Nul n’est au-dessus de la loi

Editorial La Presse

 

Un médecin décède en prison, et c’est un tollé général auprès du Conseil de l’ordre des médecins. Un avocat est placé en détention préventive, et c’est tout le corps des robes noires qui se met en branle. Un chauffeur de train placé en détention, et c’est tout le secteur qui bouge. Un directeur d’école et une enseignante sont interpellés, et c’est l’arrêt des cours et des examens. Des grèves, des manifestations de solidarité, des mouvements d’indignation sont observés à chaque fois que la justice ose auditionner un. homme d’affaires ou un haut fonctionnaire de l’Etat. Illico presto, les avocats investissent les plateaux et font un plaidoyer en direct sur les ondes des radios. Alors que chaque jour, des centaines d’individus comparaissent devant les tribunaux pour des forfaits et des chefs d’accusation similaires. Ceuxlà, personne ne parle d’eux. Pourquoi ? Parce qu’ils sont tout simplement des citoyens ordinaires. Ils n’ont pas de statut social particulier qui a fait des privilégiés et n’appartiennent pas à des corps de métiers organisés pour les soutenir et les défendre à cor et à cri. La question qui se pose dès lors est que la loi est-elle taillée sur mesure pour ne s’appliquer qu’aux couches vulnérables ? Pourquoi veut-on d’une justice à deux vitesse ? L’équité et l’impartialité de la justice sont ainsi bafouées par la pression continue sur les juges et les magistrats. Et c’est d’ailleurs ce sentiment d’injustice qui crée un malaise social et creuse davantage le lit de la division entre les justiciables. Le traitement en prison est aussi inégal entre les détenus. Or, plusieurs s’élèvent pour barrer la route à la nouvelle approche voulant restaurer une justice axée sur les principes de l’équité, le respect et l’application de la loi et des procédures à tous sans distinction. Ceux-là n’ont pas encore compris que l’ère de l’impunité est révolue. Car si on veut combattre le crime, tous les crimes et les délits, il ne faut pas faire obstruction à la justice, mais travailler à faire amender certaines lois obsolètes, réformer l’univers carcéral et faire en sorte d’humaniser ces lieux de détention. En effet, affûter les armes pour tirer à boulets rouges sur les policiers, les juges et les geôliers ne ferait que noircir notre quotidien, compromettre les procédures judiciaires et propager un sentiment d’inégalité, voire d’injustice. Nous sommes tous égaux devant la justice et s’il y a des travers et des torts, il ne faut pas entraver celle-ci, mais agir en sorte pour la moderniser.

Laisser un commentaire