«J’irai jusqu’au bout de mon rêve !»
Le concours «Olympiade du klim artistique keffois» a été clôturé, lundi dernier au Kef, par la remise des prix. Ce concours, auquel ont participé plus d’une vingtaine d’artisanes, chevronnées en matière de tissage traditionnel keffois et plus particulièrement dans la fabrication du klim artistique, a été l’occasion pour le public de découvrir les premiers klims, conçus selon une vision moderne et «in» tout en préservant leur caractéristique de produit artisanal authentique.
Chaïma Ben Ali a décroché le premier prix, d’une valeur de 1.200d. La somme, quoique assez encourageante, ne vaut probablement pas le sentiment de fierté que ressent cette jeune femme. En effet, sa passion pour le klim ne date pas d’hier. Elle a vu le jour et a grandi, bercée par le son des coups que donnait sa maman, Naïma Cherni, à la «seddeya». Tout au long de sa vie, Chaïma a appris à admirer la persévérance et la patientce qui animaient — et continuent jusqu’à nos jours de motiver — sa mère, qui s’adonne quasi instinctivement à ce métier ancestral.
En dépit de la fatigue que ce métier inflige à la maman et malgré le faible revenu qu’il lui garantissait, la fabrication du klim demeure telle une destinée amoureusement consentie. Le klim et la seddeya font partie inhérente à l’essence et au vécu de cette jeune femme. «A l’âge de six ou de sept ans, je me suis mise à interpeller ma mère sur ce métier qui accapare quasiment tout son temps. J’avais donc commencé à palper ce métier et à le maîtriser au fil des années tout en poursuivant mes études», indique-t-elle.
Le klim : son essence, son vécu et son avenir
En 2019, Chaïma obtint son master en management et performance industriels. Une fois le diplôme décroché, elle se penche, plus que jamais sur sa passion : le tissage du klim. En parallèle, et en tant que jeune, instruite et maîtrisant à merveille les Ntic, elle s’active pour dénicher de nouveaux designs qui feraient la distinction de sa production et de celle de sa maman. «Certes, j’ai reçu plusieurs offres d’emploi qui ne relèvent aucunement de mon domaine ; des offres qui auraient pu m’être utiles. Cependant, aucune offre ne m’a convaincue. Seul le klim me passionne et me donne des ailes…», avoue-t-elle. Et d’ajouter qu’elle s’interroge souvent sur la rentabilité de ce créneau, son devenir, surtout qu’elle n’est pas près, pour rien au monde, de s’en passer. Et pour preuve : elle s’applique à la tâche, non seulement pour aider sa mère et contribuer au budget familial mais aussi par amour pour ce métier. Sa spécialité l’a dotée d’un sens profond de méticulosité ; un atout pour une jeune artisane. «Lorsque je me mets à la seddeya, j’utilise mon stylo et une règle afin de parfaire les motifs et la finition de mon tissage. Je m’adonne journellement, poursuit-elle, à des recherches sur Internet pour m’inspirer de modèles et de designs nouveaux. Pour moi, le tissage du klim est plus qu’un métier : c’est une passion, un hobby».
Le goût de la concurrence…
La participation de Chaïma au concours de l’Olympiade du klim artistique keffois a été une occasion, aussi bien pour elle que pour sa maman, d’entamer une nouvelle expérience et de franchir un pas vers une meilleure visibilité. Deux artisanes, détenant des cartes professionnelles, la maman et sa fille, entrent ainsi dans une concurrence impitoyable. Chacune d’entre elles fait de son mieux pour gagner la compétition. « Certes, nous avons succombé au goût de la concurrence, ce qui était exceptionnel. Néanmoins, je lui dois mon savoir-faire, ma passion et mon statut d’artisane. C’est grâce à elle que j’ai appris ce métier et c’est grâce à elle aussi que j’ai décroché le premier prix à l’Olympiade », souligne-t-elle, reconnaissante.
Chaïma ne cache pas sa fierté d’avoir obtenu le premier prix. Pour elle, il s’agit d’un pas considérable qui pourrait lui ouvrir de grands horizons. Elle ambitionne, en effet, de se frayer un chemin parmi les grandes artisanes et créatrices dans le domaine du tissage du klim artistique keffois. Pour ce, rien ne l’arrêtera ! Chaïma compte, en effet, monter un projet et embaucher des jeunes pour donner un nouveau souffle à ce métier, à ce produit, dans la région, et ce, quitte à démarrer à zéro comme l’a fait sa maman. «J’espère que je bénéficierais d’un appui qui me permettrait de franchir beaucoup d’étapes dans ma carrière en peu de temps. Mais à défaut d’encouragements, je ne baisserai pas les bras et j’irai jusqu’au bout de mon rêve», conclut-elle, déterminée.
Il est à noter que le deuxième prix décerné a été d’une valeur de 800d. Le troisième est de l’ordre de 500d. Cinq autres lauréates, dont la maman de Chaîma, ont reçu, chacune, un prix d’encouragement de l’ordre de 200d.