A quoi est due cette absence? Nos politiciens et futurs députés sont-ils conscients de la nécessité de tels programmes dans la société ? Quelle place pour la culture dans nos politiques nationales ? A-t-on ignoré volontairement un tel aspect de la société ? Des questions qui restent malheureusement sans réponses, d’autant plus que la culture ne semble pas être, pour l’instant, une priorité pour nos politiciens et prochains députés

Après l’achèvement de deux campagnes électorales, l’électeur tunisien a constaté la carence, voire la rareté des programmes électoraux portant sur la culture. Si pour le poste de président de la République, la question culturelle ne s’avère pas être une priorité, pour les prétendants à l’Assemblée des représentants du peuple elle devait être au cœur de leurs préoccupations au vu de son importance, notamment dans la lutte contre les crimes, le terrorisme, la déscolarisation et la migration illicite.

Car en effet, comme le confirment plusieurs spécialistes en la matière, la culture à travers tous ses aspects se présente comme un moyen pour résoudre certains maux de la société. Bien que ce discours soit, pour certains, synonyme d’utopie et d’irréalisme, les activités et programmes culturels destinés notamment aux jeunes tunisiens ont fait leur preuve même au cœur des quartiers dits chauds. En dépit de ce fait, la culture a brillé par son absence, notamment lors de la campagne électorale pour les législatives qui s’achève aujourd’hui. A quoi est due cette absence, nos politiciens et futurs députés sont-ils conscients de la nécessité de tels programmes dans la société ? Quelle place pour la culture dans nos politiques nationales ? A-t-on ignoré volontairement un tel aspect de la société ? Des questions qui restent malheureusement sans réponses, d’autant plus que la culture ne semble pas être, pour l’instant, une priorité pour nos politiciens et prochains députés.

Ce constat inquiétant révèle, en fait, l’absence d’une prise de conscience politique vis-à-vis de l’importance des enjeux culturels et leurs contributions à résoudre certains phénomènes qui mettent en péril la société, comme notamment la délinquance et le crime. A la fin de cette campagne législative, on s’aperçoit qu’il n’y a quasiment pas de culture, ni de projets culturels ou même de promesses dans les programmes des listes en lice. Un fait qui a été confirmé récemment par l’agence TAP qui a passé au crible les programmes des différentes listes électorales et le résultat est décevant : aucune place pour la culture.

En dépit du nombre jugé important des listes qui sont en lice pour les élections législatives, en l’occurrence 1507 listes réparties sur 33 circonscriptions électorales, ce sont les programmes portant sur la sécurité, l’économie, la cherté de la vie et surtout à la politique qui enregistrent la plus forte présence. S’agit-il d’une réaction aux attentes de l’électeur tunisien qui place la sécurité et son niveau de vie à la tête de ses préoccupations ? La réponse est positive, car, en effet, nos politiciens, opportuns qu’ils sont, semblent avoir placé les préoccupations des Tunisiens à la tête de leurs programmes électoraux pour séduire le plus grand nombre d’électeurs, mais ont volontairement laissé à part toute question relative à la culture et aux activités culturelles. Un choix volontaire qui cache un pragmatisme politique, mais aussi un manque de vision claire en matière de culture et une incapacité à présenter un programme électoral complet, cohérent et diversifié pour élaborer toute une vision politique dans différents domaines de la société.

Pas une priorité

Du côté du syndicat général de la culture et de l’information, on explique ce constat par le fait que pour les politiciens et les différents candidats aux élections législatives, la culture ne s’avère pas être une priorité. Un membre de ce syndicat nous explique à cet effet que bien que la culture soit toujours présente dans le discours des politiciens qui la présentent comme une alternative à la délinquance et une solution au terrorisme et au crime, elle ne se traduit pas par des initiatives politiques ou législatives.

«C’est en fait une sorte de double langage, on dit ce qu’on ne fait pas. A chaque opération terroriste les politiciens occupent les plateaux télévisés pour souligner l’importance de la culture pour combattre ce fléau, et il s’avère, à la lumière de cette campagne électorale, qu’ils sont incapables de développer une vision qui porte sur cet aspect», explique-t-il.

Même son de cloche chez les professionnels de la scène culturelle qui explique cette carence, voire absence, par le fait que la culture ne figure pas sur la liste des priorités des hommes politiques et candidats des différentes listes électorales, alors que d’autres estiment qu’elle reflète bien l’état d’esprit des prochains parlementaires.

La culture comme enjeu politique

Pourtant, des artistes et des hommes de culture se sont présentés dans certaines listes candidates aux prochaines législatives. S’agit-il d’initiatives visant à servir les intérêts de ce champ culturel et résoudre ses problèmes ? L’activiste et homme de théâtre Habib Bel Hedi se dit méfiant tout en estimant que le secteur culturel a besoin d’une représentativité au sein du Parlement. D’après ce producteur, les professionnels de la scène culturelle ne possèdent pas un projet culturel national capable de les unir. Il propose, à cet égard, aux intéressés de remédier à cette défaillance, en élaborant un projet culturel national englobant tous les secteurs artistiques et de le défendre ensuite devant le Parlement.

Les acteurs culturels ont besoin du politique pour des raisons de financements, de stratégies nationales et d’encouragement, mais le politique a aussi besoin de la culture. C’est ainsi que doit être pensée la relation entre la culture et la politique, d’autant plus qu’en Tunisie, on constate l’absence d’une vision nationale en matière de culture. De ce fait, outre l’économie, la sécurité et les problèmes sociaux, la culture doit constituer un enjeu politique pour nos politiciens qui se présentent pour prendre les rênes des commandes du pays. Mais il faut dire que la culture serait victime de sa notion, polysémique et protéiforme qui ne se laisse pas saisir facilement. Pour certains, la culture renvoie simplement à l’art et aux activités artistiques, mais pour d’autres elle peut être considérée, au sens le plus large, comme tout ce qui est possible de transmettre, de partager et d’apprendre.

Sur ce volet, il faut reconnaître qu’en Tunisie les questions culturelles ne doivent plus exister que dans les discours des politiciens, mais doivent être traduites par de véritables politiques nationales, car le premier enjeu étant de chercher et trouver les mécanismes qui allient capacités culturelles créatives et cercles de financements économiques pour développer cet aspect de la société.

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