunit 54 des 55 pays africains, couvrant un marché de plus de 1,3 milliard de personnes avec un produit intérieur brut combiné de 3,4 billions de dollars, cet accord historique s’inscrit dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine, qui promeut une Afrique intégrée, prospère et pacifique, et a pour objectif de stimuler le commerce intra-africain en réduisant les barrières commerciales.
La Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) est une initiative ambitieuse de l’Union africaine visant à créer le plus grand marché commun du monde en termes de nombre de pays participants. Lancée officiellement en janvier 2021, la Zlecaf réunit 54 des 55 pays africains, couvrant un marché de plus de 1,3 milliard de personnes avec un produit intérieur brut combiné de 3,4 billions de dollars, cet accord historique s’inscrit dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine, qui promeut une Afrique intégrée, prospère et pacifique, et a pour objectif de stimuler le commerce intra-africain en réduisant les barrières commerciales, facilitant ainsi une plus grande circulation des biens, des services et des personnes à travers le continent.
Dans ce cadre, Mohamed Adem Mokrani, avocat et consultant économique, a mentionné que la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) a pour principaux objectifs de créer un vaste marché unique pour les biens et services sur l’ensemble du continent africain, de faciliter la libre circulation des personnes, d’encourager un développement socioéconomique inclusif et durable, de renforcer la compétitivité des économies africaines, de promouvoir l’industrialisation et la diversification économique, ainsi que de coordonner les politiques économiques et commerciales des Etats membres. En établissant un marché commun, la Zlecaf cherche à réduire les barrières tarifaires et non tarifaires, ce qui devrait stimuler considérablement les échanges intra-africains.
Diversifier les exportations
«Cette initiative a le potentiel de transformer le commerce intra-africain de manière significative. En éliminant progressivement les droits de douane et les obstacles non tarifaires, la Zlecaf pourrait augmenter le volume des échanges intra-africains, les estimations prévoyant une augmentation de 30 à 80%, entraînant une hausse des revenus économiques d’environ 7%. Elle vise également à diversifier les exportations africaines, en encourageant la production de produits manufacturés et de services, au-delà des matières premières. Cela pourrait non seulement créer des emplois, mais aussi stimuler le processus d’industrialisation sur le continent», assure Mokrani.
Il assure, d’autre part, que la Zlecaf pourrait réduire la dépendance de l’Afrique aux importations extérieures, en renforçant les chaînes de valeur régionales et en améliorant ainsi la sécurité alimentaire et énergétique. La concurrence accrue sur le marché intra-africain pourrait également inciter les entreprises à améliorer leur efficacité et leur productivité, les rendant plus compétitives au niveau mondial. La création de ce marché commun facilitera une plus grande intégration des économies régionales, simplifiant les échanges transfrontaliers et unifiant ainsi le marché continental.
Enfin, la Zlecaf a pour ambition de promouvoir une croissance économique inclusive en se concentrant sur les groupes marginalisés, comme les femmes et les jeunes, et en offrant des opportunités aux micro, petites et moyennes entreprises. En stimulant le développement industriel et la diversification économique, elle vise à améliorer les conditions de vie sur le continent et à réduire les inégalités de revenus. En somme, la Zlecaf représente une initiative majeure pour transformer l’économie africaine, en augmentant le commerce intra-africain, en diversifiant les économies et en favorisant un développement durable et inclusif. La réussite de cette transformation dépendra toutefois de la mise en œuvre effective des politiques, des infrastructures et de la coopération entre les Etats membres pour atteindre ces objectifs ambitieux.
Adam Mokrani ajoute à cet effet que la Tunisie, historiquement dépendante des marchés européens pour ses exportations, cherche activement à diversifier ses débouchés en se tournant vers le continent africain. En 2018, environ 73,4% des exportations tunisiennes étaient destinées à l’Union européenne, principalement dans des secteurs à faible valeur ajoutée, comme le textile et les fils électriques. Cette concentration expose l’économie tunisienne à des risques en cas de chocs économiques en Europe. Pour réduire cette dépendance et exploiter les opportunités de croissance en Afrique, la Tunisie a engagé plusieurs initiatives stratégiques, avec un accent particulier sur l’adhésion à la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) et au Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Comesa). Ces accords permettent à la Tunisie d’accéder à de nouveaux marchés sans droits de douane, favorisant ainsi l’intégration régionale et l’expansion des échanges intra-africains.
