Économie circulaire | Un potentiel peu développé auprès des industriels

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L’économie circulaire demeure peu développée auprès des industriels, et ce, pour plusieurs raisons. Elle n’est pas uniquement l’affaire des producteurs. Elle doit être conçue, planifiée et mise en œuvre dans le cadre d’une démarche globale et systémique dans laquelle interagissent les consommateurs, les pouvoirs publics, les éducateurs et les influenceurs de manière générale, médias, communication et autres, précise Samir Meddeb, fondateur de l’Observatoire tunisien de l’environnement et du développement durable Otedd. 

«Notre économie qui était autrefois circulaire est devenue linéaire, grande consommatrice en ressources naturelles», a affirmé Meddeb.  Et d’ajouter : «Nous consommons et nous produisons en Tunisie, au moins depuis les années 80, à l’instar de la quasi-totalité des pays du monde, de plus en plus de manière linéaire, c’est-à-dire que nous exploitons de la matière première et des ressources naturelles en vue de les transformer en produits utiles, les consommer avec des durées de vie de plus en plus courtes et jeter les déchets induits en quantité sans cesse plus importante.

Selon Meddeb, la société tunisienne, à travers le temps, a acquis de nouveaux comportements et de nouvelles attitudes et s’est ainsi progressivement écartée des modes de consommation et de production qui cherchaient à allonger la durée de vie des produits, à réparer ceux qui sont défectueux et à injecter de nouveau et continuellement ce qui est aujourd’hui qualifié de déchets dans les cycles de production au même titre que les autres ressources ou matières initialement utilisées.

Renverser les tendances

Notre économie, qui était autrefois circulaire, est devenue de ce fait linéaire, grande consommatrice en ressources naturelles, faiblement valorisatrice de ces dernières et productrice de quantités de déchets de plus en plus grands, complexes et dangereux.

La prise de conscience devant cette situation et le désir de renverser les tendances, bien que timides, commencent heureusement à faire un bout de chemin auprès de certaines franges de la société et certaines institutions publiques et privées.   

Meddeb a souligné pour ce qui est du recyclage et de la récupération des déchets ménagers, et malgré le fort potentiel de valorisation, la quasi-totalité des déchets ménagers et assimilés collectés sont acheminés vers les dépotoirs et les décharges contrôlées.

La valorisation n’occupe pas encore une place prépondérante dans le cycle de la gestion des déchets. Bien que la loi sur les déchets en Tunisie ait mis l’accent sur la valorisation, dans la pratique, nous n’observons pas encore et de manière significative un développement des différents modes de valorisation que ce soit à travers le recyclage pour obtenir des produits du même matériel, la valorisation organique pour produire du compost ou la valorisation énergétique pour récupérer de l’énergie des déchets, que ce soit par biométhanisation ou incinération. A ce titre, le compostage et le recyclage des déchets ménagers et assimilés en Tunisie, menés en grande partie dans le cadre de projets pilotes, demeurent largement inférieurs à 5% du potentiel valorisable.

Les industriels ont beaucoup à gagner

Au niveau du secteur industriel, les déchets induits non ménagers et considérés de ce fait dangereux, évalués en 2017 à 335.426 subissent essentiellement trois destinées, 72% d’entre eux sont stockés généralement aux alentours de l’unité de production, 27% sont éliminés de manière considérée écologiquement acceptable et une faible partie est exportée pour subir un traitement approprié.

Un grand chemin reste de ce fait à faire, pour développer en Tunisie durablement une économie circulaire.

Les industriels ont beaucoup à gagner aujourd’hui en faisant évoluer leurs procédés de fabrication d’un modèle linéaire vers un mode circulaire. Ils réduisent de cette manière l’utilisation de matières premières, d’énergie et de ressources naturelles, ainsi que les déchets induits de leur cycle de transformation, diminuent de ce fait leurs coûts de production et amélioreront leur compétitivité sur les marchés nationaux et internationaux.

Meddeb révèle  que l’économie circulaire demeure peu développée auprès des industriels, et ce, pour plusieurs raisons. En effet, elle n’est pas uniquement l’affaire des producteurs, elle doit être conçue, planifiée et mise en œuvre dans le cadre d’une démarche globale et systémique dans laquelle interagissent les consommateurs, les pouvoirs publics, les éducateurs et les influenceurs de manière générale, médias, communication et autres.

L’économie circulaire est une culture avant toute chose qui doit être réfléchie, planifiée et installée progressivement dans les esprits et les comportements des différents acteurs, décideur, entrepreneur et citoyen.  Il s’agit d’un projet sociétal. En outre, elle doit être financée du moins pour initier auprès des producteurs et des consommateurs de nouveaux modes de fonctionnement et de nouveaux procédés qu’il y a lieu à installer, le secteur bancaire n’est pas encore enthousiaste pour s’impliquer aujourd’hui dans de telles approches. L’économie circulaire doit être favorisée et encouragée par l’administration dans ses différents domaines d’intervention à travers particulièrement des politiques d’assistance technique, d’accompagnement et d’incitation, chose qui demeure très peu développée aujourd’hui, a-t-il conclu.

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