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Pourquoi a-t-on attendu si longtemps ?

Editorial La Presse

La campagne anti-spéculation ordonnée par le Président de la République a démarré en grande pompe. Si les choses sont cependant loin d’être aussi simples et que beaucoup de travail reste encore à faire, l’on se demande pourquoi a-t-on attendu tout ce temps pour attaquer des barons de la spéculation notoires et pratiquement connus des services de contrôle et des agents de l’ordre ?     

Depuis 2011, faire face aux péculateurs relevait d’une sorte de miracle au quotidien. Le sens exacerbé des fraudeurs a fait que le mal a atteint les racines. Le nombre de pratiques spéculatives a explosé. Il a touché essentiellement les produits de base subventionnés. Les spéculateurs imposaient leur loi. Le renversement des rôles et des pouvoirs n’est pas resté sans conséquences. La nouvelle donne a eu en effet un impact négatif sur les matières premières dont les prix ne cessaient d’augmenter. Ce qui s’est passé pendant plus d’une décennie  est l’exemple type flagrant des dérives les plus nocives pour l’économie du pays et pour ses fondements, mais surtout pour le pouvoir d’achat des Tunisiens. Ce qui se faisait et ce qui était aussi toléré dans les circuits de distribution est devenu une menace avérée. Cela participait même au développement d’un véritable malaise, affamait les Tunisiens et portait atteinte à la paix sociale.

Si on concède que l’usage a perduré plus qu’il n’en fallait et que les circuits de distribution auraient dû être mieux épargnés, mieux gérés et surtout mieux contrôlés, l’on regrette tout ce temps perdu et gâché, sur fond de défaillances et de manquements caractérisés. Essentiellement dans tout ce qui a rapport à l’absence de vigilance, aux réactions les plus inconséquentes et au renoncement des différentes parties prenantes. Des insuffisances surmultipliées, il est vrai, par le milieu ambiant qui a transformé toute activité économique en un moyen de spéculation et de monopole des matières premières, tout en favorisant l’émergence de méthodes controversées et illicites.

Des descentes dans les moulins, les entrepôts déclarés et anarchiques, ainsi que le contrôle des moyens de transport de marchandises, ont confirmé l’ampleur du mal. Des tonnes de produits alimentaires ont été saisies. Semoule, farine, pâtes, riz et différents produits subventionnés, comme le sucre, étaient illégalement dissimulés dans des entrepôts à travers tout le territoire, ou encore on essayait d’exporter illicitement par les canaux terrestres et non officiels vers les pays voisins. 

Les circuits de distribution seraient ainsi installés sur une montagne de dérives. Mais le plus contraignant dans ces agissements, c’est qu’ils portent dans certains cas l’empreinte d’acteurs politiques qui ont usé et abusé des dérapages et des excès en tous genres ; et qui incarnent le syndrome de la corruption, comme cela éclate au grand jour.

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