Réactions au second tour des Législatives : La crise politique accentuée

Comme prévu, le second tour des législatives anticipées a confirmé le désenchantement politique des Tunisiens. Le taux de participation est faible, reconnaît l’instance électorale, mais pour elle, le plus important, c’est que nous évoquons une opération électorale « pure et transparente ».

C’est aussi une nouvelle occasion pour l’opposition de récupérer politiquement ce fort taux d’abstention. Comme d’habitude les réactions politiques n’ont pas manqué pour revenir sur cet évènement qui marque la fin de tout le processus électoral annoncé depuis plusieurs mois par le président de la République et qui avait commencé, rappelons-le, par une consultation numérique nationale.

En tout cas, les dés sont jetés et il faut s’attendre à la mise en place du nouveau parlement d’ici le mois de mars avec l’annonce des résultats définitifs. D’ici là, la polémique autour de l’organisation de ces élections ne va pas se calmer au vu de la grande polarisation politique que connaît le pays.

Le Front de salut national, qui s’est lancé depuis sa naissance dans une guerre médiatique contre le président de la République, était le premier à réagir à ce qu’il appelle le « fiasco du second tour ».

Le président du Front de salut national, Ahmed Nejib Chebbi, a appelé le président Kais Saied à « partir après le fiasco du second tour des législatives, marqué par un taux d’abstention massif de plus de 90% », selon ses propos. Lors d’une conférence de presse, Chebbi a estimé que ce scrutin dont le taux de participation n’a pas dépassé les 11.3% « montre que très peu de Tunisiens cautionnent le processus de Kais Saied. C’est un grand désaveu populaire pour le processus du 25 juillet démarré par le gel du Parlement, avant d’accaparer tous les pouvoirs », a ajouté Ahmed Nejib Chebbi. Pour lui, « les Tunisiens ont boudé massivement les urnes, ce dimanche, alors qu’ils étaient appelés à renouveler leur Parlement, un scrutin voulu par le président Kais Saied pour mettre un point final au processus enclenché par son coup d’État », selon ses dires.

Chebbi a invité l’Union générale tunisienne du travail, la Ligue des droits de l’homme et l’Ordre des avocats à « cesser de diviser les Tunisiens entre civils et politiques », soulignant que « tout le monde est sur le même bateau et que la solution à la crise passe par une nouvelle direction politique ».

Pour sa part, la présidente du Parti Destourien Libre (PDL), Abir Moussi a déclaré que « l’abstention massive observée au second tour des élections législatives vient confirmer le rejet des Tunisiens du processus catastrophique du 25 juillet ».

S’exprimant, lors d’un rassemblement de ses sympathisants, devant le siège des Nations Unies, à Tunis, la présidente du PDL a souligné que « les organisations et les délégations officielles ne pourront plus soutenir ces élections au vu des résultats de ce second tour ».

D’après elle, « les organisations ont signalé aujourd’hui l’omission volontaire de l’Instance Supérieure Indépendante pour les Elections (ISIE) de dévoiler les résultats du taux de participation ».

Abir Moussi a, par ailleurs, remis en doute le résultat relatif au taux de participation (11,3%) annoncé par l’ISIE, estimant que « le président de la République, Kais Saied a perdu sa popularité après les résultats de ce scrutin. Vu le désintérêt de la population pour la politique, ce Parlement n’aura aucune légitimité, le président qui s’est arrogé les pleins pouvoirs grâce à la Constitution de 2022 pourra le dominer à sa guise », estime encore Moussi.

« Un parlement illégitime »

Au fait, les réactions des détracteurs du processus du 25 juillet sont allées jusqu’à considérer que « le prochain parlement sera illégitime ». En effet, selon plusieurs partis qui ont tenu à s’exprimer dans une déclaration commune, en marge du deuxième tour des élections législatives, « le prochain parlement sera dépourvu de légitimité ».

Le Courant démocrate, Al Qotb, Ettakatol, Al Joumhouri et le Parti des travailleurs, estiment que « le parlement issu de ces législatives n’aura aucune légitimité et sera dépourvu de ses prérogatives ». Ces formations politiques qui ont boycotté le référendum du 25 juillet et les législatives considèrent que « ce parlement est illégitime ». Ils soulignent que « le refus des Tunisiens du processus du 25 juillet a privé le président Kais Saied de toute légitimité électorale ».

Ces partis imputent au à Kais Saied « l’entière responsabilité juridique et politique dans le gaspillage de temps et d’argent public lors de ces échéances électorales ».

Pour sa part, le mouvement Ennahdha a réclamé « la démission de Kais Saied et la tenue d’une présidentielle anticipée ». Dans un communiqué public, Ennahdha a dénoncé « les grandes failles ayant accompagné l’opération électorale et révélées par la société civile ».

« Des failles, qui, selon Ennahdha, ont reflété une atteinte manifeste du principe de transparence et d’intégrité des élections, et ayant traduit, clairement, l’absurdité de l’opération électorale, et la dilapidation de l’argent public ».

Les pro – 25 juillet se défendent

Sur fond de ces résultats que les médias internationaux ont également qualifiés d’échec, les partisans du processus du 25 juillet ont insisté sur « la transparence de l’opération électorale en dépit du taux de participation ».

Le candidat validé aux élections législatives dès le premier tour Brahim Bouderbala a indiqué que « ces élections sont transparentes et sans argent politique ». Pour lui, « l’abstention s’explique par le régime présidentiel modifié et le processus d’élection des listes. Suite à quoi, les partis n’ont pas pu former des alliances fortes ni assumer leurs responsabilités, or le peuple avait besoin d’une personne responsable et cela a conduit aux évènements du 25 juillet », a-t-expliqué.

Il faut rappeler que le président de la République s’est prononcé sur le taux d’abstention lors du premier tour. Pour lui, il faut comptabiliser le nombre des électeurs des deux tours avant de prendre position compte tenu de tout le processus électoral. « Tout le monde sait ce qui s’est passé, mais les 9% ou les 11% réalisés sont meilleurs que les 99% réalisés aux élections auxquelles ils avaient participé et qui étaient applaudies par les forces étrangères alors qu’elles savaient parfaitement qu’elles étaient falsifiées. Nous avons juste besoin des félicitations du peuple tunisien », a-t-il estimé à l’issue du 1er tour.

 

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