On ne sait pas ce qu’il convient d’imaginer pour ceux qui se permettent encore et toujours de faire un mauvais usage des valeurs du travail. Des fonctions qu’ils assument et des missions dont ils assurent la responsabilité. A un certain moment, on avait espéré que les défaillances et les manquements pouvaient peut-être servir à l’émergence d’idées et contribuer au jaillissement du sens de la responsabilité et du devoir. Qu’ils permettent aux dirigeants de connaître réellement la réalité de la Tunisie et des Tunisiens. Mais en vain.
On peut longuement discourir sur l’état actuel de l’infrastructure en Tunisie. On évoquera comme d’habitude le manque de moyens et d’encadrement nécessaires. Il reste que tous les arguments évoqués pour justifier les manquements sont indéfendables, car les projets et les stratégies bien élaborés, charpentés autour de données et de réformes portées par de grandes idées, qui tardent encore à voir le jour, mais qui auraient dû nous épargner des images et des séquences devenues habituelles chaque année, notamment lors des fortes précipitations en automne.
Le modèle tunisien en politique liée à l’infrastructure impose toujours l’idée conservatrice selon laquelle l’évolution et les innovations se trouvent affectées par des considérations contre nature. Depuis longtemps, rares sont les responsables qui ont osé remettre les problèmes de l’infrastructure au centre des priorités et des débats.
Il faut dire que ce n’est point appartenir à une ère nouvelle que de rompre réellement avec les mauvais réflexes, les mauvaises habitudes. Le paradoxe est bien là: les carences se sont amplifiées au moment où l’on s’est passé des hommes et des femmes qui participaient, chacun à sa manière, à la construction de la Tunisie, à son histoire et à la qualité des services fournis.
Ce qui nous semble surtout inquiétant, c’est que la compétence et la culture de la performance perdent leur raison d’être et leur vocation. En un mot, leur plus important levier : le mérite.
Il ne s’agit nullement d’un concours de circonstances, encore moins de faits accidentels. Ce n’est pas la première fois que l’infrastructure lâche. Ce n’est pas la première fois non plus que les routes sont coupées, que les maisons sont remplies d’eaux pluviales, que les moyens de transport sont interrompus, que les voitures sont emportées par les eaux et qu’à travers autant de défaillances, le citoyen paye les frais en devenant la première victime.
D’une épreuve à l’autre, d’un cauchemar à l’autre, il s’est avéré que la clairvoyance et la perception se sont transformées en une soustraction dans le mode d’emploi des responsables de ces dernières années. Indiscutablement, ils n’ont jamais donné, et ne donnent pas toujours, l’impression de s’acquitter de leur tâche. Ce qui a été accompli jusque-là est loin de répondre aux aspirations. C’est toute une politique infrastructurelle qui a besoin aujourd’hui d’être réformée, des valeurs à restaurer, des pistes à creuser, des sillons à revisiter. Il s’agit d’une reconversion susceptible de remettre en état et dans l’urgence l’infrastructure de la capitale, mais aussi des autres villes du pays.
Nous ne sommes pas à un constat près: les plans stratégiques et les programmes élaborés sont, et demeurent encore, le point faible de tout le paysage urbain. L’ensemble des démarches à mener devrait faire l’objet d’interventions au niveau national afin d’identifier dans une programmation globale les actions liées à une infrastructure détériorée et à sa dimension sécuritaire. Il convient ainsi de questionner la politique nationale menée à ce niveau, tout en dépassant les slogans, voire le sens commun, pour mettre en évidence les impératifs dont la concrétisation ne peut plus attendre…