Sommes-nous libres d’être libres ?

Pour définir la notion de liberté, il suffirait d’en donner une description adéquate :

-Au niveau biologique, la liberté s’identifie avec un organisme en bonne santé.
-Au niveau plus élevé, la liberté s’identifie avec la spontanéité des tendances.

L’homme est libre quand il peut réaliser ses désirs, nous dit Épicure.

Le confinement de ces jours en Tunisie, ou dans n’importe quel autre pays du monde, nous a fait apprécier davantage les jours où nous étions libres de circuler, d’aller au café, au bar ou au restaurant sans trop nous soucier des horaires et/ou de l’interdiction de côtoyer les gens que nous aimons. Aujourd’hui, nous souffrons suite à la sensation d’être enfermés dans une cage, en or peut-être… ou encore en détention à domicile. On nous prive donc de notre liberté, pas seulement de mouvement, mais aussi d’expression et de pensée. En 24h, notre vie a totalement changé, son organisation, nos soucis quotidiens, l’organisation de notre travail, la vie de nos enfants, les rapports avec nos collègues, nos familiaux…

Mais, avions-nous été vraiment libres dans notre vie ?

Pour répondre à cette question qui touche l’une des notions fondamentales de notre existence ainsi qu’un droit subjectif primordial pour l’individu assuré dans un état de droit et de démocratie, et l’un des droits auquel l’homme est très attaché, nous devrions avant tout comprendre qu’est-ce que ça veut dire être libres et qu’est-ce que la liberté.

Une maxime de Descartes renvoie la liberté à la maîtrise de soi, et à l’acceptation du monde tel qu’il est. Dans la tradition stoïcienne, Descartes affirme que les pensées sont le champ de liberté et de contrôle de l’homme, contrairement au reste, qui ne dépend pas de nous. Pour éviter la frustration lorsque le monde n’est pas adéquat à nos désirs ou notre volonté, c’est à l’homme de modifier ses pensées, de convertir son regard sur le monde plutôt que le monde lui-même. Ceci nous renvoie certainement à une forme passive de l’acceptation et de l’adaptation de l’homme à tout ce que la vie nous présente.

La liberté n’est pas au fond dans ce qu’on fait, mais dans la manière dont on le fait. La liberté est une attitude, celle de l’homme qui se reconnaît dans sa vie, qui approuve l’histoire du monde et des événements. C’est pourquoi la liberté, toujours selon Descartes, consiste souvent à «changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde». C’est à une telle conception (celle des stoïciens) que les modernes comme Sartre ou Kierkegaard sont revenus; l’homme devient libre lorsqu’il substitue une attitude active à une situation subie, lorsqu’il prend parti à l’égard des événements de son temps : bref, la liberté se prouve en se réalisant, lorsque l’homme réalise son destin en œuvrant au lieu de le subir.

Chez l’existentialiste Jean Paul Sartre, l’un de mes écrivains préférés, la liberté est le thème traversant l’ensemble de son œuvre, de la Nausée à la Critique de la Raison Dialectique en passant par son ouvrage majeur, L’Etre et le Néant.

Être libre, chez Sartre, c’est se jeter dans le monde, de se perdre en lui pour tenter de le modifier, d’agir sur lui. Dans L’Etre et le Néant, Jean Paul Sartre, écrit :

«L’être ne saurait engendrer que l’être et, si l’homme est englobé dans ce processus de génération, il ne sortira de lui que de l’être. S’il doit pouvoir interroger sur ce processus, c’est-à-dire le mettre en question, il faut qu’il puisse le tenir sous sa vue comme un ensemble, c’est-à-dire se mettre lui-même en dehors de l’être et du même coup affaiblir la structure d’être de l’être. Toutefois il n’est pas donné à la “réalité humaine” d’anéantir, même provisoirement, la masse d’être qui est posée en face d’elle. Ce qu’elle peut modifier, c’est son rapport avec cet être. Pour elle, mettre hors de circuit un existant particulier, c’est se mettre elle-même hors de circuit par rapport à cet existant. En ce cas elle lui échappe, elle est hors d’atteinte, il ne saurait agir sur elle, elle s’est retirée par-delà un néant. Cette possibilité pour la réalité humaine de sécréter un néant qui l’isole, Descartes, après les Stoïciens, lui a donné un nom : c’est la liberté».

Un commentaire

  1. Liberte

    29/03/2020 à 09:13

    Voilà enfin un bpn sujet pour le baccalauréat de philosophie .

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