Il fut question de demander ce qui s’est passé pour que la natation tunisienne et le sport tunisien perdent l’apport d’un aussi grand champion à la source.
Les JO de Paris se rapprochent à grands pas. Ils auront lieu du 26 juillet au 11 août 2024. Calculez le temps qui reste et mesurez le regret qu’éprouve tout Tunisien, sachant que nous avons tout simplement claqué au moins trois médailles d’or. Tout simplement parce qu’un champion olympique et du monde se promène dans la nature et personne ne sait ce qu’il fait. C’est tout à fait par hasard que nous l’avons vu. Comme monsieur Tout-le-monde, il mangeait un sandwich. Aller lui demander ce qu’il devenait était indélicat et il n’est pas dans nos habitudes de pleurer sur les ruines. Pourtant, nous ne sommes pas convaincus qu’Ayoub Hafnaoui représente des vestiges d’un champion.
Cet homme, ce champion, représente l’avenir de la natation de haute compétition, c’est-à-dire au moins deux autres olympiades. Rien que ça !
Il fut question de demander ce qui s’est passé pour que la natation tunisienne et le sport tunisien perdent l’apport d’un aussi grand champion à la source. Le bureau provisoire, qui gère cette discipline sportive depuis quelques mois, aurait été capable de nous fournir des éléments qui nous manquent. Il a le mérite d’avoir en son sein des hommes qui savent ce qu’ils font. L’un a eu à diriger le sport national, l’autre a accompagné les champions qui ont dominé la natation africaine et arabe, voire disputé les premières places sur les podiums internationaux, l’autre encore est l’un des meilleurs statisticiens de la place et parfaitement au courant de ce qui se passe et… se trame là où le sport perd son éthique et rejoint les agissements de caniveau qui, malheureusement, minent ce sport.
L’exemple de Oussama Mellouli
Et nous nous sommes ravisés. Pour une raison très simple. Inutile de remuer le couteau dans la plaie, alors que des enquêtes sont en cours. Par la faute de cet absentéisme effectif et moral, la natation tunisienne a énormément perdu. A tous points de vue.
Comment expliquer que l’on paie des milliers de dinars un entraîneur (le chiffre est vertigineux !), alors que la bourse de Ayoub Hafnaoui arrive en retard ou qu’on omet de discuter le choix de carrière de ce nageur qui nage dans le doute, patauge dans ses choix, se perd dans les labyrinthes de l’indécision ?
Pourquoi ceux qui sont censés s’occuper de l’élite n’ont pas compris que Hafnaoui ne voulait pas mener de pair une carrière d’athlète et une formation que dispensent les universités américaines, tel que l’a fait son prédécesseur Oussama Mellouli?
Pourquoi le Cnot, qui lui octroie une bourse, n’a pas approfondi l’étude de ce dossier et saisi les motivations de ce nageur ? Pourquoi son club n’a pas insisté et il a les moyens de le faire, pour qu’on écoute cet élément dont les motivations diffèrent de ceux qu’on lui prédestinait ?
Pourquoi enfin la fédération, première responsable directe du devenir de ce nageur, quels que soient les reproches ou les griefs qui ont coupé les ponts entre les deux parties, n’a pas pris résolument en main ce dossier ?
Il s’agit pourtant, hélas et malheureusement, d’un élément exceptionnel, qu’on ne risque pas de trouver à tous les coins de rue. Bien entendu, derrière ce jeune, il n’y avait pas cette force de persuasion qui se trouvait derrière Oussama Mellouli. Sa mère (de Mellouli), qui gérait sa carrière, défendait ses intérêts et savait forcer les portes. On lui a, à une certaine époque, reproché sa fougue. Mais les évènements lui donnent aujourd’hui raison. Si elle s’était tue, on n’aurait peut-être pas eu les résultats raflés par son grand champion de fils, qui a réussi sa carrière sportive et assuré un niveau de formation enviable. Derrière tout grand homme il y a une femme, dit-on, mais il y a aussi des hommes honnêtes, nationalistes, décidés et dévoués à la cause qui les font vivre. Mohamed Gammoudi en sait quelque chose. Derrière Oussama Mellouli, il y avait sa mère qui a déblayé devant lui cette «administrite» qui a tué bien des projets, annihilé bien des espoirs, faussé bien des calculs sportifs, économiques et autres. Ayoub Hafnaoui n’a pas eu cette chance et seul, il ne pouvait lutter contre ces vents contraires qui ont tout balayé. Maintenant que les dés sont jetés, que des luttes intestines internes ont ouvert la voie devant ses adversaires potentiels, qui se sont débarrassés de lui, va-t-on prendre en main ce cas et ce dossier ?
Les prochains JO auront lieu dans quatre ans. Tout juste pour se remettre au travail et préparer sérieusement ces Jeux en passant par le Mondial de natation, dont la 22e édition aura lieu en 2025 à Singapour.