De la médiocrité du paysage audiovisuel !

Editorial La Presse

 

L’état dans lequel évolue le paysage audiovisuel tunisien est piteux. C’est le moins que l’on puisse dire. Un ascendant de médiocrité qui s’abat et qui prend de l’ampleur d’une année à l’autre : des contenus de moins en moins sérieux et constructifs, une tendance vers la banalisation et la légèreté à même de heurter les mœurs et les valeurs sociales, des programmes bâclés, des plateaux politiques mal conçus et partiaux, voire commandés…bref, dans tous les sujets abordés, le téléspectateur ou l’auditeur ne trouve guère, dans la majorité des cas, de produits respectables et professionnels qui l’enrichissent.

Paradoxalement, les radios et les télévisions n’ont pas su profiter de cette grande liberté d’agir (l’abc d’un média, c’est d’avoir la liberté de penser son contenu) qui est installée depuis 2011. On est passé du discours médiatique à sens unique, stéréotypé, en faveur de la propagande du régime, à des discours qui servent des clans, des partis, des personnes, des intérêts… C’est dire qu’on est passé de la « médiocrité dictatoriale » qui vous ment et vous impose son contenu lassant à une autre médiocrité populiste et orientée cherchant le « buzz » à tout prix. Et avec les réseaux sociaux qui grignotent des parts de marché et qui se transforment en des médias « reconnus » par le Tunisien, le paysage audiovisuel classique s’enfonce encore dans sa crise.

Il y a en cela une mauvaise gouvernance qui gangrène la plupart des chaînes de la place. On n’a pas de charte de travail, on ne forme pas les journalistes pour mieux servir le citoyen, et on enracine la culture du « buzz » et du sensationnel où l’annonceur impose ses choix. Et vous pouvez voir que la plupart des chaînes accentuent sur les plateaux polémiques avec un même modèle de programmes à base de chroniqueurs qui savent tout et qui tranchent, orientent, et se disputent entre eux rien que pour enflammer ceux et celles qui les regardent ou écoutent. Le plus grave dans cette crise de fond, c’est que l’on admet les dérives et la culture de la médiocrité au nom de l’audimat et de ce que veulent les gens. Au lieu d’élever le niveau et de proposer des contenus valorisants et profonds qui touchent le vécu des gens, les chaînes tombent et vont exprès vers le discours et le référentiel populistes et immoraux parfois qu’aiment certaines personnes en ces temps de dégradation morale. Au nom de la logique commerciale et financière, les chaînes oublient leur vocation. Et font un calcul erroné à terme. Ceci sans que les professionnels du domaine et l’instance de régulation n’interviennent pour sauver ce paysage audiovisuel en faillite et en dégénérescence.

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