Accueil A la une Corruption et vol dans les administrations : Médicaments et fil de cuivre, rien n’y échappe

Corruption et vol dans les administrations : Médicaments et fil de cuivre, rien n’y échappe

 

«Parfois, on se retrouve face à une pénurie de gants ou même de masques. Les vols se poursuivent et  cela se fait au détriment des droits des patients et de nos droits d’exercer dans des conditions normales», déplore  un jeune médecin.

Hôpitaux, transport, régie des tabacs, délégations régionales à l’agriculture et bien d’autres, tous les secteurs sont exposés à ce que certains appellent la petite corruption ou les petits vols. Quelques médicaments, du fil de cuivre, des produits alimentaires et même des pièces de rechange, rien n’échappe à ces actes malveillants dont le coût s’avère considérable pour l’Etat et les contribuables.

Ce que certains appellent la petite corruption fait référence à cet argent subtilisé sous prétexte d’opérations bureaucratiques, nuit considérablement aux finances publiques et au bon fonctionnement des établissements. Ceci pour les petites sommes. Mais encore, il ne se passe pas une semaine sans que l’on entende parler de vols conséquents, de détournement de fonds et de  fonctionnaires arrêtés ou encore ceux qui courent toujours après avoir vidé la caisse.

D’ailleurs, juste à l’issue des événements du 25 juillet, une opération mains propres a été lancée, notamment dans le secteur public, et les résultats sont surprenants. Des dizaines de fonctionnaires sont arrêtés après avoir profité de systèmes de contrôle défaillant et fait main basse sur ce qui ne leur appartient pas.

La poste, les banques, les administrations, rien  n’échappe à ces voleurs de la fonction publique. Le secteur de la santé, notamment les hôpitaux, sont lourdement pénalisés. Les pharmacies publiques aussi. Là où tous les médicaments sont stockés, ainsi que les produits et équipements médicaux.

Dans deux établissements hospitaliers — l’un à Sousse, l’autre à Tunis — deux médecins internes ont accepté de témoigner pour notre journal. Ils évoquent des cas de vols fréquents dans différents services, et surtout dans les officines. Selon  eux, ces pratiques, même si elles sont dénoncées par la direction, ne s’arrêtent pas pour autant et nuisent considérablement au système hospitalier et à la qualité des soins présentés. «Parfois, on se retrouve face à une pénurie de gants ou même de masques, les vols se poursuivent et  cela se fait au détriment des droits des patients et de nos droits d’exercer dans des conditions normales», déplore un jeune médecin.

Le cuivre, un métal recherché !

Selon des sources syndicales, le vol d’équipements et d’accessoires et de médicaments est une question difficile à résoudre dans les structures hospitalières publiques. Des trafics de médicaments ont été signalés par le passé dans des hôpitaux publics et des enquêtes ont été instruites pour confondre les auteurs, sans grand succès et sans pour autant stopper le fléau. C’est pourquoi la généralisation des caméras de surveillance à tous les services et la numérisation des hôpitaux deviennent une urgence.

La Tunisie s’est engagée depuis 2018 à la numérisation des hôpitaux. Sauf que le projet piétine. Et jusque-là, rien n’a été fait, mises à part quelques structures du Grand Tunis.

 Les vols ne concernent pas uniquement les unités hospitalières. Différentes structures publiques, dont notamment Tunisie Telecom, la Steg et des compagnies de transport, souffrent du vol essentiellement du cuivre, un métal cher et particulièrement recherché. Un seul kilogramme de cuivre s’échange contre des centaines de dinars au marché noir. Ces matières volées sont également reprises par les réseaux de contrebande et même exportées par voie terrestre vers les pays voisins, donnant lieu à un marché lucratif.

A l’échelle internationale, le prix du cuivre s’est envolé. De 5.300 euros la tonne en 2016, on est passé à plus de 8.000 euros en 2023. Cette explosion des prix attire les voleurs, le plus souvent des gangs organisés. Pour revendre le cuivre, les ferrailleurs rachètent les câbles sans se poser trop de questions ni vérifier leur provenance.

La CPG, un nid de corruption ?

Les tentacules de la corruption touchent pratiquement toutes les grandes compagnies nationales. Outre Tunisair, dont l’image est entachée par les opérations de vol de bagages des voyageurs, et même les pièces de rechange des avions, la  Compagnie des phosphates de Gafsa est connue pour être un nid de corruption. Il faut rappeler qu’un ancien président-directeur général de la CPG et huit autres responsables croupissent actuellement en prison pour vol d’équipements et détournement de fonds. Un autre groupe de fonctionnaires de la même compagnie avait été également écroué pour vol de bons d’essence et de tickets restaurant.

Face à cette sitution qui nuit considérablement à l’économie nationale, il est indispensable d’adopter des mesures drastiques. L’installation de caméras et la digitalisation des adminsiations pourraient également avoir un effet dissuasif.  De même, il est utile, voire urgent, d’instaurer des mécanismes de protection pour les lanceurs d’alerte.  Enfin, pour donner l’exemple, les peines doivent être lourdes, sévères contre les voleurs et les corrompus. Encore faut-il les attraper !

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Un commentaire

  1. Al Marshall

    28 juillet 2023 à 10:02

    Merci pour cet article révélateur et très bien écrit. La pertinence du sujet et détail sont d’actualité dans beaucoup de pays notamment l’UE.

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