Chroniques de la Byrsa: « Au revoir et merci ! »

Je venais de quitter ma chère Tunisie pour un long séjour d’études supérieures à Paris. Ce n’était pas la première fois que je m’« expatriais » mais la première au cours de laquelle j’étais amené à mener une vie « normale », assumant le quotidien de toute personne installée dans la durée. Entre autres, les courses ménagères qui vous conduisent dans toutes sortes de commerces. La première fois — on est tunisien ou on ne l’est pas ! — c’était évidemment chez le boulanger. Plus exactement chez la boulangère. Accueilli dans un local dont j’ai gardé en mémoire l’impeccable tenue et la clarté qui l’inondait. Au moment de repartir, le nez plongé dans la monnaie qui venait de m’être rendue et avec laquelle je ne m’étais pas encore familiarisé, j’entends la dame lancer : « Au revoir et merci ». J’ai alors regardé derrière moi et, à mon grand étonnement, j’ai compris que ces aimables propos m’étaient adressés. Je n’en revenais pas. On n’était pas habitué à tant de chichi chez nous !

A croire que les rôles ont été inversés par on ne sait quel processus pervers

Quelques décennies plus tard, où en est-on en matière de qualité du service ? Je ne parle pas de sourire, si commercial fût-il. De toute façon, il y a longtemps qu’il a déserté nos lèvres alors qu’il avait servi d’image de marque pour promouvoir le tourisme tunisien à l’étranger. Je ne parle pas non plus de propos protocolaires, si conventionnels fussent-ils. Non. Je parle simplement de correction dans le traitement de la clientèle qui, pourtant, est la raison d’être des commerçants de proximité ; leur gagne-pain au quotidien. Le chaland est accueilli par des visages fermés, rudoyé à l’occasion, la monnaie lui est balancée sur le comptoir comme une aumône. La plupart des vendeurs poussent la légèreté jusqu’à s’en remettre au client pour emballer lui-même sa marchandise dans ces maudits sacs en plastique qui empoisonnent littéralement notre existence. A croire que les rôles ont été inversés par on ne sait quel processus pervers. Ne parlons pas des hors-la-loi qui pratiquent ouvertement et sans vergogne la vente conditionnée.

Dans tout cela, à qui la faute ? Qu’on n’incrimine surtout pas le consommateur dont l’existence est suffisamment éprouvante pour qu’on y ajoute encore une dispute à chaque visite au fournisseur. Quant aux organismes et associations de défense du consommateur, ils ont des chats bien plus « sérieux » à fouetter. Personnellement, j’en voudrais plutôt à l’Utica, organisme théoriquement en charge de la défense de ses adhérents et qui perd de vue que la formation, la sensibilisation et, au besoin, la sanction sont aussi des moyens de défense des intérêts de ces adhérents.

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