La triste nouvelle s’est répandue dans le pays comme une traînée de poudre et a parcouru toutes les salles de rédaction, provoquant un tollé quasi-général. La défectuosité du système de climatisation a mis dans de beaux draps les myriades de passagers et leurs accueillants. Elle est propre à ternir l’image de notre vitrine par excellence et celle de notre pays en général.
A la Direction générale de l’Office de l’aviation civile et des aéroports (Oaca), l’on impute l’incident à l’intensité du trafic et à la pléthore des passagers, ayant impacté la capacité de la climatisation, en place depuis voilà plus d’un demi-siècle, période d’existence de l’aéroport…
Est-ce à dire que celui-ci devrait faire le vide pour que le système tourne à plein rendement ? Les observateurs avertis attribuent l’incurie à la dégradation de l’état des installations, aggravée par les velléités d’anticipation et de maintenance !
Silence ? Moteur ! Action !
La journée du 13 juillet 2023 est à oublier au plus vite par l’Office de l’aviation civile et des aéroports. Et surtout par les innombrables passagers que le mauvais hasard a voulu qu’ils atterrissent ce jour maudit à l’aéroport international de Tunis-Carthage, où la climatisation s’est fait marquer aux abonnés absents ! Pour les touristes et nos pairs y ayant convergé des quatre points cardinaux de la planète Terre.
La descente aux enfers !
Pour les intéressés, cela a été une véritable descente aux enfers ! Ceci sans compter les myriades de visiteurs ayant eu la malchance d’être là ce jour maléfique (lié au chiffre 13 de la malédiction), pour accueillir et donner de chaleureuses accolades aux leurs, n’ayant pas foulé la terre de la mère patrie depuis que la meurtrière pandémie avait dit à tous les communs des mortels : «Coucou! Me voilà : j’y suis, j’y reste pendant de longues années !». La «bonne» coïncidence, cette fois-ci, a voulu que je fusse présent parmi la foule si dense, pour accueillir à bras ouverts mes chers miens. Et voilà que votre humble serviteur est servi sur un plateau en or ! Malgré les semaines caniculaires sabbatiques et de farniente que je m’étais promises et permises, l’irrésistible réflexe professionnel en a décidé autrement.
Et, plus vite que la musique, je me suis replongé à pic dans le bain du travail malgré le bain de sueur que subissait ma carcasse depuis mes rares cheveux jusqu’au bout des orteils !
Pour faire un zoom sur le spectacle, il faut dire tout de suite que celui-ci s’apparentait à un bain maure pour éléments féminins à la veille de l’Aïd. Il n’y manquait qu’une «harza» pour parfaire le décor. Les nouvelles arrivées, annoncées à un rythme endiablé, par le tableau d’affichage, n’étaient pas pour arranger les choses. Et la promiscuité, l’encombrement et le coude-à-coude ne faisaient qu’accentuer le calvaire d’une foule, les nerfs à fleur de peau, excédée de fatigue et empoisonnée par la puanteur et les odeurs fétides.
Tous les présents, jeunes, moins jeunes, vieux et enfants avaient le teint vert, les visages pâles comme la mort et les yeux cernés. Sur les visages, dégoulinait une abondante sueur qu’on trouvait du mal à essuyer constamment. Toutes les bouches étaient sèches et pâteuses, en l’absence de la moindre gorgée d’eau. Les infortunés boiraient alors la mer et les poissons pour étancher une soif inextinguible !
Ce qui mettait du baume au cœur, c’est l’élan spontané de solidarité agissante (si chantée par nos ancêtres), manifestée par les uns, mieux portants, pour porter secours aux autres, enfants sanglotant, vieilles personnes tremblantes et trébuchantes, ainsi que malades sur le point de tomber dans les vapes…
De l’autre côté de la barrière, c’est l’état d’alerte et l’affolement général. L’on ne sait à quel saint se vouer ! État major, ses lieutenants et équipes techniques avaient le feu aux trousses.
L’on court… L’on s’agite… L’on se tue et s’exténue pour sauver la mise et la face au moindre temps et au moindre supplice d’un large public dans cette situation si précaire et ces conditions si exaspérantes. Les installations sonores de l’aéroport, quant à elles, d’habitude si bavardes, ont observé un curieux mutisme ! puisque, hélas aucune personne n’a été fichue de s’excuser, calmer les esprits, solliciter la patience de l’assistance et livrer la moindre promesse de redresser promptement le milieu ambiant éprouvant dans l’aire à court d’air et de fraîcheur…
«Chassée de la fournaise !»
