La guerre d’usure aura-t-elle lieu ?

Editorial La Presse

L’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica) a annoncé, samedi, la signature avec l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt) d’une convention sur l’augmentation des salaires dans le secteur privé pour les années 2022, 2023 et 2024.

D’habitude, les négociations sociales sont entamées en premier avec le secteur public après plusieurs rounds d’âpres discussions. Une fois les taux d’augmentations salariales définis, le secteur privé n’avait qu’à s’aligner sur ce qui a été conclu pour le secteur public. Pourquoi alors ce changement tactique des syndicalistes ? En effet, après avoir perdu tout espoir de rétablir la voie de la communication avec Carthage qui refuse que l’Ugtt se fourvoie en politique et dérive de son rôle de partenaire social en porte-voix d’acteurs politiques, Taboubi s’est rapproché de Bouden, fraîchement nommée Cheffe du gouvernement. Un premier appel téléphonique puis une rencontre entre Bouden et Taboubi que le SG de l’Ugtt a qualifiée de positive, signalant avoir perçu chez la Cheffe du gouvernement une volonté de réussite, de persévérance et de patriotisme et qu’elle a confiance en la place de l’Ugtt et dans le dialogue positif et que les prochains jours traceront les grandes orientations du gouvernement, déterminent les relations et la coopération entre la partie syndicale et l’Ugtt.

Mais voilà que, quelques jours après, la fameuse circulaire N° 20 émise par la Cheffe du gouvernement, et interdisant aux premiers responsables des entreprises publiques de négocier avec les syndicats avant d’avoir le feu vert de la tutelle, met le feu aux poudres. C’est un second revers pour Taboubi qui réagit dans un discours enflammé traduisant son irritation. En effet, le chef de l’organisation ouvrière a lancé des menaces à l’adresse du gouvernement, assurant que l’Ugtt était prête à une guerre d’usure. De ce fait, l’accélération de la signature d’un accord avec le secteur privé vise à attiser les foudres des fonctionnaires dont les nerfs sont déjà à vif par une crainte du gel des salaires et de la réduction des effectifs. Profitant de cette atmosphère sociale délétère, Taboubi, qui a lâché la bride aux syndicalistes pour mener à leur guise les actions de protestation sociale sous toutes leurs formes, compte sur l’escalade pour faire plier le gouvernement ainsi que pour restaurer son prestige bafoué par Saïed qui l’avait brocardé à propos de sa solution de «troisième voie».

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