Quelque chose comme les douze travaux d’Hercule est nécessaire afin de mettre de l’ordre dans ce formidable capharnaüm qu’est la Tunisie. Un pays fragile à tous les points de vue qui a reçu de plein fouet les effets catastrophiques du Covid-19 sur son système économique et de là sur l’ensemble de ses organes.
Nous avons rappelé, ici même il y a trois mois et juste avant l’instauration du confinement, que ce méchant petit virus peut faire beaucoup de victimes mais qu’il est surtout capable de tuer notre économie, déjà sous perfusion (Voir notre chronique du 17 mars 2020). Ce qui risque d’arriver.
Trois mois de confinement ont certes permis des économies d’énergie et de devises et la réaction au risque infectieux a permis à l’Etat de mettre un peu d’ordre dans le secteur sanitaire, mais les dégâts collatéraux économiques et sociaux se sont avérés énormes. Cela sans oublier le coup dur porté à notre système éducatif, de formation et d’enseignement supérieur.
Des milliers de familles qui vivaient dans la précarité sont devenues totalement démunies et cette réalité va se traduire par un surcroît de violence, de tension et de conflits. En effet, le pays est aujourd’hui en ébullition. Des mouvements sociaux et contestataires se multiplient et risquent de se généraliser tout en provoquant plus de violences et de dégâts.
En même temps, le tourisme et l’artisanat sont frappés de plein fouet par la crise, ce qui constitue d’abord un important manque à gagner à tous les niveaux, ensuite des charges supplémentaires pour les deniers publics. De plus, nos compatriotes vivant à l’étranger ne pourront plus cet été donner le coup de main habituel à notre économie.
Par ailleurs, et selon une enquête effectuée récemment par l’Agence de promotion de l’industrie et de l’innovation (Apia), 42% des entreprises interrogées ont vu leur chiffre d’affaires baisser de plus de 75% et 24%, une baisse entre 50 et 75%, à cause des mesures prises afin de contenir le danger viral, et 71% des entreprises interrogées prévoient une diminution des postes d’emploi.
Chiffres inquiétants lorsque l’on sait que ce sont les entreprises privées qui créent une bonne partie des richesses surtout que la production de ressources aussi importantes que les phosphates est prise en otage et que l’Etat traîne le lourd fardeau des entreprises publiques et que l’administration publique persiste dans son comportement dispendieux.
A cela il faudrait ajouter le lourd fardeau des dépenses sécuritaires, lutte contre le crime et le terrorisme oblige, et aussi pour protéger nos frontières surtout que notre voisin libyen s’embourbe chaque jour davantage dans la guerre civile qui pourrait dégénérer en un véritable chaos.
Aujourd’hui, alors que le danger de cette maudite pandémie nous guette encore, il nous faut à la fois lutter contre la propagation du virus et contre celle de la pauvreté et son corollaire, la violence et ses effets destructeurs, surtout lorsque l’on sait que le chômage va grimper jusqu’à 24%.
Appelé à gérer cette situation aussi difficile que délicate, le gouvernement est en train de multiplier les initiatives mais donne l’impression qu’il commence à être dépassé par les événements, idem du côté du Bardo. Le mercure social commence à grimper sérieusement et la productivité est en chute libre, surtout que la canicule débarque.
En plus de toutes les mesures de relance prises, dont certaines sont sévèrement critiquées, comme les prélèvements sur les salaires et l’arrêt du recrutement dans le secteur public, il est appelé à faire pression sur les prix, traquer la spéculation, soutenir les familles nécessiteuses et prendre plein d’autres décisions urgentes afin d’éviter le pire.
Il est aussi appelé à trouver des moyens sûrs et efficaces afin de réparer les dégâts occasionnés par la clôture de l’année scolaire de formation et universitaire en queue de poisson, comme nous l’avions indiqué dans notre précédente livraison. Il est inadmissible que des mesures de remise à niveau ne soient pas prises afin d’éviter l’inquiétante dégringolade du niveau de nos futures compétences.