Où en est la Tunisie face aux perturbations causées par la guerre en Ukraine ? Que font les autorités pour se mettre à l’abri d’une crise mondiale étouffante, alors que l’économie nationale est déjà paralysée depuis plusieurs années ? Les réformes engagées en coordination avec le Fonds monétaire international (FMI) peuvent-elles sauver le pays ?
Si la conjoncture internationale est marquée par une nette baisse des taux de croissance dans les différentes régions du monde, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord sont les plus impactés. Les données de la Banque mondiale estiment que la croissance dans cette zone devrait marquer le pas à 3,5 % en 2023 et 2,7 % en 2024.
Ces dernières années, la croissance économique mondiale a été sauvée par les dynamiques créées par les économies émergentes. Chine, Brésil, Inde et autres ont pu, en effet, apporter un nouveau souffle à une économie mondiale en difficulté. Selon les estimations des experts, l’écart de croissance entre les pays émergents et les économies avancées s’est réduit en 2021 et 2022, ce qui est inférieur aux normes historiques. Si les récentes crises mondiales comme celles du coronavirus ou du conflit russo-ukrainien ont freiné la croissance de ces pays, les économies de ces derniers sont synonymes de dynamisme économique, d’opportunités et de croissance.
Cependant, il faut dire que, selon les dernières Perspectives économiques mondiales publiées par la Banque mondiale, la croissance mondiale marque fortement le pas sous l’effet de l’inflation, de la hausse des taux d’intérêt, de la diminution des investissements et des perturbations causées par la guerre en Ukraine.
La croissance de l’économie mondiale devrait s’établir à 1,7 % en 2023, puis à 2,7% en 2024. On anticipe un ralentissement marqué et généralisé, les prévisions étant revues à la baisse pour 95 % des économies avancées et près de 70 % des économies de marché émergentes et en développement.
Si la conjoncture internationale est marquée par une nette baisse des taux de croissance dans les différentes régions du monde, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord sont les plus impactés. Les données de la Banque mondiale estiment que la croissance dans cette zone devrait marquer le pas à 3,5 % en 2023 et 2,7 % en 2024.
Mais où en est la Tunisie dans tout ça ? Que font les autorités pour se maintenir à l’abri d’une crise mondiale étouffante, alors que l’économie nationale est déjà paralysée depuis plusieurs années ? Les réformes engagées en coordination avec le Fonds monétaire international (FMI) peuvent-elles sauver le pays ?
L’économie nationale est malade. Croissance en berne, production paralysée, consommation de plus en plus faible et autres, le pays n’est pas à l’abri d’un défaut de paiement comme le confirment les différentes agences de notation.
Mais ce qui nuit considérablement à l’économie ne sont autres que la baisse des investissements et l’aggravation de l’endettement public. Le taux d’endettement de la Tunisie s’est élevé à 78,5% du PIB, atteignant 109,620 milliards de dinars en 2022.
Cet endettement se répartit entre des dettes intérieures estimées à 43,155 milliards de dinars et les dettes extérieures évaluées à 66,6 milliards de dinars. La coopération multilatérale constitue 60,2% du volume des dettes extérieures, alors que le marché financier détient 22,1% et la coopération bilatérale près de 17,7%.
Le volume des dettes extérieures de la Tunisie en euros est estimé à 58,6%, contre 25% en dollars et 9% en yen et 7,4% pour d’autres devises. Le service de la dette a augmenté à 10,250 milliards de dinars.
Que faut-il faire ?
Les investissements étrangers sont également en chute. Il suffit de rappeler que les investissements de partenariat déclarés en 2022 ont baissé de 54.8% par rapport à l’année précédente pour se situer à 174,5 millions de dinars (MD). Les intentions des investissements industriels à 100% étrangers et en partenariat sont passées de 969.1 MD durant l’année 2021 à 869.4 MD durant la même période de l’année 2022, enregistrant ainsi une baisse de 10.3%, selon les chiffres de l’Agence de promotion de l’industrie (API).
La bureaucratie ambiante et la lourdeur des procédures administratives sont, certes, les principaux freins à l’investissement en Tunisie. Mais pas que, tout le climat social et politique peut expliquer ce triste constat.
Par où commencer ? Que faut-il faire ? Au fait, pour les économistes, les difficultés de l’économie tunisienne ne sont pas conjoncturelles mais plutôt structurelles. L’accord sur un programme avec le FMI apparaît plus que jamais comme la seule issue mais les obstacles qui se dressent d’ici à sa signature sont multiples.
Cet accord vient en réponse à l’engagement de la Tunisie à opérer une série de réformes économiques et financières.
Subvention, dépenses publiques, code de change, entreprises publiques, masse salariale, mais aussi un ensemble d’indicateurs macroéconomiques sont concernés. Ce programme se fixe cinq objectifs, à savoir rétablir la confiance et stimuler l’investissement privé, soutenir l’activité économique, assurer l’efficacité de l’administration et des entreprises publiques, renforcer le développement social et enfin promouvoir une économie résiliente.
Cependant, le pouvoir d’achat est une pierre d’achoppement majeure de la mise en œuvre de ces réformes.
Dans ce contexte, l’inflation pourrait être l’étincelle qui précipiterait une nouvelle crise sociale. Ces réformes doivent donc tenir compte de cette spirale inflationniste dans laquelle semble coincé le pays.
Dans ce contexte délicat et incertain, un programme avec le FMI devrait fournir un ancrage au programme de réformes du gouvernement, constitué de mesures de court-terme et de chantiers de plus longue haleine. Mais la Tunisie n’est pas à l’abri d’une crise mondiale alors que son économie est déjà souffrante.