Cafouillages et bisbilles

Trois jours successifs de mesures et de décisions exceptionnelles. Les premières qui viennent de Carthage sont vides de sens. Les autres qui tombent de La Kasbah sont peu claires et laissent les citoyens dans le flou. Or dans ce genre de situation, où la clarté des mesures est de mise, même les autorités compétentes ne sont pas capables d’en appréhender le sens et par conséquent leur mise en œuvre devient un casse-tête chinois.

Le chaos qui a régné avant-hier à l’aéroport de Tunis-Carthage découle non seulement de l’incivilité et de l’inconscience des Tunisiens de retour de l’étranger, et illustre aussi de façon éloquente la faible coordination entre les différents intervenants dans la gestion de la crise.

En effet, si le dispositif mis en place s’est enrayé en quelques heures, c’est que les consignes émanant des supérieurs hiérarchiques sont insuffisantes, incomplètes ou même contradictoires.

Ce qui plonge davantage le pays dans l’atmosphère d’un film d’épouvante avec des centaines de revenants et autant de possibles vecteurs du virus lâchés dans la nature et capables de contaminer à tout-va, familles, parents, amis ou simples chauffeurs de taxi et conducteurs de bus.

Demain, deuxième journée de confinement total, sera un autre test grandeur nature pour mesurer l’efficacité des dispositions préconisées pour freiner la propagation du virus dans notre pays. Car c’est demain que des milliers de personnes se rendront au travail puisque la majorité des secteurs «vitaux» forment, entre le public et le privé, l’essentiel du tissu économique et industriel tunisien. De plus, les petits commerces et les épiciers, qui seront ouverts, continueront à être pris d’assaut par des citoyens angoissés à l’idée de manquer de provisions. Qui observera alors le confinement ? Qui veillera à son application et avec quels outils ?

Autant de questions qui resteront sans réponse tant les mesures laissent sur leur faim des millions de Tunisiens incapables d’en saisir la portée. Pourtant, l’heure est certainement grave et commande un minimum de clarté. De quoi rendre caduques et non avenues des dispositions prises à la va-vite et sans concertation préalable entre les divers acteurs. L’absence de simulation et d’opérations blanches en temps normal, qui est à même de pointer les défaillances de la chaîne de secours, de soins et de prévention, pèse de tout son poids sur la gestion de cette crise sanitaire. Les efforts des uns et des autres, bien que louables, risquent de s’en aller en eau de boudin. Car c’est bien connu : à trop charger la barque, elle finit par couler. On avait simplement besoin de quelques mesures claires et sans équivoque pour pouvoir, chacun à son niveau, en observer la stricte application ou tout simplement s’y conformer. Les uns parlent de crise de communication institutionnelle, les autres évoquent une crise d’autorité. Quoi qu’il en soit, nous sommes face à un cafouillage qui ne générera que davantage de chaos, de panique…et surtout de contaminations.

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