La Tunisie, consciente des défis environnementaux et sociaux actuels, s’est dotée d’une Stratégie nationale de transition écologique pour répondre aux enjeux climatiques et économiques.
Pendant deux jours, le séminaire international ESG Impact (Environnemental, Social and Gouvernance), organisé par « Pass Training », convoque des figures de proue de ce domaine mal connu pour une plongée au cœur de la responsabilité sociale, environnementale et économique.
Leila Chikhaoui-Mahdaoui, ancienne ministre de l’Environnement, professeure agrégée en droit public, Université de Carthage, Faculté des sciences juridiques, a présenté avec brio le contexte international et national des standards ESG.
Visiblement bien imprégnée du sujet, l’universitaire profite de sa prise de parole pour indiquer que la Tunisie, dans le cadre de sa stratégie nationale de transition écologique, est en train d’avancer sur le bon chemin. En effet, la Tunisie, consciente des défis environnementaux et sociaux actuels, s’est dotée d’une Stratégie nationale de transition ecologique (Snte) pour répondre aux enjeux climatiques et économiques. Conformément à la Constitution de 2022, cette stratégie vise un développement durable aligné sur des principes d’adaptation et de résilience.
53 mesures spécifiques et une vision à l’horizon 2050
Une stratégie qui repose sur cinq axes principaux : renforcer la gouvernance écologique, adapter les secteurs au changement climatique, gérer durablement les ressources naturelles, promouvoir une économie circulaire et développer une culture environnementale. Avec 53 mesures spécifiques et une vision à l’horizon 2050, la Snte cherche à mobiliser les acteurs publics, privés et civils pour mutualiser les efforts vers une économie verte et résiliente.
Pour sa part Antoine Peyrel, associé fondateur du cabinet français Bredhill Consulting, retrace l’expérience française dans le domaine de l’intégration des principes ESG. «Nous avons commencé par bâtir les fondations : politique, gouvernance, engagement des fournisseurs», explique-t-il.
Année après année, le processus s’est structuré : mesurer les impacts CO2 en 2021, transformer les stratégies dès 2022, puis industrialiser leur pilotage en 2023, pour enfin, en 2024, commencer à aligner les politiques ESG avec les exigences de conformité européenne, notamment celles du Csrd (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui est une directive européenne adoptée en 2022.
150 entreprises sur les stratégies de décarbonation sont déjà formées
«C’est un véritable ruissellement », insiste Peyrel, évoquant un changement transversal qui touche, au sein des entreprises, chaque département, des achats aux ressources humaines.
De son côté, Raja Touil, directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie tuniso-française, note que la transition ESG est à la fois un défi financier et une opportunité stratégique. Avec 2000 adhérents, la chambre a amorcé l’adoption des principes ESG, avec dans son viseur une labellisation dès 2025. Clairement, Raja Touil consent que les principaux défis sont d’ordre financier et résident dans l’investissement, la formation et l’équipement. «Cela demande des moyens financiers conséquents», souligne-t-elle.
En attendant la mise en place d’un véritable marché carbone en Tunisie, encore à l’état de discussions, la chambre a déjà formé 150 entreprises sur les stratégies de décarbonation. L’objectif ? Promouvoir des pratiques de responsabilité et de durabilité, tout en attirant PME et start-up dans ces démarches. Mme Touil évoque avec admiration le statut de société à mission en France, perçu comme une avancée majeure. «Ce modèle pourrait inspirer nos entreprises locales pour intégrer la RSE et les normes ESG», affirme-t-elle.
Par ailleurs, au sein des entreprises, un monde qu’elle connaît très bien, il est nécessaire, explique-t-elle, au-delà de la théorie, de surmonter des conflits intergénérationnels au sein des organisations.
Lors de ce séminaire, plusieurs organisations ont aussi présenté leurs expériences en la matière. Certaines entreprises présentes n’ont pas réussi, toutefois, à convaincre l’audience de tropisme ESG, à l’instar d’une entreprise nationale souvent pointée du doigt pour ses responsabilités présumées et avérées dans la dégradation de l’environnement, mais dont les actions ESG restent très limitées.