Dynamiser l’adhésion de la Tunisie au Comesa
La Tunisie met également en place des infrastructures logistiques pour faciliter le commerce, incluant le développement de lignes maritimes et aériennes directes vers les principales capitales africaines. Ces initiatives visent à réduire les coûts et à surmonter les barrières non tarifaires, rendant les produits tunisiens plus compétitifs sur les marchés africains. De plus, la Tunisie se concentre sur le développement de secteurs prioritaires, tels que les industries mécaniques et électriques, l’agroalimentaire, les produits pharmaceutiques, et les services numériques. Le pays cherche à établir des partenariats dans des secteurs comme la construction, les technologies de l’information et de la communication, et la santé, tout en soutenant les petites et moyennes entreprises (PME) à travers des programmes de formation et de transformation numérique.
«La stratégie tunisienne inclut également la mise en place de politiques industrielles visant à développer de nouveaux produits et à pénétrer de nouveaux marchés en Afrique subsaharienne. En exploitant son potentiel inexploité d’exportation, la Tunisie cible des pays, comme la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Le gouvernement tunisien collabore avec des organismes internationaux et des institutions nationales pour faciliter l’accès aux financements et renforcer les capacités commerciales des PME. Enfin, la Tunisie adopte une approche proactive en matière de négociations commerciales, s’assurant que les accords de libre-échange soient alignés avec les besoins du secteur privé tunisien. L’engagement du secteur privé et le soutien gouvernemental sont cruciaux pour la mise en œuvre de cette stratégie de diversification des marchés d’exportation, visant à maximiser les bénéfices des accords commerciaux africains et à promouvoir une croissance économique inclusive sur le continent africain», confirme le consultant.
Mokrani souligne que l’adhésion de la Tunisie au Comesa a montré des résultats mitigés en termes d’exportations et de partenariats commerciaux jusqu’à présent. «Depuis son adhésion en juillet 2018, les exportations tunisiennes vers les pays membres du Comesa ont connu une augmentation limitée. Par exemple, le commerce avec le Kenya a vu une progression significative, faisant de ce pays un partenaire clé en Afrique de l’Est. Les exportations tunisiennes comprennent principalement des produits alimentaires, tels que les dattes et l’huile d’olive, ainsi que des composants automobiles et divers produits industriels. Cependant, malgré ces progrès, la part des exportations vers les pays africains reste relativement faible, avec des échanges majoritairement concentrés sur des partenaires traditionnels comme la Libye et l’Egypte. La Tunisie a réussi à établir quelques partenariats commerciaux notables dans la région Comesa. Cependant, la plupart des pays membres du Comesa n’appliquent pas pleinement les termes de l’accord, ce qui limite l’ampleur des échanges commerciaux. Les barrières non tarifaires, telles que les procédures douanières complexes et les limitations logistiques, continuent de poser des défis importants. Par exemple, des difficultés ont été signalées avec des pays comme l’Ethiopie et l’Ouganda, où les réductions tarifaires ne sont appliquées que partiellement», explique Mokrani.
Il mentionne aussi que l’adhésion au Comesa offre à la Tunisie des opportunités pour diversifier ses marchés d’exportation et réduire sa dépendance vis-à-vis de l’Union européenne. Cependant, pour maximiser ces opportunités, la Tunisie doit surmonter plusieurs obstacles, notamment le renforcement de ses représentations diplomatiques et commerciales en Afrique et l’amélioration des infrastructures de transport. Le développement de lignes maritimes et aériennes directes est crucial pour faciliter les échanges avec les autres membres du Comesa.
«Bien que l’adhésion de la Tunisie au Comesa ait ouvert des portes pour l’expansion commerciale en Afrique de l’Est, les résultats restent en deçà des attentes. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour lever les obstacles persistants et exploiter pleinement le potentiel de ce partenariat régional. L’expérience de la Tunisie au sein du Comesa peut fournir des enseignements précieux pour renforcer sa participation à la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Le Comesa, en tant que bloc économique régional, a permis à la Tunisie de se familiariser avec les dynamiques de l’intégration économique africaine, les défis logistiques et les exigences en matière de compétitivité des produits sur les marchés africains», remarque Mokrani.
