Comme leurs compatriotes dans tout le territoire de la République, les habitants de la banlieue nord de Tunis-Carthage, ville historique et lieu du Palais présidentiel, se sont dirigés vers les bureaux de vote, dès les premières heures de leur ouverture. Hommes, femmes, personnes âgées et autres, tous ont pris la direction de ces bureaux. Mais pour les jeunes et jusqu’à midi, c’était la déception.

Au bureau de vote installé dans l’école primaire de Carthage Tanit à Carthage Byrsa, on croyait que l’affluence sera remarquablement importante car même avant l’ouverture des portes, des citoyens se sont rassemblés pour exercer leur droit, mais au final on s’aperçoit que les électeurs n’étaient pas très nombreux, c’étaient juste des personnes venues en avance pour éviter les longues files d’attente. En effet, à l’ouverture de la grande porte de ce bureau de vote, plusieurs dizaines de personnes se sont précipitées d’entrer, chacun devant le bureau sur lequel son nom est inscrit. Peu à peu, les files d’attente ont commencé à se former devant certains bureaux de vote, alors que d’autres étaient carrément désertés. Mais c’est notamment devant les deux premiers bureaux consacrés aux personnes âgées que ces files étaient assez longues et que l’attente se faisait aussi longue.

Dans ce paysage qui mêle les couleurs rouge et blanc, mais aussi le vert militaire des quelques soldats et sécuritaires positionnés sur les lieux pour protéger le déroulement du vote dans cette école, tout renvoyait au contexte du patriotisme et du devoir national. «Pourquoi arrivé si tôt ? Tout simplement je m’impatiente pour exercer mon devoir, et donner ma voix à celui qui la mérite», affirme Mondher, un grand-père de 70 ans, venu accompagné par son petit-fils. En fait, pour lui, ce n’était pas une simple opération de vote, mais aussi une leçon de patriotisme à donner à son petit-fils un écolier de 12 ans. 

En fait, l’affluence des personnes âgées était si considérable que seuls les deux bureaux consacrés à cette catégorie d’âge étaient bondés d’électeurs. Parmi eux, Radhia, une retraitée de 75 ans, venue exercer son droit, qui constitue, comme elle l’explique, un devoir. «Je suis vraiment désolée de ne pas voir des jeunes venir voter aujourd’hui, or le futur leur appartient, même si j’ai 75 ans je pense toujours à l’avenir du pays, et c’est pour cette raison que je me suis réveillée si tôt aujourd’hui pour voter et choisir mon nouveau président», témoigne-t-elle avant de transmettre un message aux jeunes «Réveillez-vous et allez voter, le futur vous appartient, l’avenir de notre chère patrie est entre vos mains, choisissez votre nouveau président, celui qui vous représente».

Les jeunes grands absents

Jusqu’à midi, l’affluence des jeunes était désolante, le bureau numéro 6, consacré à cette catégorie d’âge, était vraiment déserté, que même les agents de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) chargés du bon déroulement du vote dans cette école restaient parfois les bras croisés à ne rien faire. «C’est toujours comme ça, les jeunes n’exercent pas leur droit, mais je pense que leur affluence s’améliorera vers la fin de la journée», nous explique un agent de l’Isie, lui qui a également contribué à l’organisation des élections de 2014.

Car en effet, ici, les jeunes se font rares, durant notre présence sur les lieux, nous avons pu compter jusqu’à midi seulement une dizaine qui sont venus voter, et le constat a été confirmé par les responsables de ce bureau de vote. «Pourtant plus de 70% des nouveaux inscrits sont des jeunes, c’est une culture généralisée, les jeunes ne s’intéressent plus à la vie politique, mais espérons que d’ici 18h00 l’affluence des jeunes sera plus grande», explique à notre journal un responsable de ce bureau de vote.

Contrairement aux autres jeunes qui ont choisi de s’abstenir en ce jour historique et décisif pour le processus électoral tunisien, Ahmed, un jeune de 22 ans, était présent dans ce bureau de vote.

Pour lui, c’est un jour historique pour la Tunisie, car il était indispensable de voter et contribuer à la construction démocratique. «Je suis venu aujourd’hui exercer mon droit mais aussi mon devoir, et je pense que les jeunes qui ne sont pas venus aujourd’hui ne doivent pas se plaindre de la situation du pays plus tard», affirme-t-il.

De génération en génération

Outre l’abstention des jeunes, ce qui a marqué les premières heures de vote dans ce bureau, basé à l’école primaire Carthage Tanit rappelons-le, c’est la grande présence des enfants. Très curieux, ils accompagnaient leurs parents qui sont venus voter. Pour certains, c’était une initiation à la démocratie, car, en effet, plusieurs parents ont expliqué à leurs enfants les différentes étapes du vote. «Pourquoi je ne peux pas voter ?», s’interroge un enfant de 10 ans, une question si innocente qu’elle a suscité l’intérêt de tous les présents de l’un des six bureaux consacrés au vote, et une réponse spontanée du responsable de ce bureau : dans huit ans tu reviendras dans ce bureau et tu choisiras ton président».

De génération en génération, plusieurs parents et grands-parents ont, en effet, initié leurs enfants à la pratique de la démocratique, car pour eux, il s’agit avant tout d’une culture à prévaloir, celle bâtie sur l’amour de la patrie et sur la volonté de changer.

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