L’hiver s’annonce chaud à Tazarka à cause du dossier de la pollution industrielle qui fait du surplace, depuis voilà près d’un an. Malgré les promesses fermes et les mesures demeurées presque toutes sans lendemain à ce jour. Malgré aussi les revers et le danger engendrés sur la qualité de l’air, de l’eau de mer et de la nappe phréatique. Et partant, sur la santé et la vie des citoyens de céans. Ceci sans oublier l’impact fâcheux sur les richesses halieutiques dans leurs périmètres maritimes. Ayant perdu patience, une foule immense a eu à se manifester au cours de ce mois à travers les principales artères de la ville, lançant des slogans exprimant leur désapprobation de la situation.
Tazarka a vécu, en ce début du mois de janvier, un samedi «chaud» malgré la température glaciale. Une foule dense et immense a eu à effectuer une marche à travers l’artère principale pour se masser au niveau du grand rond-point, situé sur l’axe routier Nabeul-Tazarka et bloquer la circulation routière dans les deux sens.
«Notre plage, une ligne rouge !»
Les manifestants, pris dans le tourbillon d’une colère noire, lançaient à gorge déployée, divers slogans dénonçant la dégradation de la situation environnementale dans la ville et son beau littoral dont tous les Tazarkiens sont jaloux. Parmi ces slogans, l’on cite : «Notre plage, une ligne rouge!», «Trêve de rejets toxiques dans la mer!». «L’on ne croit plus aux promesses officielles», «nous sommes prêts à tout pour préserver notre santé», etc. «La plage est à nous et à vous!».
L’arrivée du délégué de Korba territorialement compétent, d’une manière subite, n’a pas été tant s’en faut, pour arranger les choses et calmer les esprits.
Un pas mal calculé
Elle a plutôt mis le feu aux poudres et attisé la flamme et la colère des manifestants. Ce qui a obligé le délégué de se retirer des lieux. L’on doit à la vérité d’avouer que ce pas a été mal calculé. Idem pour la foule qui s’est montrée si agressive à travers les propos malveillants à l’adresse de l’officiel, qui n’a rien fait pour susciter un tel déchaînement.
Mille fois non à l’anarchie !
Ce qui est non moins reprochable à la foule, c’est d’avoir pris la répréhensible initiative d’arrêter la circulation routière pendant au moins une heure. Ce qui a altéré le caractère de la marche, voulue pacifique par ses organisateurs.
Au sujet du dernier point, l’un des manifestants nous déclare, rouge de colère comme un coquelicot : «en l’absence de solution, nous avons eu recours à cette alternative. Car nous avons longtemps attendu le remède d’une manière pacifique». Quant à la police, elle a su garder ses distances de la foule pour éviter toute escarmouche. Et s’est tenue prête à intervenir au moindre dérapage et acte de violence. Chose qui ne s’est heureusement pas produite.
De l’eau a coulé sous les ponts !
Cela dit, le dossier de la pollution à Tazarka et les rejets toxiques industriels dans le littoral de la cité, à travers la lagune de celle-ci, a fait l’objet de plus d’un article dans notre journal. Qui a suivi l’affaire de près depuis plus d’un an. Nous citerons essentiellement les intitulés suivants : «Tazarka lance un SOS !» (1er avril 2019), «Au secours de Tazarka !» (22 avril 2019), «Adieu les oiseaux d’eau!» (3 août 2019), «Halte aux rejets toxiques» (18 août 2019), etc.
Malgré les visites officielles et inopinées, effectuées sur les lieux par le ministre des Collectivités locales et de l’Environnement avec son équipe et malgré les multiples réunions organisées au triple niveau local, régional et central, le dossier environnemental de Tazarka a gardé le statut quo… Des promesses ! Rien que des promesses! qui n’ont pas empêché la plupart des industriels polluants à déverser leurs déchets toxiques dans la lagune ; bien que celle-ci soit internationalement classée Ramsar, relative à la protection des zones humides, propres à servir de zones d’habitat des oiseaux d’eau.
Il s’agit, comme on l’a précédemment précisé, d’un traité international cosigné par pas moins de 180 pays (issus de tous les continents), le 2 février 1971 à Ramsar. Ce traité vise à optimiser la conservation et l’exploitation durable de ce type de zone. Il cherche aussi à enrayer la dégradation ou la disparition de ces sites. Ceci, en reconnaissant leurs fonctions écologiques et leur valeur économique, culturelle et scientifique.
Re-prendre le taureau ar les cornes !
Le dossier écologique de Tazarka vient de provoquer la grande déception et le courroux de la population si chère au grand Mahmoud Messaadi. Ceci, en dépit des promesses demeurées sans lendemain… Des promesses de Gascon !