Il fait savoir que, tout d’abord, l’expérience tunisienne au Comesa a mis en évidence l’importance de la réduction des droits de douane et des barrières non tarifaires pour stimuler les exportations. Bien que la Tunisie ait bénéficié de la suppression des droits de douane sur ses exportations vers les pays membres du Comesa, elle a aussi été confrontée à des restrictions persistantes et des pratiques protectionnistes de certains pays membres, limitant ainsi le potentiel de ses exportations. «Cette expérience souligne la nécessité pour la Tunisie de promouvoir une application cohérente des accords commerciaux au sein de la Zlecaf et de travailler activement avec d’autres membres pour harmoniser les politiques tarifaires et non tarifaires. Cela inclut la participation proactive dans les discussions sur les règles d’origine, qui déterminent la qualification des produits pour les préférences tarifaires, afin de maximiser les avantages pour les produits tunisiens. En outre, la Tunisie a appris l’importance de l’amélioration des infrastructures logistiques pour faciliter le commerce. Le manque de liaisons maritimes et aériennes directes entre la Tunisie et les autres pays du Comesa a été un obstacle majeur à l’expansion des échanges commerciaux. Pour sa participation à la Zlecaf, la Tunisie devra renforcer ses infrastructures de transport, notamment en établissant des corridors de transit efficaces et en améliorant les postes frontaliers comme celui de Ras Jedir. Cela permettra de réduire les coûts de transport et d’accélérer les délais de livraison, rendant les produits tunisiens plus compétitifs sur les marchés africains. De plus, l’expérience du Comesa a montré l’importance de la diplomatie économique et de la présence sur le terrain. La faible représentation diplomatique de la Tunisie dans les pays du Comesa a limité sa capacité à soutenir ses entreprises et à développer des partenariats commerciaux. En participant à la Zlecaf, la Tunisie devra accroître ses efforts pour renforcer sa présence diplomatique et commerciale dans les pays membres, en ouvrant davantage de missions diplomatiques et en établissant des bureaux de représentation commerciale. Cela facilitera l’accès des entreprises tunisiennes aux informations sur les marchés locaux et les aidera à s’adapter avec les régulations locales», annonce Mokrani.
Mokrani a souligné la nécessité de diversifier les produits d’exportation. La concentration actuelle des exportations tunisiennes sur quelques marchés classiques montre que la diversification est cruciale pour réduire les risques économiques et maximiser les opportunités commerciales. «Pour la Zlecaf, la Tunisie devrait continuer à explorer et à développer de nouveaux secteurs à forte valeur ajoutée, tels que les technologies de l’information, les services financiers et les produits pharmaceutiques, en plus des secteurs traditionnels, comme l’agroalimentaire et les textiles. La Zlecaf, avec son marché potentiel beaucoup plus vaste, offre une opportunité unique pour la Tunisie de diversifier ses partenaires commerciaux et ses secteurs d’exportation. Enfin, l’engagement avec des structures de soutien et des initiatives de renforcement des capacités sera crucial. La participation de la Tunisie au Comesa a montré que le soutien aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux entrepreneurs est essentiel pour réussir sur de nouveaux marchés. Dans le cadre de la Zlecaf, la Tunisie doit intensifier ses efforts pour renforcer les capacités des PME, améliorer leur accès au financement, et les préparer à être compétitives sur le marché continental. Des programmes de formation, de soutien technique et d’incitations fiscales pourraient être mis en place pour encourager l’innovation et la compétitivité des entreprises tunisiennes», déclare Mokrani. En guise de conclusion, Adam Mokrani certifie que l’expérience de la Tunisie au sein du Comesa fournit des leçons précieuses sur les défis et les opportunités de l’intégration régionale africaine. En tirant parti de ces enseignements, la Tunisie peut renforcer sa participation à la Zlecaf, en mettant l’accent sur la réduction des barrières commerciales, l’amélioration des infrastructures logistiques, l’expansion de sa diplomatie économique, la diversification de ses exportations, et le soutien aux PME. Ces actions permettront non seulement de maximiser les bénéfices économiques pour la Tunisie, mais aussi de contribuer à une intégration économique plus profonde et plus inclusive à travers le continent africain.