Nous avons peine à croire que tout cela ait pu se produire : le paysage politique engendré par le mouvement du 25 juillet, ainsi que les décisions et les mesures exceptionnelles qui s’en étaient suivies, risquent de provoquer l’émergence et la prolifération des intermédiaires et des intrus.
Lors d’une conférence de presse, le Mouvement du 25 juillet a tenu à remettre les choses à leur place et à apporter les précisions qui s’imposent d’elles-mêmes : il nie tout rapport avec ce qu’on qualifie aujourd’hui comme étant le Conseil supérieur de la jeunesse, lequel avait d’ailleurs appelé à des manifestations de soutien au Président de la République, appelant à la vigilance contre les tentatives de récupération et rappelant que les positions officielles du mouvement sont publiées uniquement sur sa page, avec le nom du domaine, ou encore annoncées par ses propres dirigeants.
Les souvenirs nous font revenir aux premières années de la Révolution, et bien entendu celles d’après, au cours desquelles certaines parties avaient envahi le paysage politique à la faveur de la multiplication des intérêts personnels et de tout ce qui en faisait la raison d’être. Sans statut et sans qualification, elles étaient parachutées dans un environnement qui ne leur appartenait pas et surtout par une reconversion dont on ignorait l’origine, et encore moins le sens et l’utilité. Il était ainsi facile de spéculer sur les valeurs avant-gardistes, ainsi que l’exemplarité de la classe politique et de ses acteurs. Une façon de reconnaître onze ans après l’échec de tous ceux qui se sont érigés en décideurs. Et là, l’on ne peut s’empêcher d’évoquer l’état d’esprit qui a affecté la vie collective et tout l’environnement politique. Le spectacle était vraiment sidérant!…
Le même scénario risque-t-il de se reproduire aujourd’hui ? Les démons d’un modèle politique affecté par des considérations qui n’ont pas de rapport direct avec les aspirations du peuple risquent-ils de se réveiller ? Entendrions-nous le même discours, la même démagogie, le même populisme au sujet de la rectification du processus ? Les promesses de lendemains meilleurs sont-elles sous la menace d’une mauvaise tournure ? Sont-elles vraiment à l’abri des dérives ?
Tout cela dépasse largement le débat autour de l’idée que l’on se fait de l’action politique et les appréhensions sur telle ou telle partie, sur tel ou tel acteur. Il n’y a que les débats d’idées, les questions de fond, le sens de la bonne formule pour réhabiliter les valeurs.
Aujourd’hui, le paysage politique devrait saisir l’opportunité de changer d’identité. De crédibilité. De degré de confiance. Non, n’importe qui n’a plus le droit de faire n’importe quoi. La Tunisie ne peut plus continuer à s’égarer dans des circuits impossibles à tracer, et encore moins à cerner.
Monsieur le Président, n’oubliez pas ce qu’il est advenu de vos prédécesseurs à cause de leur entourage, surtout quand ils s’étaient laissé prendre au piège de ceux apparus au hasard des événements et qui avaient trouvé l’opportunité inespérée d’agir dans un milieu dans lequel ils n’ont pas réellement de place, encore moins de vocation. Certes, de là où vous êtes aujourd’hui, il n’est pas si simple de séparer le bon grain de l’ivraie, mais il est clair que l’idée que la Tunisie doit repartir sur de nouvelles bases vous impose le devoir de faire face à un environnement fomenté et de rompre avec…