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Le mea culpa de Ghannouchi

L’ambiguïté frappe et les rôles s’inversent. Quand la fascination est révolue, le sentiment de culpabilité devient un jeu de pouvoir. Entre passé et présent. Sur la sellette après une décennie noire et accablante, précédée d’un retour triomphal au pays, Rached Ghannouchi fait un mea culpa inédit et sans précédent. « Je me demande comment avons-nous fait pour élire cet homme ? (Il parle de Kaïs Saïed). Je ne peux dire qu’une chose : que Dieu nous le pardonne ».          

Dans une déclaration aux termes soigneusement pesés, il reconnaît que la perception d’Ennahdha et de ses alliés aurait dû être tout autre. Il présente ses excuses tout en demeurant incapable de dire la vérité et sans vraiment convaincre. Surtout lorsqu’il évoque Nabil Karoui qui « au moins dirigeait une entreprise prospère, alors que celui-là, (encore Saïed), sa première expérience était de diriger un Etat ». Le sentiment de culpabilité devient encore plus fort lorsqu’il reconnaît « qu’il (toujours Saïed) nous a menés en bateau avec ses propos. Nous aurions dû vérifier et enquêter avant de le soutenir ».

Difficile de ne pas réagir devant un spectacle de mauvais goût et dans lequel le mensonge domine et semble n’obéir qu’à ses propres règles. Surtout lorsque le temps commence à paraître dur. Dur, mais surtout contraignant. Confrontés à une série de révélations, les accusations se resserrent contre Ghannouchi et contre son parti. Outre les révélations du Collectif de défense de Belaïd et de Brahmi, il se trouve aussi fragilisé par l’incapacité de justifier l’origine de sa fortune. Bien entendu, le sort du mouvement islamiste est en quelque sorte scellé dans des conditions bien particulières. Mais cela ne tenait qu’à peu de chose. Sans faire de mauvais jeu de mots, rien n’est aujourd’hui clair pour Ennahdha, rien n’est rassurant. Encore moins transparent. Et ne parlons plus surtout des promesses au peuple qui ont volé en éclats et des discours meublés de langue de bois.

Même au sein de son parti, Ghannouchi ne semble plus être à l’abri des réactions de défiance. Pareille alternative n’est plus désormais taboue. Des membres nahdhaouis, qui estiment que la position du Cheikh n’est plus tenable, n’hésitent plus à exprimer leur ras-le bol. Ils s’interrogent sur l’avenir du parti. Le président aura-t-il le courage de quitter la scène politique ?

Ils sont convaincus que nul ne peut s’approprier le monopole du parti et donnent de plus en plu la preuve qu’ils n’acceptent pas que certains continuent à jouer les indispensables.  En même temps, ils appellent à clarifier les positions, convaincus qu’ils sont de l’impératif de faire le procès de tout un système et une politique qui ne sont plus adaptés aux exigences actuelles, et pas celui des personnes.

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Un commentaire

  1. KHEMIRI

    20 février 2022 à 20:46

    J’ai lu avec intérêt votre article même si vous ne reconnaissez pas que Kaïs Saied n’aurait jamais été élu s’il n’avait pas été soutenu par Ennahdha. Un président élu par défaut sans stature politique, resté « spectateur », se contenant de superviser les ministères régaliens notamment les A.E. pour se réveiller par miracle le 25 juillet….dédaignant la célébration de la République instaurée par Bourguiba pour qui il n’avait aucune considération. Cela fait plus de six mois que le pays vit en léthargie économique, financière et sociale. Trouvez-vous cela normal ?

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