«Je pense que les professionnels du secteur ont pu réaliser quelques performances intéressantes cet été, voire au cours de l’arrière-saison. Il ne faut pas oublier qu’il y a eu aussi pas mal d’événements marquants qui ont fait bouger les choses au-delà de juillet et août, comme la Ticad ou le Sommet de la Francophonie…»
Comment se porte aujourd’hui le secteur du tourisme en Tunisie ?
Le tourisme va mal, comme tous les autres secteurs, dans notre pays. Mais ce secteur doit être notre cheval de bataille, ce n’est pas un choix. Quand le tourisme va, tout va. Quand vous avez un marché limité qualitativement et quantitativement, il n’y a que le tourisme qui peut booster d’autres secteurs transversaux, tels que le transport aérien, l’agriculture, le bâtiment, le commerce, l’artisanat…
Quel bilan faites-vous, jusqu’à présent, de la saison estivale 2022? Qu’en est-il du tourisme interne?
Je pense que les professionnels du secteur ont pu réaliser quelques performances intéressantes cet été, voire au cours de l’arrière-saison.Il ne faut pas oublier qu’il y a eu aussi pas mal d’événements marquants qui ont fait bouger les choses au-delà de juillet et août, comme la Ticad ou le Sommet de la francophonie… Le bon déroulement de ces événements sans incidents et la satisfaction de nos hôtes vont certainement nous drainer d’autres événements dans le futur.
Par ailleurs, c’était l’occasion pour nous de tirer les bonnes leçons et connaître nos limites, à Djerba par exemple, l’émergence d’hôtels cinq étoiles standards internationaux est plus que jamais nécessaire. Il nous faut de grandes enseignes étrangères, un gros centre de congrès et une bonne connectivité aérienne avec Tunis et l’Europe. Le Futur Mariott, en cours de construction avec ses 480 chambres, est une excellente nouvelle pour Djerba.
Qu’en est-il des grands défis qui se dressent devant le tourisme national pour rivaliser avec les grandes destinations dans le monde?
Grâce au métier que je fais, je suis amené à faire des déplacements fréquents à l’étranger, j’arrive donc à comparer et voir de plus près les pays qui performent et les pays en déclin. Dans ces pays, nous n’avons vraiment rien à envier. Beaucoup d’entre eux rêvent d’avoir notre position géographique, notre climat, notre patrimoine, car ils savent qu’ils feront un miracle ! Nous, on a juste le souci de drainer le plus grand nombre de clients, sachant que nous enregistrons la dépense moyenne par client parmi les moins élevées, par rapport à d’autres pays comme le Maroc, l’Egypte, la Turquie…Alors pour rivaliser avec les grandes destinations, il faut d’abord se poser la question : est-ce qu’on peut, et on veut faire comme eux ? Nous, en tant que professionnels, nous devons comprendre qu’il ne faut plus rien attendre de l’Etat. La seule chose que nous devons obtenir ce dernier, est le découpage de la carte touristique. Il est impératif d’avoir une visibilité totale sur ce qu’on veut faire au cours des 20 prochaines années sur notre sol ! Lors de mes déplacements, je rencontre des fois des hommes d’affaires qui veulent investir dans notre pays, mais impossible de leur dire où construire et comment. Un bijou comme l’île de Djerba évolue depuis plus de 30 ans sans avoir un plan directeur d’urbanisme.
En l’absence d’un plan directeur d’urbanisme et un vrai balisage des zones touristiques et para-touristiques futures, nous allons continuer à massacrer nos côtes, notre Sahara et nos forêts. La nature a horreur du vide, le citoyen, pour survivre, est en train d’exploiter arbitrairement nos richesses. Allez voir nos côtes à Ghar Elmelh, Sounine, Rafraf, Ksar Ghilane, Chott Zouaraa…, c’est un vrai carnage !
Quelles sont les nouvelles demandes et tendances des voyageurs au lendemain de la crise sanitaire ?
Après les deux années d’immobilité liée au Covid-19, 2022 a marqué le retour en force du tourisme.
Avec les nouvelles technologies émergentes, voyager est devenu de plus en plus simple. Parallèlement, la crise sanitaire a laissé quelques traces sur les comportements du consommateur, obligeant le secteur à se réinventer constamment. Cela entraîne l’apparition de nouvelles façons de partir en vacances, de faire des découvertes étonnantes et de parcourir le monde. On parle du slow tourisme par exemple, où on adopte pleinement le credo du “less is more”, en visitant peut-être beaucoup moins, mais indiscutablement beaucoup mieux. On n’essaie pas de rayer tous les sites touristiques de sa liste à la vitesse de l’éclair, mais on profite à fond de l’instant présent ! Le slow tourisme, c’est aussi un art de vivre…