Sécurité sociale : Quels éléments désincitatifs au niveau de la législation du régime contributif ?

 

Malgré de nombreux acquis, le système de sécurité sociale tunisien est relativement hétérogène, composé de régimes à législation différente, où les affiliés, étant donné leur situation socio-économique, présentent dans certains cas une instabilité en termes de contribution sociale, favorisant ainsi le développement de l’informalité.

Mais, au-delà du comportement des affiliés qui est en partie lié à leur situation socioéconomique, la législation de certains régimes peut elle-même encourager certains comportements stratégiques pour affaiblir la couverture sociale. – La possibilité de départ à la retraite à 50 ans : En effet, le régime Rsna prévoit la possibilité d’obtenir une pension de retraite à partir de l’âge de 50 ans pour motif de licenciement économique. Cela peut inciter un affilié à cumuler pension de retraite et travail dans l’informel vu qu’il se trouve encore loin de l’âge de la retraite. Pour l’année 2019, les flux de retraités s’élevaient à 3.500 personnes, représentant 20 millions de dinars de dépenses de pension. Le nombre total de retraités de cette catégorie est de 50.000 personnes, représentant 18 % des dépenses de pension en 2019.

– Des capacités de contrôle limitées : Les régimes des indépendants peuvent ne pas payer de cotisation au cours de leur période d’activité, mais doivent régulariser leur situation au moment du départ à la retraite. Le manque de contrôle et l’absence de pénalités peuvent encourager cette catégorie de travailleurs à ne pas cotiser sur des périodes assez longues, favorisant également l’informalité. C’est ce qui explique en partie l’écart entre le nombre de cotisants et le nombre d’affiliés chez les indépendants. Par ailleurs, il est essentiel de conduire des contrôles sur le régime Rsna qui est le régime le plus important de la Cnss en termes d’affiliés et de dépenses. La caisse dispose à ce niveau de capacités très limitées estimées à trois cents contrôleurs pour près de 128.000 employeurs.

– Des systèmes de cotisation inadaptés aux travailleurs précaires: L’expérience tunisienne a bien montré qu’il ne suffit pas de créer des régimes spécifiques à certains travailleurs, en général précaires, pour améliorer leur couverture sociale. La création des régimes Rtfr et Raci n’a pas sensiblement amélioré la couverture sociale des populations concernées. Il est important à ce niveau d’avoir une approche globale qui permette de tenir compte de l’ensemble des caractéristiques sociodémographiques des populations concernées. Des critères précis sont à prendre en considération afin de s’assurer de l’efficience d’un régime de sécurité sociale. L’approche Droits de l’Homme de la protection sociale apporte des éléments d’analyse précis autour de critères quantitatifs et qualitatifs qui permettent d’évaluer un système de protection sociale dans sa capacité à s’adapter aux besoins de la population active et, en particulier, celle qui est vulnérable.

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