Urbanisme:  Nos villes sont devenues des villages-centres

De tout temps, on a été des étrangers à la ville. Aujourd’hui, le constat est encore plus amer. Nos villes sont loin d’être des lieux où il fait bon vivre. En l’absence de planification urbaine bien étudiée, l’anarchie, le désordre et l’absence de goût marquent nos villes. La densification, la mauvaise gestion urbaine et l’improvisation face à une demande pressante y sont pour beaucoup.

La capitale, Tunis, est un cas d’école. Dans son centre-ville, au riche passé, et le long des rues principales, des immeubles surdimensionnés, sans harmonisation ni espaces verts et parcs naturels s’offrent aux regards pour les décevoir. L’absence d’harmonie entre les beaux buildings datant de l’époque coloniale et les nouveaux R+ 5, voire + 7 accentuent la laideur. Pis encore, centres culturels, cinémas, théâtre et galeries d’art sont en passe d’être anéantis.

Le même constat s’applique au reste des villes, notamment l’Ariana, La Marsa, Bizerte, Nabeul, Sousse, Kairouan, Sfax, etc.

Anarchie urbaine

La croissance urbaine en Tunisie semble être hypothéquée par une mise en œuvre de projets mal pensés et d’un laxisme qui va grandissant.

D’autant que les permis de bâtir distribués se sont avérés sans aucune harmonisation préalable. Et plusieurs affairistes ont imposé aux citoyens leurs cahiers des charges, faisant fi des besoins élémentaires de tout espace citadin vivable. En payent un lourd tribut les spécificités locales et régionales et l’équilibre originalité-modernité.

La course effrénée aux étages et aux buildings anarchiques n’a fait que nuire à l’organisation de nos espaces urbains. D’où la nécessité de corriger la trajectoire. Pouvoirs publics, maires et citoyens sont appelés à jouer pleinement leurs rôles.

Ils devraient s’inspirer de Jacques Le Goff qui disait que l’on parle de lieu de décision dès lors où il y a expression matérielle du pouvoir politique et économique. Ce n’est plus là un simple village ni un bourg rural, c’est une ville. Cela fait donc partie intégrante « de ce qu’il est convenu d’appeler en histoire une ville, c’est-à-dire un lieu — y compris pendant le Moyen Âge et les Temps modernes — où une partie longtemps minoritaire de la population ne se consacre pas à l’agriculture — pour reprendre le critère simple de Max Weber — mais vit du prélèvement d’une partie de ses surplus ».

Agir ou périr

L’urbanisme est défini comme étant « la réflexion théorique sur les formes urbaines et l’application pratique de cette réflexion dans l’espace ».

La planification urbaine doit être ainsi contrôlée par le pouvoir politique.

Or, nos gouvernants ne sont bons qu’à se regarder en chiens de faïence, à nous gratifier par leurs absurdes spectacles quotidiens.

Pour mesurer l’incompétence et le laxisme des gouvernants de la Tunisie nouvelle, il suffit d’observer attentivement les noyaux médiévaux des villes coloniales où l’habitat engendre la rue et la rue appelle l’habitat. Nos villes sont le reflet de nous-mêmes, société qui les habite.

Si elles sont de plus en plus moches, c’est que nous sommes de plus en plus pauvres et miséreux si l’on parle éducation du goût.

Aujourd’hui que le constat est amer, un partenariat public-privé, un vrai réveil citoyen et une implication réelle des responsables s’annoncent très urgents afin d’améliorer la qualité de l’espace citadin, garantir le bien-être des citoyens et la compétition internationale afin d’attirer les investissements et les touristes.

Gouverneurs, maires, tous ces gouvernants d’une Tunisie nouvelle prise à la gorge, ces professionnels de la politique politicienne qui semblent avoir bu l’eau des nouilles, sont appelés à rompre avec l’immobilisme, l’inertie et les comptes d’apothicaires.

L’adage : « Les grandes réalisations sont précédées de belles idées ». Autrement, « le travail pense, la paresse songe ».

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