Le génie tunisien

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Editorial La Presse

 

N’en déplaise aux détracteurs de l’école publique tunisienne, à ceux qui la flagellent et tentent de la miner de l’intérieur, c’est elle qui a enfanté Mohamed Bawendi, prix Nobel de chimie 2023. Encore une preuve que l’école publique demeure un ventre fertile en génies et des Bawendi tunisiens il y en a eu et il y en aura encore. Le Président de la République Kaïs Saïd a rappelé d’ailleurs que Bawendi a fréquenté l’école publique en Tunisie et c’est bien là que les premiers indices d’intelligence et de savoir-faire ont fait leur apparition. Malgré son parcours atypique entre la France et les Etats-Unis, l’homme de science est demeuré profondément tunisien. En témoigne la photo de la pierre tombale de son grand-père paternel qu’il a tenu à projeter lors de sa prise de parole dans la prestigieuse et flambant neuve Académie diplomatique internationale de Tunis. Le moment était émouvant pour lui mais aussi symbolique pour nous qui y avons vu une modestie sans limites mais aussi un grand respect pour les ancêtres et les racines. C’est peut-être cela le secret de ceux qui veulent tracer des chemins vers l’infini en fin de compte.
Comme plusieurs champions tunisiens qui ont rayonné dans le monde entier et surtout en sport individuel, Mongi Bawendi représente également une richesse très tunisienne issue d’un véritable melting pot génétique puisque la Tunisie est le berceau de plusieurs civilisations, de plusieurs couleurs et de plusieurs cultures. Tout cela a pu créer des génies et des Tunisiens exceptionnels. Oui, Bawendi est le fruit des entrailles de l’école publique mais il est aussi le fruit des entrailles de cette Tunisie riche de ses différentes cultures et parfois de ses paradoxes sociaux ô combien fertiles !
Pourquoi il est important aujourd’hui de célébrer nos scientifi ques ? Parce qu’il est important de donner un modèle scientifi que à nos jeunes dont la plupart n’ont comme idoles que des sportifs. Il est important de semer les graines du rêve parmi une jeunesse pour qui le fait de quitter le pays demeure le seul objectif. «Sommes nous obligés de partir à l’étranger pour réussir ?» La question a été posée au prix Nobel de chimie par des jeunes lors de sa visite à l’Enit. Bawendi a répondu : «De nombreuses recherches sont faciles à conduire, certaines expériences et manipulations ne sont pas très compliquées et n’ont pas besoin au départ de beaucoup de ressources. C’est plus tard qu’il va falloir mobiliser plus de moyens. Il n’est pas nécessaire d’émigrer pour réussir. Vous pouvez y parvenir avec les moyens du bord, en restant au pays et avancer sans cesse». Une réponse à méditer et qui devrait pousser plusieurs de nos jeunes scientifi ques à réfl échir…

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