Le suivi et la concrétisation des solutions envisagées pour accompagner et soutenir les entreprises, ainsi que l’adaptation du plan des mesures instaurées par le gouvernement font débat.
Les salaires du mois d’avril seront assurés. C’est ce qui a été énoncé dans l’accord conclu entre l’Ugtt, l’Utica et le gouvernement. L’Etat prendra en charge 200 dinars du salaire des employés des entreprises concernées et l’employeur payera le reste. Ce dernier aura la possibilité d’en fixer les modalités, soit en comptabilisant les jours de congés ou en prévoyant des heures supplémentaires à effectuer ultérieurement.
Il s’agit au fait d’une aide exceptionnelle de solidarité destinée à soutenir et à protéger l’économie dans un contexte de crise sanitaire, de dégradation et de récession. L’accord n’indique pas cependant si les différentes parties concernées continueront de le faire le temps que durera la crise, si l’on restera solidaire des entreprises et de leurs salariés et si l’on continuera à être pleinement mobilisés dans les jours et les semaines à venir. On n’évoque pas non plus la reprise économique pour l’après-3 mai.
Jusqu’à présent, l’on se contente d’indiquer que les charges sociales des entreprises seront reportées, que des remises d’impôts directs peuvent être décidées, qu’un rééchelonnement des crédits bancaires est possible, qu’un fonds de solidarité pourrait voir le jour pour soutenir les finances, ainsi que la mise en place du télétravail. Autant de mesures qui ont besoin toutefois d’être complétées et précisées, notamment en sécurisant la trésorerie et en assurant le rebond nécessaire.
Les entreprises en difficulté ont besoin de réponses claires, elles attendent des autorités un traitement rapide et efficace de leurs besoins. La responsabilité n’incombe pas toutefois seulement à l’Etat. Toutes les parties prenante sont concernées et doivent s’engager pour faire face aux conséquences sociales et économiques de la pandémie. Réseaux de coopération et d’entraide, solidarité et résilience sont le cœur de cette mobilisation qui devrait animer les acteurs publics et privés pour répondre aux besoins sociaux et maintenir au mieux l’activité économique.
Les outils de soutien demeurent impératifs pour aider les entreprises à conserver ou reconquérir rapidement leur place. Au-delà des changements pendant et après la crise du coronavirus, qui auront certainement des impacts profonds, il est nécessaire de rappeler que l’économie tunisienne a plus que jamais besoin de retrouver ses vertus et ses performances d’avant 2011 et de changer de trajectoire. Ceux qui défendent une approche centrée sur l’intérêt commun plutôt que sur l’intérêt individuel savent parfaitement qu’il est temps de saisir le sens de la rupture comme un processus désormais inévitable et dont il est urgent de retracer les différentes étapes et de favoriser les conditions émergentes. Une approche qui suppose de ne plus verser dans les excès, mais aussi de ne plus se complaire dans la suffisance. De comprendre surtout le sens des évolutions économiques et financières et sociales au regard des contraintes et obligations de tous les jours. Une grande partie de ce qui a été accompli depuis 2011 fait état de réalisations loin de pouvoir correspondre aux valeurs et aux objectifs de la révolution, encore moins de ce qui était souhaité. Avec le temps, ces valeurs ont perdu de leur sens et de leur vocation. A la place des programmes et des projets, l’on a eu droit à des stratégies et des approches économiques et sociales qui divisent plus qu’elles ne rassemblent et qui font état d’un malaise auquel l’on s’habitue de plus en plus.