De Chokri Belaïd à Mohamed Brahmi, fondateurs respectivement du Mouvement des patriotes démocrates et du Courant populaire et assassinés tous les deux devant leur domicile, le premier le 06 février 2013 et le second le 25 juillet de la même année, en passant par l’ancien coordinateur du parti Nida Tounès, Lotfi Nagdh lynché en octobre 2012, c’est la spirale de la haine et du rejet des autres idéologies qui a vaincu et pris le dessus sur le dialogue et la tolérance dans une Tunisie post-révolution de plus en plus méconnaissable et larguée par ses propres politiques.
Aussi bien Belaïd, que Brahmi et Lotfi Naghdh n’ont pu échapper à l’anathème et à une condamnation à mort soutenue par un discours incendiaire émanant même de l’un des ministres de la Troïka en place sur les plateaux de la télévision alors que des démocrates subissaient des intimidations d’un temps révolu au vu et au su de tout le monde, jusqu’au moment où il y a eu ce tollé général qui a permis un retour à la sécurité et acculé la Troïka à lâcher du lest.
Six ans après et suite aux résultats des dernières élections, les vieux démons du passé refont surface sur fond de menaces proférées à l’encontre de deux femmes. Il s’agit de Mbarka Brahmi, veuve du martyr Mohamed Brahmi et d’Abir Moussi, présidente du Parti destourien libre (PDL). Les menaces d’assassinat sont prises au sérieux par les services sécuritaires et le dénommé Lassaâd Bouazizi, auteur du texte publié sur facebook, menaçant de mort Moussi, a déjà été arrêté suite à l’ouverture d’une enquête par le Pole judiciaire de lutte contre le terrorisme à El-Gorgani après consultation du ministère public.
A leur tour, les services du ministère de l’Intérieur qui ont recouvré la santé après le passage cacophonique et les déboires de la Troïka, ont pu déjouer un plan visant à assassiner la dirigeante du Courant populaire et veuve du martyr Mohamed Brahmi, Mbarka Aouaynia qui a déclaré à cette occasion qu’elle a été invitée par les unités de police à l’Ariana où elle habite puis par des unités spécialisées à El-Gorgani. Elle n’a pas manqué de demander une protection des services sécuritaires en raison de la gravité de l’affaire.
L’ancienne députée a expliqué que pour cette fois les unités sécuritaires ont pu déjouer à temps ce plan qui l’avait visée mais qui sait pour la prochaine fois, commente-t-elle, tout en regrettant la non-application de la loi d’une manière efficiente dans les dossiers des martyrs.
Avant l’assassinat de Belaïd et de Brahmi et le lynchage de Nagdh, un discours obscurantiste prônant la haine a gagné du terrain et des imams dans certaines mosquées se sont alliés avec les ténébreux salafistes jihadistes et leurs sbires. La fin, on la connaît, le pays a eu droit à trois assassinats politiques et des affaires qui sont toujours en cours devant la justice.
Les réactions de solidarité ne se sont pas fait attendre pour cette fois et la famille des démocrates centristes semble plus convaincue de l’utilité et l’importance d’une réaction urgente face à ce retour au spectre des assassinats politiques et aux menaces qui planent sur la liberté dans le pays suite notamment à l’agression des députés du PDL et sa présidente par des visiteurs à l’intérieur d’une institution souveraine qu’est l’ARP. A cet effet, les partis Qalb Tounès et Tahya Tounès ont appelé à l’ouverture d’une enquête sérieuse pour mettre toute la lumière sur cet acte d’agression et en révéler les circonstances.
Une première dans les annales de l’ARP mais aussi un dangereux et très grave précédent avec la bénédiction, à coup sûr, de parties bien connues de tout le monde.
Qalb Tounès a exprimé à cet effet son indignation et a dénoncé l’agression qui ne fait que porter préjudice aux pratiques démocratiques. On commence par l’intimidation, les menaces pour finir par les assassinats. Certains partis n’ont pas encore retenu la leçon et persévèrent dans la même politique.