L’heure du grand réveil a sonné pour les diplomates tunisiens. Ils ont, désormais, la délicate mission de contribuer au développement économique national depuis les capitales de leur affectation. Ils devraient faire en sorte de briller dans les négociations internationales et les rencontres aux grands enjeux, pour défendre les intérêts du pays. Pour ce faire, et outre l’expérience, ils doivent disposer de qualités intrinsèques pour défendre les intérêts suprêmes de la nation.
Dans un monde de plus en plus multipolaire, la Tunisie a tout intérêt à aller de l’avant plutôt que de persister à scruter le passé. Les partenariats avec les pays arabes représentent un des axes à optimiser. Sauf que, et de l’avis de nombreux spécialistes du monde arabe, certaines puissances mondiales ont autrefois fait en sorte de fragiliser l’appel à la coopération des pays de la région. Ces puissances craignaient, alors, une perte d’influence au Moyen-Orient. De plus, les pays arabes, pour des considérations souvent hégémoniques, ne s’entendaient pas entre eux non plus.
Aujourd’hui, alors que l’ère du colonialisme est révolue et que celle de la domination globale de l’Amérique est pour le moins mise à mal, nombreuses sont les voix qui s’élèvent, appelant au renforcement de la coopération multipartite des pays de la Ligue arabe. L’objectif étant de constituer un front solide et jeter les bases d’une véritable diplomatie économique.
Modestes rendements des diplomates
Abondant dans ce sens, l’universitaire et spécialiste du monde arabe, Noureddine Jabnoune, fait état d’une coopération arabe très faible, en raison de plusieurs obstacles qui sont aujourd’hui à surmonter. S’agissant du cas tunisien, il appelle les délégations diplomatiques établies dans les pays arabes à faire preuve de plus de dynamisme pour mieux servir les intérêts de la Tunisie. « Quand on sait que le déficit commercial de la Tunisie avec les pays arabes, hors région de l’Union du Maghreb arabe, a enregistré une hausse pour passer de -1.209 MD en 2020 à 2.137 MD en 2021. Avec à la clé l’’augmentation significative des importations de l’ordre de plus 57,9% portant essentiellement sur les produits pétroliers en provenance de l’Arabie saoudite, on ne peut qu’espérer plus », assure-t-il.
Selon lui, les indicateurs relevant de la coopération Tunisie-pays arabes sont au vert ces dernières années. Dès lors que les exportations ont progressé de 24,1% pour couvrir principalement l’Egypte avec +28,1%, l’Arabie saoudite avec +28,1% ainsi que les Emirats arabes unis avec +55%, l’espoir d’aller plus loin devient réalité à portée de main, fait-il observer.
Revenant sur la conférence des investisseurs de la Tunisie qui a eu lieu les 29 et 30 novembre 2022, « Tunisia 2020 », l’universitaire rappelle que plus de 14 millions de dollars sous forme de prêts, subventions et investissements ont été promis, sans parler des projets d’envergure annoncés. A ce détail près, les engagements n’ont pas été traduits en actes. Dans une telle situation, les délégations diplomatiques ne devraient se limier au rôle d’une simple représentation protocolaire du pays, au contraire une lourde charge leur incombe pour contribuer à sauver l’économie nationale.
« Le très modeste rendement des représentations diplomatiques à l’étranger nous fait rater les chances d’un meilleur positionnement stratégique. Même s’il faut reconnaître la faiblesse des moyens financiers dont disposent les ambassades et consulats tunisiens à travers le monde, il n’en est pas moins vrai que des erreurs de casting dans le corps diplomatique aient considérablement marqué la décennie écoulée. En payent aujourd’hui le lourd tribut, un pays et un peuple », se désole l’universitaire.
Pour un positionnement stratégique
À un moment donné, les Européens ont cru avoir tourné la page des guerres au sens propre du terme. Ils croyaient mener désormais d’autres guerres contre de nouveaux fléaux comme le terrorisme, les inégalités, les injustices, le dérèglement du monde et le réchauffement climatique. Sauf qu’une guerre, la vraie, a éclaté aux frontières de l’Europe, l’Ukraine partageant ses frontières avec 7 pays dont 4 européens. La planète entière en a été affectée, davantage les pays en voie de développement dont la Tunisie.
L’heure du grand réveil a sonné pour les diplomates tunisiens. Ils ont désormais la délicate mission de contribuer au développement économique national depuis les capitales de leur affectation. Ils devraient faire en sorte de briller dans les négociations internationales et les rencontres aux grands enjeux, pour défendre les intérêts du pays. Pour ce faire, outre l’expérience, ils doivent disposer de qualités intrinsèques. N’est pas diplomate qui veut.
Dans un monde de plus en plus régi par les fronts et les nouvelles coalitions, un monde où l’Asie de l’est, l’Asie du sud, l’Amérique Latine exercent de nouvelles influences géopolitiques et économiques, les pays arabes, unis, doivent, eux aussi, trouver leur propre voie vers le développement économique. Ils doivent garantir la sécurité énergétique et alimentaire, en ayant dans le viseur les lourdes menaces qui pèsent sur leurs populations, à l’instar du changement climatique et de la raréfaction des ressources.