Une lycéenne renvoyée sur fond de conflit avec le directeur du lycée : Quand la «victime» n’a que sa parole à faire valoir

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Dans ce genre d’affaire, ce sont les paroles des élèves contre celles des responsables. Hormis le soutien de la société civile et de leurs parents, ces adolescents sont malheureusement livrés à eux-mêmes en l’absence de toute assistance légale garantissant leur droit.

Il est devenu habituel de voir des élèves perdre leur avenir et obligés de renoncer à leur cursus éducatif en raison d’incidents les opposant au personnel éducatif. La dernière affaire nous parvient du gouvernorat du Kef lorsqu’une lycéenne a été traduite devant le conseil de discipline et virée du lycée. Le conseil a suggéré même son renvoi de tous les autres établissements éducatifs publics sur fond de conflit l’opposant au directeur de son établissement éducatif.

En effet, la jeune candidate au baccalauréat, dont l’affaire a suscité une vive polémique sur la toile, a porté plainte contre le directeur du lycée Salah-Ben-Youssef au Kef pour harcèlement et violence. Faute de preuves, l’affaire a, donc, été classée par la brigade de la violence contre la femme. Cependant, face à ces accusations, le directeur de l’école a sollicité une réunion du conseil disciplinaire de l’établissement éducatif en question, il a rédigé un rapport contre la jeune fille, l’accusant de l’avoir insulté. Quelques jours après, l’administration du lycée décide de la renvoyer définitivement et de suggérer au ministère de l’Education de l’interdire de tous les établissements éducatifs.

La jeune fille, issue d’une famille modeste, n’avait pu charger un avocat pour sa défense, bien qu’elle ait porté plainte auprès de la police, sauf que dans ce genre d’affaire, ce sont généralement les élèves, dans une position inférieure, qui perdent tous leurs droits.

Réagissant à cette affaire, la délégation régionale de l’Éducation au Kef a rendu public un communiqué pour donner sa version des faits. On affirme, en effet, que la lycéenne a déposé une plainte auprès de la brigade spécialisée dans les crimes de violences contre la femme et l’enfant, accusant le directeur du lycée de harcèlement, sauf que le ministère public avait décidé de classer l’affaire pour manque de preuves, et ce, le 4 mai courant. Et de confirmer que la lycéenne a été définitivement exclue du lycée, tout en suggérant au ministre de l’Education son exclusion de tous les lycées tunisiens.

Sauf que selon la délégation régionale, pour garantir tous ses droits, son dossier disciplinaire a été soumis aux services centraux du ministère de l’Education pour qu’il soit examiné davantage.

Le problème c’est que la lycéenne devrait passer actuellement les épreuves du bac blanc qui se poursuivent jusqu’au 2 juin. Elle est même menacée de rater les examens du baccalauréat si son affaire traîne toujours et si elle ne parvient pas à se défendre.

Yassine Ayari intervient  

Face à ce qu’il appelle une injustice dont est victime cette élève, le député Yassine Ayari a adressé des correspondances aux ministres de l’Intérieur et de la Justice pour enquêter sur cette affaire. Il a également indiqué avoir adressé une correspondance à la ministre de la Femme pour l’appeler à fournir un soutien psychologique à la victime. «Une quatrième correspondance a été adressée au ministre de l’Education afin de permettre à l’élève de passer le concours du bac et la protéger contre toute agression. Si elle parvient à réussir c’est à la justice de trancher, nous devons lui garantir toutes les chances pour passer ces épreuves loin de cette polémique», s’est-il expliqué sur son compte Facebook.

Quoi qu’il en soit, la sanction infligée à la jeune lycéenne est disproportionnée par rapport aux actes reprochés, sachant qu’elle est seulement accusée d’avoir diffamé le directeur du lycée. Serait-il judicieux de priver la jeune élève de son droit de passer le baccalauréat dans de bonnes conditions à cause d’une telle affaire ? Il faut rappeler que dans ce genre de conflit, la victime n’a souvent que sa parole à faire valoir.

Le harcèlement sexuel en milieu scolaire est une réalité en Tunisie. En février 2016, au Kef, un professeur est accusé de harcèlement sexuel à l’encontre d’une lycéenne sur Facebook. En janvier 2016, 63 plaintes ont été déposées contre un instituteur de l’école Habib-Bourguiba à Houmt-Souk, pour harcèlement moral et sexuel. En mars 2015, à Sousse, une fille de 8 ans a été victime de harcèlement sexuel. Sa mère porte plainte contre le gardien de l’école. Ces cas montrent, effectivement, que ce fléau est répandu dans nos établissements éducatifs, les élèves sont souvent obligés de se taire pour préserver leur droit à l’éducation. 

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