Les sujets de préoccupation pendant ce dernier mois de mai ? Étonnant peut-être, mais au regard des Tunisiens, pas tant les difficultés de l’économie, pas tant les victimes de la pandémie, quasiment banalisées celles-ci, « au profit » du drame de Gaza et d’un désormais réputé scandale de championnat.
Rien à redire, toujours, à propos des malheurs de la Palestine, de l’occupation israélienne et des crimes sionistes. Bientôt un siècle qu’ils perdurent et le rejet, la répulsion, l’horreur des peuples arabes restent les mêmes. Nos Etats ont faibli, trahi, choisi le déni, qu’importe. A une ou deux exceptions près nos peuples ne choisissent pas leurs Etats. La Tunisie fait un peu cas à part. L’Etat y est élu, mais il hésite parfois (souvent ?), généralement il se «rétracte» derrière un peuple qui ne concède jamais rien sur la question. Bourguiba prenait des initiatives, pointait Israël du doigt, exemple de Hammam-Echchatt, mais aussi bien Ben Ali que les Gouvernements de la révolution ont préféré s’en remettre à la constance de la rue. Pratiquement du même ordre ce qùe nous observons aujourd’hui. La contestation officielle garde prudence. On craint l’Amérique et l’Union européenne, soutiens inconditionnels d’Israël, au moment où on manque de vaccin et où l’on fonde tout espoir sur un prêt FMI. Les manifs redoublent en revanche. De citoyens et de partis politiques cette fois-ci. Le protocole sanitaire ne compte pas. Ne compte plus à l’heure où la contagion sévit. Où le corona tue. Priorité, fidélité, à la Palestine :la pandémie est comme relativisée, «romancée».
Un scandale de foot, oui, a agité l’opinion, opposé des publics, mobilisé des services d’ordre, alerté les médias. Aucune comparaison, bien sûr, avec le drame de Gaza. Mais le foot pèse lourd aux yeux des Tunisiens. On le constate depuis toujours mais on ne sait encore ni pourquoi ni comment. Le fait est que le résultat et le déroulement des compétitions ont souvent posé problème ici. Pire, suscité doutes, confronté des intérêts, provoqué compromissions et suspicions. L’affaire cette année est une dernière journée de championnat où plusieurs équipes étaient concernées par la relégation et où toutes les rencontres se sont conclues sur des scores douteux. L’accusation désigne un président de fédération et un «lobby de clubs complices». Et le risque est tel que le cas implique des millions de supporters, des régions entières et des clubs politiquement influents.
Pas tant l’économie, pas tant la pandémie, observe-t-on ci-haut. Il y a, sans doute, erreur sur les priorités. Notre attachement à la cause palestinienne nous honore, à coup sûr, et a certainement son utilité. Le football a aussi un grand rôle à jouer dans nos sociétés. Principalement d’éthique et de progrès. On y perd tout si on y laisse « mûrir » la corruption.
Reste le plus sage en toute crise de cet ordre. Favoriser ce qui urge pour le pays. Ne jamais confondre l’important et le plus important.