Les mesures de confinement ont contraint beaucoup d’employés des secteurs public et privé à rester chez eux. Les entreprises font face à des situations inattendues, même dans des secteurs qui ne semblaient a priori pas concernés. Il s’agit d’une situation exceptionnelle marquée notamment par l’absence d’une réglementation dans le droit unisien susceptible de régir les répercussions causées de près ou de loin par la pandémie. Le cas de force majeure, défini comme un événement extérieur, imprévisible et irrésistible, peut-il être justement la cause d’une suspension de salaire, voire du contrat de travail ?
Près du tiers des moyennes et grandes entreprises privées ne pourront plus payer de salaires. C’est ce qui ressort d’un sondage réalisé par l’Utica, sur un échantillon de 213 entreprises. Il est indiqué que 7% d’entre elles n’ont pas pu honorer les salaires du mois de mars. 22,5% sont parvenues, certes, à payer les salaires de ce mois, mais ne peuvent pas aller au-delà, ce qui laisse entendre que 29,5% des entreprises interrogées n’ont pas les moyens de payer leur personnel à la fin de ce mois. En contrepartie, 33,8% sont en mesure de payer le mois d’avril, 18,8% le mois de mai et 17,8% des entreprises interrogées ont les moyens d’aller au-delà du mois de mai.
Le sondage, qui n’a pas touché les petites entreprises, n’a pas mentionné les dispositions relatives au chômage technique et leurs répercussions sur l’économie tunisienne.
Au cas où son activité serait réduite ou arrêtée à cause de la pandémie, l’employeur a-t-il le droit de baisser, ou encore de suspendre, les salaires pour priver ses employés d’une rémunération leur permettant de subvenir à leurs besoins? Le code du travail ne comporte aucune disposition dans ce sens, encore moins dans le cas de circonstances exceptionnelles. Mais dans les faits, cela risque de se passer autrement.
Vu les difficultés financières que les différentes parties prenantes risquent d’affronter et conformément au plan gouvernemental de maintenir l’emploi face à la crise sanitaire, l’Etat est appelé à jouer un rôle de médiateur entre les salariés et les entreprises, en encourageant, notamment, les compromis pour que la charge et les répercussions d’une pareille situation ne soient pas supportées par une seule partie. Si les dispositions envisagées par l’Etat ne sont pas encore définies, d’aucuns n’hésitent pas à évoquer les aides financières aux employeurs pour continuer à payer les salariés qu’ils ne sont plus en mesure de faire travailler.
Le système de rotation est également préconisé avec des indemnités dont le niveau peut être négocié.
Tout ce qui peut être fait en télétravail est impératif, même si les modalités ne sont pas toujours définies et même si cela n’est pas possible pour tous les emplois.
Quel que soit le coût et même s’il est impossible de compenser toutes les pertes, l’objectif est d’éviter les licenciements économiques. Les dispositifs protecteurs existent. La situation évolue de jour en jour. La marge de manœuvre par rapport à une situation inhabituelle est toujours là. Si la règle veut que «sans travail pas de salaire», il existe d’importantes exceptions et alternatives. La responsabilité doit être partagée et chacun est appelé à supporter une partie de la charge.