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Instauration de l’instance constitutionnelle des Droits de l’Homme : La rude épreuve

La mise en place des instances constitutionnelles connaît de très grandes difficultés et entraves, un constat qui s’explique notamment par les lenteurs au niveau de l’Assemblée des  représentants du peuple mais aussi par certaines lois inflexibles. C’est dans ce sens que l’organisation Democracy Reporting International a organisé, hier, une conférence pour exposer les contraintes marquant l’instauration des instances, dont notamment l’Instance constitutionnelle des droits de l’Homme.

Présent lors de cette rencontre, Naceur Channoufi, président de la commission électorale au sein de l’Assemblée des représentants du peuple, a reconnu que l’instauration de ces instances connaît bel et bien plusieurs difficultés  d’ordre technique, organisationnel et politique en raison de certaines partialités. Revenant notamment sur la mise en place de l’Instance constitutionnelle des droits de l’Homme, qui tarde toujours, il a fait savoir que sa « commission fait face à une loi peu flexible n’ouvrant pas la voie à des interprétations pour faire avancer l’opération de l’élection de ses membres ».  A cet effet, il a annoncé que l’élection des membres de l’instance se déroulera, probablement, lors de la prochaine année parlementaire.

«L’Instance des droits de l’Homme constitue la plus importante instance constitutionnelle au vu de la sensibilité du sujet des droits de l’Homme en Tunisie après l’ère de la dictature, son élection tarde toujours en raison de la complexité de la loi notamment en ce qui concerne l’élaboration de la liste des candidats retenus pour l’élection », a-t-il dit.

Pour l’élection de neuf membre, la commission électorale a reçu la candidature de 70 personnes et n’en a retenu que 25 d’entre elles, certains dossiers étant incomplets, ou ne répondant pas aux critères exigés. En effet, le Conseil de l’Instance devra être composé de neuf membres,  d’un juge administratif, d’un juge judiciaire, d’un avocat et d’un médecin et de 5 membres représentant les organisations de défense des Droits de l’Homme et des libertés. Et c’est notamment en rapport avec cette dernière catégorie, celle des représentants de la société civile, que la commission électorale de l’ARP a trouvé de grandes difficultés pour recevoir, organiser et retenir les candidatures valides, dans la mesure où d’innombrables associations s’activent dans le domaine des droits de l’Homme.

Channoufi a critiqué également les conditions de travail peu confortables au sein de l’ARP dans lesquelles travaille sa commission, faisant allusion à l’existence de tiraillements politiques qui nuisent à la mise en place des instances constitutionnelles comme cela été le cas avec la Cour constitutionnelle qui est un échec cuisant de l’ARP. Représentant Mohamed Fadhel Mahfoudh, ministre chargé des Relations avec les Instances constitutionnelles, la société civile et les droits de l’Homme, Amira Riahi a assuré que son département n’a épargné aucun effort pour promulguer les lois nécessaires à la mise en place des instances constitutionnelles. « A cet effet, un comité technique a été installé au sein de ce département pour appuyer le processus de l’instauration de ces instances et coordonner leur travail », a-t-elle expliqué.

Un processus entravé 

Des représentants de la société civile, des enseignants universitaires et des défenseurs des droits humains ont également pris part à cette conférence, ce qui a donné lieu à un grand débat portant notamment sur la lenteur des commissions de l’ARP et les entraves qui font face à la mise en place des instances constitutionnelles et notamment la Cour Constitutionnelle. Et même si la conférence était dédiée en majorité à l’Instance des droits de l’Homme, plusieurs intervenants ont alerté contre ce qu’ils ont appelé « le processus entravé » de la mise en place des différentes instances.  Des candidats, dont les candidatures ont été refusées, se sont également plaints auprès de la commission représentée par son président Naceur Channoufi.

Rappelons-le, le projet de loi organique relatif à la création de l’Instance des droits de l’Homme a été adopté en octobre 2018 à l’unanimité à l’Assemblée des représentants du peuple avec 144 voix pour, 0 contre et 0 abstention.

L’article 128 de la Constitution tunisienne fait ressortir que cette instance devra veiller au respect et à la promotion des libertés et des droits de l’Homme et devra faire des propositions dans le sens du développement du système des droits de l’Homme ».  « L’instance enquête sur les cas de violation des droits de l’Homme en vue de les régler ou de les soumettre aux autorités compétentes. L’instance se compose de personnalités indépendantes et neutres, qui exercent leurs fonctions pendant un seul mandat de six ans », peut-on lire également dans cet article. L’instance peut se saisir elle-même ou peut recevoir des plaintes notamment des personnes ayant été victime de violation des droits de l’Homme ou de toute personne ayant intérêt à agir.

Les candidats, dont la liste finale sera prête prochainement, devront obtenir la majorité des 2/3 en plénière à l’ARP, pour siéger au sein de l’instance. Les membres, une fois élus, bénéficieront de l’immunité durant l’exercice de leurs fonctions, qui  pourra être levée par l’Assemblée des représentants du peuple.

L’installation entravée des instances constitutionnelles est considérée comme étant l’un des principaux échecs du processus démocratique tunisien. Sur cinq instances, à savoir l’instance électorale, l’instance de l’information, l’Instance des droits de l’Homme, l’instance de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption et l’instance du développement durable et de la protection des droits des générations futures, seule l’Instance supérieure indépendante  pour les élections (Isie) a été mise en place.

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