
Baisse considérable des échanges commerciaux, interruption des liaisons aériennes et terrestres et lourdes répercussions économiques, la Tunisie et la Libye ont subi de plein fouet les conséquences de la crise sanitaire. Connus comme étant un poumon de l’économie tunisienne, les échanges commerciaux avec la Libye ont été, en effet, lourdement impactés par la crise du coronavirus. On évoque surtout les produits alimentaires et l’exportation des fruits et légumes qui ont enregistré un déficit considérable.
Le dernier accord préliminaire conclu entre les deux pays intervient comme un gilet de sauvetage pour la Tunisie, dont l’économie ne cesse de se détériorer sous l’effet des répercussions de la crise sanitaire, et pour la Libye, pays livré à la guerre civile depuis de nombreuses années. C’est le ministère libyen des Affaires étrangères du Gouvernement d’union nationale qui avait annoncé qu’un accord préliminaire a été conclu avec la Tunisie pour la réouverture des frontières et la reprise des échanges commerciaux.
Une rencontre a eu lieu mercredi dernier entre les chefs de la diplomatie tunisien et libyen à ce sujet. La question de l’ouverture des points de passage et de la facilitation de la tâche de transport des citoyens ainsi que les échanges commerciaux entre les deux pays étaient au cœur de cette réunion. «Après des consultations avec la partie tunisienne concernant l’ouverture de l’espace aérien et terrestre, il a été décidé d’ouvrir progressivement l’espace aérien aux autorités compétentes selon les protocoles sanitaires en vigueur entre les deux pays frères», ajoutait-on.
En effet, un protocole sanitaire unifié entre les deux pays a été mis au point en prévision de l’ouverture de l’espace aérien puis des passages frontaliers terrestres entre les deux pays. D’ailleurs, le Chef du gouvernement, Hichem Mechichi, a autorisé, vendredi, la réouverture du principal passage frontalier entre les deux pays, celui de Ras Jedir, dans le gouvernorat de Médenine. Selon ses déclarations, à l’issue d’une réunion avec les hauts responsables du département des Affaires étrangères, cette ouverture doit être conditionnée par le strict respect des mesures de lutte contre le coronavirus conformément aux protocoles élaborés par les deux pays. En effet, une séance de travail tenue vendredi à La Kasbah entre le Chef du gouvernement, le ministre des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, Othman Jerandi, le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Mohamed Ali Nafti, et les hauts cadres du ministère des Affaires étrangères, s’est focalisée sur les résultats des négociations tuniso-libyennes sur la reprise des échanges commerciaux et de la circulation des personnes entre les deux pays.
Quel protocole ?
Sauf que cet accord pour la reprise des échanges commerciaux entre les deux pays et la réouverture des frontières intervient dans une situation épidémiologique qui ne cesse de se détériorer dans les deux pays. En effet, la Tunisie, comme la Libye, connaissent une accélération de la propagation du coronavirus sur leurs territoires, mais aussi une augmentation inquiétante du nombre de décès. En tout cas, selon les mesures mises en place par l’Office tunisien de l’aviation civile et des aéroports (Oaca), l’accueil des ressortissants libyens souhaitant se rendre en Tunisie devra obéir à plusieurs conditions. Il est notamment question de la nécessité pour le voyageur d’être porteur d’un certificat médical confirmant qu’il est indemne du coronavirus. La décision exclut de cette procédure les enfants de moins de 12 ans et les voyageurs arrivant sur des vols non réguliers.
Cette redynamisation des relations tuniso-libyennes ne concerne pas uniquement la réouverture, pour certains risquée, des frontières, mais porte aussi sur la reprise des échanges commerciaux entre les deux pays. En effet, fermé pour des raisons sanitaires liées à la propagation du coronavirus, le marché libyen sera bientôt rouvert notamment aux produits agricoles tunisiens. L’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (Utap) l’avait annoncé depuis quelques jours.
Les relations commerciales entre la Tunisie et la Libye sont régies par la convention instituant une zone de libre-échange signée à Tripoli depuis 2001. Avant l’éclatement de la crise du coronavirus, les échanges commerciaux entre la Tunisie et la Libye devaient atteindre les trois milliards de dollars en 2020, sauf qu’ils ont été lourdement impactés par les répercussions du confinement total et de la fermeture des frontières.
Les échanges commerciaux de la Tunisie avec l’extérieur durant les sept premiers mois de 2020 ont enregistré une contraction de 18,1% au plan des exportations et de 20,8% à celui des importations, comparés à la même période de l’année 2019, selon les données de l’Institut national de la statistique (INS). La baisse du volume des exportations a touché la majorité des secteurs, notamment le textile, l’habillement et le cuir, marquée par un recul de 23,2% des quantités exportées et de 27% pour le secteur des industries mécaniques et de l’électricité. Rappelons également que le nombre de touristes libyens et algériens a baissé, au premier semestre de 2020, de 56% par rapport à la même période en 2019.
La Libye connaît actuellement une phase d’entente politique qui promet de mettre fin à une décennie de combats et de conflits internes. En effet, les parties en conflit ont signé, vendredi dernier, un cessez-le-feu national et permanent, après cinq jours de discussions à Genève organisées sous l’égide de l’ONU.