Les partis, les coalitions et les blocs parlementaires ont jusqu’au 23 juillet pour proposer des candidats à La Kasbah. Conformément aux dispositions de l’article 89 de la Constitution, le Président de la République donne ainsi le coup d’envoi aux premières concertations pour charger la personnalité qui sera jugée la plus apte à former le prochain gouvernement.
Leurs prérogatives se limitent aux propositions, puisqu’il appartient au Chef de l’Etat de trancher, comme il l’a déjà fait en choisissant Elyès Fakhfakh. Une responsabilité qu’il est encore prêt à assumer pleinement et sans la moindre réserve, mais tout en prenant en considération les fragmentations politiques qui ne cessent de diviser les différentes parties prenantes et surtout les rebondissements économiques et sociaux, potentiellement énormes, qui se profilent à l’horizon après la crise sanitaire. A qui correspond le profil recherché ? Quelles sont les personnalités «bénéficiaires» de la situation actuelle ?
Il est évident que le profil recherché devrait coller, ou du moins correspondre, à l’image des engagements que le Président de la République a pris et continue toujours de revendiquer. Peut-être bien au profil chinois qu’il se fait lui-même. Une personnalité qui aura la force et le savoir-faire pour composer avec les blocs parlementaires, qui connaît bien les rouages des partis et ceux qui les dirigent et pour présider une coalition gouvernementale dont la composition risque, au vu du contexte actuel, de changer profondément.
Pour se faire des ennemis, pas la peine de déclarer la guerre, il suffit de faire et d’adopter un choix. Et celui qui accède à la tête de l’exécutif sait pertinemment qu’il risque à tout moment de servir de fusible, essentiellement en cas de blocage, parce que cela évite aux différentes parties prenantes d’assumer la responsabilité des actes dont ils sont pourtant les premiers initiateurs. Surtout quand il n’y a pas, non plus, de solidarité qui tienne.
L’on ose reconnaître que la vie à La Kasbah n’est pas de tout repos. Elle ne l’a été pour aucun locataire. On l’a déjà constaté, d’ailleurs les tenants et les aboutissants l’on souvent confirmé : les différents chefs de gouvernement s’étaient souvent trouvés dans des situations embarrassantes, voire fragilisées, qui n’ont rien de rationnel. Jouer le jeu ou poser les limites ? Tel est le grand dilemme.
Depuis que certains y avaient pénétré par la fenêtre et non pas par la porte grâce à un système politique et une loi électorale totalement inadaptés, le paysage politique est tombé si bas sans qu’on ait pris pourtant les mesures nécessaires pour y faire face. Parce que ceux qui l’avaient précédé avaient subi sans relâche les mauvaises manières et avaient dû composer avec des parties ingérables, à peine si on leur reconnaît un quelconque mérite, le nouveau chef du gouvernement risque encore de se heurter à une éternelle épreuve de cohabitation, à d’incessantes campagnes de dénigrement. Ce qui constitue une menace pour le présent et l’avenir du pays. Ce qui est aussi frustrant est qu’on ne parle plus du bien commun, on fait comme si l’intérêt général n’était plus que la somme d’intérêts particuliers que les uns et les autres sont ponctuellement invités à défendre. On est amené à n’être plus que le petit lobbyiste des intérêts privés, ou de ses intérêts de clan. C’est à partir de là que la culture des arrangements douteux s’est développée. On est dans un paysage politique où le savoir-faire et la compétence n’ont plus d’importance par rapport à ce qui se dit, se raconte et se propage. Un autre monde est né…