Ce qui s’est passé tout au long des dix dernières années a accrédité l’image de responsables défaillants, incontrôlables, quelque part aussi ingouvernables. Des responsables qui ont abaissé la vocation de mandataire par des actes et des décisions dont la Tunisie risque de ne pas se relever de sitôt. La consécration des principes de transparence et de bonne gouvernance, essentiellement dans la gestion des finances publiques, et la lutte contre la corruption qui s’y rattache, n’avaient ni de sens, ni de raison d’être. Durant une décennie, la Tunisie avançait tout simplement dans le sens contraire de la bonne gouvernance.
Quelles que soient les réformes à prendre en considération, quelle que soit la nature des solutions proposées, quelles que soient les décisions qui en découlent et, par conséquent, les changements à entreprendre, l’on ne doit pas oublier que l’action politique n’est pas une activité comme les autres. Si elle reste capable du meilleur comme du pire, elle implique, et elle impliquera encore et toujours des valeurs, des vertus, une culture.
Elle a, entre autre, pour vocation de prévenir et de combattre la corruption sous toutes ses formes et de réfuter l’impunité. Après tant de dépassements et d’irrégularités, la Tunisie a aujourd’hui le droit d’aspirer à un environnement et une classe politique qui ne soient pas inspirés de malversations et de dérèglements. Le salut passe par la confirmation des prérogatives des instances statuaires et du renforcement de leurs compétences juridiques, à l’instar notamment de l’Inlucc, dont les activités sont actuellement suspendues, et la Cour des comptes. Des institutions qui devraient non seulement être saisies des dépassements en tous genres, mais qui n’auront d’autre alternative que d’agir en conséquence. Des instances qui appliquent la loi. Qui régulent la vocation et la marge de manœuvre des différentes parties prenantes. Le modèle actuel est dépassé. Pendant de longues années, la mise en application des propositions et recommandations contenues dans les différents rapports publiés par la Cour des comptes était complètement ignorée, pour ne pas dire interdite. Il est évident que tout cela va largement au-delà des débats ordinaires et sans suite, des décisions, la plupart du temps conditionnées, et des interprétations que l’on se fait sur la forme et le fond des dossiers de corruption et de malversation.
Que seront les prochains jours de la Tunisie au lendemain des dispositions exceptionnelles du 25 juillet et qui ont constitué un formidable levain d’espoir et d’optimisme ? Il y a inconditionnellement un lien de cœur entre les Tunisiens et leur Président. Notamment à travers tout ce qu’ils attendent de lui. Un lien qui pousse même les plus pessimistes à croire en quelque chose. Les manifestations de soutien qu’ils lui ont réservées dimanche dernier montrent à quel point ils ont confiance à ce qu’il ne cesse de promettre et à tout ce qui devrait être accompli. L’espoir est permis, mais encore faut-il avoir conscience des exigences actuelles auxquelles font face la Tunisie et le Tunisien. Il est vrai que le décollage tarde encore.
Finalement, tout ce que l’on peut dire est que nous n’avons plus besoin des hommes parachutés, qui n’ont pas le profil requis et que la scène politique, telle qu’elle a été conçue et gérée, a fait naître. Des hommes qui n’auraient jamais dû être là où ils sont aujourd’hui…