Lorsque les réactions et les prises de position attirent la désapprobation publique, c’est toute la politique adoptée qui est pointée du doigt. L’insensibilité semble rattraper le parti islamiste chaque fois qu’il s’agit de l’intérêt national. Si le but préconisé est bel et bien établi, les voies ténébreuses empruntées ne sont pas aussi innocentes qu’elles le paraissent.
Par des fautes répétées et avérées, ou par l’acharnement de justifier l’injustifiable, certaines parties ne parviennent toujours pas à constituer même une demi-vérité. Le premier courage aurait été, de toute évidence, de reconnaître ses erreurs et de ne pas continuer à se cacher derrière des faux-fuyants.
Certainement, on n’est pas censé ignorer l’identité et l’appartenance politique de ceux qui sont derrière les réseaux d’embrigadement des Tunisiens dans les zones de conflit, notamment en Syrie. Ils sont aujourd’hui plus de cent personnes accusées d’enrôler des Tunisiens dans les armées islamistes. D’anciens ministres, d’anciens députés, d’anciens conseillers sécuritaires au ministère de l’Intérieur, d’anciens responsables de la sécurité à l’aéroport Tunis-Carthage, des membres du parti Ennahdha, autant d’incriminés dont les noms sont évoqués. Certains ont été entendus dans cette affaire, d’autres comparaîtront incessamment devant la justice. Alors que Mohamed Frikha, ancien député sous les couleurs d’Ennahdha, Habib Ellouz, ancien dirigeant du mouvement islamiste, et Lotfi Sghaier, ex-directeur général des frontières et des étrangers (Dgfe), ont été mis en examen.
Conscient du fait que la liste des personnes mises en garde à vue est de nature à s’allonger au fur et à mesure que l’enquête avance, Ennahdha a vite fait de dénoncer hâtivement «des arrestations anarchiques par des éléments inconnus et sans aucun respect des procédures légales», «des campagnes médiatiques lancées par certaines parties connues pour leur hostilité envers le parti et ses dirigeants», «une nouvelle démarche pour détourner l’attention de l’opinion publique des dossiers brûlants, de l’échec de la politique des auteurs du putsch, illustré notamment par les hausses des prix, la disparition des produits alimentaires de base, comme le pain, l’eau, le lait, le sucre…»
Dans sa quête de ressurgir chaque fois que l’occasion se présente et préférant toujours prendre la tangente, Ennahdha ne laisse passer aucune «opportunité», aucun «événement», pour profiter des crises et des tourments des Tunisiens. Le parti n’hésite pas à amplifier les situations afin de montrer que ses adversaires politiques ne sont pas en mesure de bien gérer. Ils continuent à jouer les victimes et les innocents et font de la récupération politique par rapport à tout ce qui se passe.
Sans qu’il soit ici question de condamner qui que ce soit, on n’est pas censé ignorer les réelles motivations des dirigeants islamistes. Les intérêts qui motivent et qui conditionnent tout un milieu, bien sûr selon des considérations personnelles.
A travers des accusations, des appréhensions et des interprétations de tous bords, se profilent des campagnes de dénigrement et une mobilisation destinée à remettre en cause tout ce qui est entrepris. Aussi bien ce qui est positif que ce qui est négatif…
A l’analyse des différents rebondissements et des intrigues, il n’est pas difficile de deviner à quoi joue le parti islamiste, le but étant de semer la confusion, de désavouer l’ordre public, tout en alimentant les polémiques.
Le procédé est reconnu et attesté : d’abord on fustige les adversaires politiques, on enchaîne ensuite par les menaces pour finalement tout remettre en cause.
Mais ici et là, il y a un décalage entre ce qui est évoqué, préconisé et défendu, et ce qui a été démontré lorsque les dirigeants nahdhaouis étaient de l’autre côté de la barrière. Entre l’image qu’on veut se faire et la réalité d’une décennie noire fatale pour la Tunisie. Le gâchis, cet ennemi politique duquel le Mouvement islamiste ne veut toujours pas s’en démarquer…
Lorsque les réactions et les prises de position attirent la désapprobation publique, c’est toute la politique adoptée qui est pointée du doigt. L’insensibilité semble rattraper le parti islamiste chaque fois qu’il s’agit de l’intérêt national. Si le but préconisé est bel et bien établi, les voies ténébreuses empruntées ne sont pas aussi innocentes qu’elles le paraissent.