Cependant, il semble aujourd’hui que les autorités publiques à tous les niveaux sont décidées, cette fois-ci pour de bon, à prendre le taureau par les cornes, en mettant en œuvre les mesures coercitives réglementaires contre les industriels anarchiques et récalcitrants.
La peste ou le choléra
Car jusqu’ici l’on fait montre d’un grand déficit d’intransigeance. Envers les industriels contrevenants qui ont su jouer sur la corde «salvatrice». Le pouvoir s’est trouvé devant un dilemme kafkaïen ayant à choisir entre la peste et le choléra»…
Il semble aujourd’hui que les décideurs ont fait leur choix : la santé et la vie, une priorité à la fois incontestable et inégalable.
Et même au cas où la fermeté serait pratiquée sur le terrain de la réalité, elle aurait un impact d’une portée limitée.
Le temps de dissuader les intéressés désintéressés de la catastrophe écologique qu’ils pourraient provoquer à la cité, aussi bien sur la terre ferme que sur la mer superbe, où les richesses halieutiques pourraient aller à vau l’eau !
Entre de bonnes mains
Le dossier si brûlant est centralisé par le secrétaire général du gouvernorat de Nabeul M. Faïçal Jouini. Et pour cause, l’homme vient d’«atterrir» au gouvernorat, en provenance du ministère des Collectivités locales et de l’Environnement, dans le cadre d’un détachement.
Tous, le feu aux trousses !
L’entretien avec notre interlocuteur a commencé par nous apprendre qu’une importante réunion a eu lieu au siège du gouvernorat sous la présidence de M. Med Ridha Mlika, gouverneur de Nabeul. Ont participé à cette réunion, outre le Maire de Tazarka, les représentants des divers intervenants en la matière à savoir : l’Onas, l’Anpe, l’Apal, l’Association locale de l’environnement et aussi, tous les industriels polluants excepté un seul élément qui persiste et signe son refus de se plier à toute contrainte administrative.
Une position insensée qui va, nous dit-on, l’exposer hâtivement à la fermeture pure et simple de son entreprise pour remettre de l’ordre dans les lieux, préserver l’écosystème, la flore maritime ainsi que nos richesses halieutiques et, partant, la santé et la vie d’une population à court d’oxygène…
Une batterie de mesures urgentes
L’on apprend au dernier moment que les mesures prises au niveau régional viennent d’être consolidées et renforcées et leurs délais d’exécution avancés, pour rattraper le retard mis dans cette affaire. Et remettre les pendules à l’heure dans la situation environnementale. Voici donc les différentes mesures telles qu’actualisées par M. Mokhtar Hammami, ministre des Affaires locales et de l’Environnement.
– Le ministre des Collectivités locales et de l’Environnement a prévu d’adresser une mise en demeure à l’adresse des abattoirs de volailles les sommant de mettre en place leurs propres stations de prétraitement dans un délai ne dépassant pas le 15 février prochain. Une proposition de fermeture sera conjointement préconisée à leur encontre par le ministre de l’Industrie et la commune de Tazarka ou bien par le gouverneur de Nabeul.
– L’Onas s’engage à lancer un appel d’offres afférent à la mise en place d’un réseau spécifique, avec un point de prétraitement réservé aux 7 usines concernées.
– Le directeur des Affaires juridiques du ministère Collectivités locales et de l’Environnement est chargé d’effectuer le suivi des procès-verbaux dressés contre l’unique usine ayant refusé toute collaboration avec les autorités publiques en vue de la régularisation de sa situation. Ceci en prévision de la fermeture de cette unité industrielle.
– Une contribution financière de cent cinquante mille dinars devra être débloquée pour la réalisation de la connexion en question, sans attendre la cosignature de la convention y afférente par le reste des usines.
– Le démarrage des travaux de curage des cours d’eau par l’Agence de protection et d’aménagement du littoral (Apal), à partir du début de mars prochain.
– L’entame de l’élaboration d’une étude hydrogéologique sur la capacité d’accueil de la lagune de Tazarka, selon un spécialiste en matière d’écologie. Et, il appartient à l’Apal de suivre de près et au jour le jour ce sujet sous le contrôle direct du département ad hoc.
Il est à espérer que cette série de mesures d’urgence calmera les esprits des Tazarkiens qui ont, tout compte fait, toutes les raisons de s’inquiéter sur le sort, le présent et l’avenir de leur plage et de leur lagune ; ces précieux «cadeaux du ciel» dont ils sont si fiers et si jaloux. Ceci sans oublier que ces mesures ne manqueraient pas de mettre du baume au cœur des nombreux vacanciers longtemps fidèles à cette splendide cité avec ses eaux limpides et ondulantes, pour donner, chaque été, une ambiance de fête et de kermesse partagée avec les autochtones si réputés par leur amabilité, leur bonté et leur accueil chaleureux ancestraux.