Accueil Magazine La Presse 3e Edition de la foire « El Hadhka » de l’UNFT : Des artisanes en quête d’horizons…

3e Edition de la foire « El Hadhka » de l’UNFT : Des artisanes en quête d’horizons…

Il faut dire qu’à l’exception des artisans et des artisanes aisés, la majorité des actifs dans ce domaine ne disposent que de moyens restreints, faibles même pour mettre en place des unités de vente propres à eux. Aussi, optent-ils pour les foires et les expositions-ventes pour vendre leurs produits. Connaissant parfaitement ces contraintes, l’Union nationale de la femme tunisienne (Unft) a organisé, du 22 avril au 3 mai à son espace ouvert à Beb Bnet à Tunis, la troisième édition de son exposition féminine baptisée « El Hadhka ». Près d’une vingtaine d’artisanes, provenant de plusieurs régions et spécialisées dans maintes filières artisanales, y ont participé.
Les passants, fréquentant la rue Bab bnet pour des raisons majoritairement administratives et judiciaires, ont eu l’occasion de marquer une pause et d’admirer les différents stands de cette foire. Un échantillon représentatif des créations artisanales revisitées et des produits de terroir innovants constitue le point fort de cet événement.
Parmi les exposantes figure Saïda Zekri. Elle propose des bijoux de fantaisie standards et autres, inspirés du patrimoine qu’elle confectionne elle-même. Après avoir élevé ses enfants et que ces derniers ont pris leur envol, elle a choisi de se tourner vers son passe-temps favori. Elle a ainsi suivi une formation portant sur différentes filières de l’artisanat pour se concentrer, désormais, sur les bijoux de fantaisie. «C’est une spécialité qui me semble plus fine, plus glamour et surtout moins encombrante», indique-t-elle. Sur son étal, des parures, des colliers, des boucles d’oreilles, des bagues, des bracelets, des gourmettes et même des porte-clefs résument, en gros, ce domaine où elle excelle avec passion et patience. L’on y trouve des bijoux en perles, d’autres en cuivre et en cristaux colorés. Si certaines créations reprennent, quelque peu, les designs les plus classiques, dont les parures en perles et les colliers tressés ou à plusieurs rangées, d’autres relèvent plutôt des bijoux traditionnels auxquels elle a ajouté une touche de modernité. « El khomsa, el khella et el rayhana étaient considérées comme étant des accessoires strictement réservés à l’habit traditionnel à savoir el malya. Aujourd’hui, elles sont portées tous les jours même avec des tenues sport-chic », souligne-t-elle. Pour fidéliser sa clientèle, Saïda varie au mieux sa collection afin de répondre à tous les goûts. Elle a même pris soin de se munir de son matériel de travail et de la matière première dans l’optique de créer, dans l’immédiat, des bijoux sur commande. La collection de cette artisane est proposée à des prix abordables. Les parures sont à 35d ; les bagues à 10d. Pour les bracelets et les porte-clefs, ils coûtent entre 3 et 5d.

Les écharpes de Mahdia et de Chebba à l’honneur
Samia Jabeur s’est déplacée de Chebba pour participer à la foire. Ses créations relèvent du tissage traditionnel propre à la région de Mahdia. Des écharpes féminines prenant différents tons rouge, notamment le rouge brique, le rouge carmin, le fuchsia et l’orange, sont étalées au regard appréciateur des visiteuses férues d’habits traditionnels. «Ces écharpes, qui coûtent entre 40 et 80d, sont conçues à partir d’un tissu de demi-soie. Elles sont un accessoire parfait pour hisser la splendeur d’une robe de soirée moderne et sobre. D’ailleurs, j’ai garni ces écharpes par une touche spéciale, à savoir « nawaret el gandoura », une sorte de pompon en soie», dit-elle. Cette artisane propose, en outre, des cols en crochets qui pourraient être cousus sur des jebbas comme sur des tuniques ou des chemisiers. Elle propose la pièce à 60d. Mais pour elle, la création dont elle est la plus ravie n’est autre que la chéchia au féminin. De jolis couvre-chefs conçus pour les femmes ont été présentés à Nice, lors de l’organisation d’un salon international. «Nous aspirons à voir nos créations dépasser nos frontières pour être mises en valeur et commercialisées en Europe», signifie-t-elle enthousiaste.

Habit traditionnel : source d’inspiration illimitée
Autre artisane qui voue un intérêt particulier à l’habit traditionnel revisité : Asma Abidi recrée les produits de l’artisanat à sa manière afin qu’ils puissent s’agencer parfaitement à la vie moderne. Cela fait dix ans qu’elle s’investit dans la création artisanale, mariant ainsi son don de peintre à celui d’artisane. Parmi ses créations dont elle est si fière, la conversion de deux chéchias en un sac à main, voire en une pochette de soirée, brodée à souhait. D’autres pochettes rectangulaires sont aussi exposées, rehaussées qu’elles sont par des peintures faites à la main. Les couffins typiques de Nabeul ont, eux aussi, eu droit à une métamorphose artistique pour servir, désormais, de sacs à main très tendance car recouverts d’un tissu en jeans déchiré et du fameux foulard traditionnel «foulara». Pour ce qui est de l’habillement proprement dit, Asma propose des robes en chantoung auxquelles elle ajoute une ceinture qui n’est autre, en réalité, que le «kobbitch» de la chéchia. Des ponchos en hayek sont garnis au col d’une bordure singulière : « hzem el malya ». Par ailleurs, et pour gagner l’intérêt des jeunes clientes, Asma confectionne des jaquettes traditionnelles ou «farmla» en jeans, brodées au fil de soie et autres, ayant pour épaulettes des demi-chéchia ! Pour les prix, les pochettes en chéchia sont à 80d ; les couffins revisités entre 35 et 65d. Le prix des farmlas varie entre 45 et 75d. Les ponchos coûtent entre 50 et 65d. Pour ce qui est des tuniques en hayek peintes à la main, elles sont à 60 et à 65d. Quant aux robes soirée, elles sont à 90d.