Ceux qui étaient à plaindre beaucoup plus que les passagers et leurs accueillants, ce sont les agents en poste dans la «fournaise», chaque jour que fait le bon Dieu. Et il leur fallait avoir un corps en béton et des nerfs d’acier pour pouvoir résister et exercer leur «mission impossible», sans perdre le nord et les pédales…
D’ailleurs, l’un des souffre-douleurs de la profession du calvaire (relevant de TunisAir) a dû jouer le tout pour le tout et renverser la table, en lançant un SOS de détresse à travers les ondes d’une radio privée, scandalisant les nombreux auditeurs.
Après avoir largement dénoncé les conditions inhumaines de travail, l’infortuné a été illico expédié chez lui pour profiter d’agréables moments de répit, ronflant à poings fermés sous la fraîcheur revigorante de son clim si généreux. Se disant, advienne que pourra!, se dirait-il.
L’autre son de cloche
Par ailleurs, l’on a cherché à connaître le son de cloche de l’office concerné en tendant l’oreille au directeur central es-qualités, M. Habib Sassi, qui a bien voulu nous fournir les éclaircissements suivants :
«De par sa mission, l’Oaca assure, en plus de la maintenance préventive et curative des équipements de climatisation, le remplacement des équipements et installations qui ne fournissent pas le rendement voulu et la disponibilité requise et qui se sont dégradés au fil du temps sous l’effet du vieillissement».
Des incidents de parcours à l’index
L’Oaca a toujours veillé au remplacement des équipements. Mais la cadence de remplacement de ces derniers a été freinée au cours des six dernières années, notamment par :
– La résiliation du marché n°36/2017 ainsi que du marché n°57/2018, concernant le remplacement des équipements de climatisation, et ce, suite au désistement des entreprises, après avoir reçu l’ordre pour le commencement des travaux.
La suspension de quelques projets de renforcement de la climatisation dans le contexte de l’épidémie du Covid-19.
– Le report des travaux de remplacement des équipements de climatisation eu égard à l’imminence du projet d’extension du terminal 1 de l’Aéroport de Tunis Carthage. Projet ayant finalement fait chou blanc!
Des efforts, mais…
D’autre part, dans le souci de maintenir les installations de climatisation en bon état de marche, l’Oaca a engagé par ses propres moyens des travaux de rénovation des équipements de climatisation, en l’occurrence ceux afférents à 20 centrales de traitement d’air, au remplacement des réseaux hydrauliques, et notamment au remplacement des électropompes, etc.
Sachant, qu’en 2022, l’Oaca a procédé au renforcement de la climatisation, par l’installation de pompes à chaleur, de splits guéables au niveau de la salle d’enregistrement et de contrôle police départs et arrivées, en plus des travaux de rénovation de 7 centrales de traitement d’air, ainsi que le remplacement des réseaux et des équipements hydrauliques.
Des études ont également été finalisées durant cette dernière période pour le remplacement d’une grande partie de la climatisation de l’aérogare principale de l’AITC; l’appel d’offres sera lancé pendant le mois d’août 2023, le budget alloué étant de 8 millions de dinars.
24h sur 24 !
Concernant la panne survenue au début du mois de juillet, elle a concerné la centrale de traitement d’air assurant la climatisation de la zone sud du hall d’arrivée; la prise en charge des travaux de réparation a été immédiatement engagée. Les travaux se sont déroulés sans discontinuité, exceptionnellement 24h sur 24, et ce, pour réduire au maximum la durée des travaux et remettre en marche au plus vite la climatisation.
Prendre le taureau par les cornes
Enfin, il est à espérer que l’office concerné saura tirer la leçon de cette regrettable déconvenue aux revers fâcheux pour la bonne renommée de notre pays à vocation touristique.
Un vieux proverbe dit : «On n’attrape pas le lièvre par un tambour». Autrement dit, il est plus que temps pour que toute la hiérarchie administrative, jusqu’à sa tête, prenne le taureau par les cornes et adopte une solution radicale qui mette notre sacro-saint aéroport à l’abri des aléas et des désagréables surprises de trop.
Pour ce faire, il ne faudrait pas hésiter un instant à mettre le paquet pour préserver notre chance de mettre les quatre doigts et le pouce sur notre paquet de devises si salutaire par ces temps de disette et de fragilité économique.
Ce qui est au final à l’honneur de la direction générale de l’Oaca, c’est qu’elle a eu l’honnêteté de faire amende honorable et de présenter ses excuses à sa clientèle durement secouée par ce malencontreux contretemps. L’on aurait souhaité que ce geste fût fait plus tôt et à chaud. Mais mieux vaut tard que jamais…