Appel à l’encouragement !
«Il faut que les clientes comprennent qu’il s’agit de créations, c’est-à-dire de pièces uniques qu’on ne trouve nulle part ailleurs ! Ce sont aussi des tenues et des accessoires faits à la main. La création artisanale coûte cher aussi bien en raison de la cherté de la matière première mais aussi de l’effort que fournit l’artisan et sa capacité à innover et à se distinguer dans ce domaine», argumente-t-elle. Elle saisit, d’ailleurs, l’occasion pour appeler les parties concernées à multiplier ce genre d’événements afin d’épauler les artisans et de les aider à mieux se positionner sur le marché. «Il faut aussi prendre en considération les moyens parfois bien limités des artisans-créateurs. Louer un stand à mille dinars dans le cadre d’un salon qui s’étale sur dix jours ne me semble aucunement rentable ! D’ailleurs, pour ce qui est du salon de la création artisanale, tenu annuellement à l’espace des expositions du Kram, l’affluence durant les premiers jours reste timide. Les ventes risqueraient de ne pas couvrir les frais du stand», ajoute-t-elle. Asma montre du doigt l’injustice dont sont victimes les artisanes démunies, issues des régions défavorisées. «Elles sont souvent exploitées par des intrus pour fabriquer des produits d’artisanat contre des miettes. Et ce sont les intrus aisés qui en récoltent les fruits», souligne-t-elle, indignée.

Moringa : adjuvant bénéfique aux produits de terroir
Incorporer le moringa dans les différentes variétés de bsissa et cultiver cette plante, reconnue comme étant un véritable allié-santé en Tunisie, représente le pari de Samira Sghaïer. Issue de Sfax, cette artisane spécialisée dans la préparation des produits de terroir et dans l’extraction de l’huile essentielle du moringa en a fait son point de force. « Le moringa provient d’Inde et des pays de l’Afrique. J’ai tenu à le cultiver en Tunisie afin de tirer profit de ses bienfaits et de les mettre à la disposition de mes clients », indique-t-elle. Elle propose ainsi des bsissa au moringa à base de grains de lin à 8d les 500gr. Celle à base de blé coûte 7d. La bsissa au moringa à base d’orge est à 6d. De même pour le sorgho au moringa. « Nous proposons aussi de l’huile extraite du moringa ; une huile essentielle idéale pour la peau, vu qu’elle permet de lutter contre l’acné, les points noirs et contre les rides. Elle favorise aussi le traitement anti-psoriasis», ajoute-t-elle. Des petits flacons sont proposés à 25 et 35d. « Pour obtenir un litre d’huile du moringa, nous avons besoin d’utiliser dix kilos de cette plante, ce qui justifie son prix un peu salé », précise-t-elle.
A l’instar de la plupart des exposantes, Samira ne dispose d’aucune unité de vente. Elle saisit l’occasion pour participer aux foires et aux salons pour vendre ses produits. «Faute d’encouragement à même de nous aider à passer la vitesse supérieure et développer davantage notre activité, nous nous contentons des moyens du bord et des événements occasionnels pour gagner la confiance de nos clients. Les produits que je propose pourraient, pourtant, conquérir les marchés internationaux. Je me suis rendue à Paris et à Toulouse où j’ai présenté mes produits. Les Français sont très demandeurs des produits de terroir et autres bio. Il ne suffit parfois que d’un coup de pouce pour voir nos produits sur les marchés internationaux», souligne-t-elle, frustrée.
Autre participante spécialisée dans les produits bio : Amel el Hani a choisi de focaliser son activité sur les produits bio à caractère cosmétique.
Son stand regorge d’huiles essentielles, extraites de plantes autochtones dont la lavande, les fleurs d’oranger, la camomille et bien d’autres encore. Elle use aussi de ces trésors de la nature pour en fabriquer des savons bio. Outre les plantes, elle exploite les algues marines pour en créer des masques et des crèmes de soin. «J’ai même concocté un dentifrice naturel à base de moringa, d’œufs de seiche et de charbon alimentaire. Ce produit coûte 25d. Pour les masques à base d’algues, ils sont proposés à 20d. Les prix des huiles essentielles vont de 17 à 25d. Quant aux savons, ils sont à 5d», indique-t-elle.
Les exposantes aspirent à développer leurs potentiels et à élargir leurs petites entreprises, lesquelles demeurent minimes et se limitent parfois aux seules matières premières et au savoir-faire. Des projets instaurés, pour la plupart, à la maison ou dans un petit atelier qui méritent pourtant d’être promus afin de contribuer aussi bien à la visibilité des produits tunisiens qu’à l’emploi des jeunes et des femmes en particulier…

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