Accueil A la une Le cinéaste Palestinien Rashid Masharawi, maître d’œuvre du projet «Ground Zero», à La Presse : «Il faut sauvegarder la mémoire de la guerre»

Le cinéaste Palestinien Rashid Masharawi, maître d’œuvre du projet «Ground Zero», à La Presse : «Il faut sauvegarder la mémoire de la guerre»

 

C’est sous une tente au bord de la mer à Cannes que nous avons rencontré le réalisateur de «Haifa», «Palestine Stéréo», «Arafat mon frère» et tant d’autres opus focalisés sur la cause palestinienne. Il nous parle, ici, de son projet «Ground Zero» qui a offert l’opportunité à 22 jeunes réalisateurs palestiniens de témoigner de l’horreur de la guerre et de leur terrible quotidien sous les bombes de l’armée israélienne, à Gaza. Ces courts métrages de 2 à 7 minutes, entre documentaire, fiction et animation, ont été projetés au sein du marché du film, hors de la programmation du festival de Cannes, dans le but important de sauvegarder la mémoire de la guerre destructrice et ravageuse à Gaza. Entretien.

Dites-nous d’abord pourquoi le choix de ce titre, «Ground Zero» ? 

C’est la traduction du terme «El Massafa el Sifr», ce qui signifie que tous ces réalisateurs qui sont sur place apportent leur témoignage et racontent leur quotidien tragique à une distance zéro de ces milliers de bombes qui ont détruit leur ville et des milliers de vies avec leur cortège de malheur et de souffrance. Et comme ils ont senti tout ça dans leur chair en ayant perdu leurs parents, leurs frères et sœurs, leurs amis, leurs maisons, leurs lieux d’études et de travail et tant d’autres choses, ils étaient donc, à mes yeux, les mieux indiqués pour réaliser ces films et raconter l’enfer de la guerre qu’ils vivent depuis huit mois. 

Qu’est-ce qui a motivé «Ground Zero» ?

C’est face au choc des images insoutenables que je me suis dit il faut raconter, témoigner et sauvegarder la mémoire de cette guerre ravageuse à Gaza.

Mais comment faire sinon en offrant l’opportunité à de jeunes artistes et réalisateurs gazaouis de témoigner en réalisant plusieurs films. J’ai, donc, fait appel à des encadreurs et à des conseillers du monde arabe dans le champ du cinéma. Divers conseillers du monde arabe dont Abdessamad El Haj, Dorra Bouchoucha et des réalisateurs dont le Libanais Michel Kamoun, le Palestinien Rasmi Damo, la Jordanienne Nadia Alioune et un groupe de cinéastes à Gaza dont Rabab Khamis et mon frère  Khamis Masharaoui. Nous avons travaillé dans le cadre d’un workshop afin d’assurer des films de qualité qui puissent être distribués dans le monde entier.

Comment sont nées les idées des opus ? Quel a été le rôle des encadreurs ? 

Chaque réalisateur a proposé l’idée de son film, de leurs côtés les encadreurs ont contribué à développer dramatiquement toutes ces expériences personnelles, c’était, en quelque sorte, un «work in progress». Les films ont été tournés avec le matériel et les moyens techniques du bord. 

En regardant les films, nous avons observé que la violence et l’horreur inouïes de la guerre étaient larvées et non manifestes, à l’image des scènes de mort et de destruction qu’on voit en direct à la télé. À titre d’exemple, le film d’animation «Soft Skin» de Khamis Masharaoui a remué les esprits et les cœurs. Est-ce là un parti pris consistant à éviter de telles scènes ? 

Nous avons laissé ce genre de scènes tragiques diffusées en direct aux chaînes d’information, notre rôle et  nos ambitions étaient de creuser un peu plus en profondeur en racontant et en filmant des situations incroyables, tel dans le film «24 heures»  où un jeune a été enseveli trois fois sous les décombres en une seule journée, car chaque fois qu’on le sauvait de sous les décombres, il se déplaçait vers un autre endroit, qui était à son tour bombardé, et il se retrouvait de nouveau sous les décombres.  Comment ne pas être remué par toute cette horreur comme vous dites. 

Qui a financé ce projet et où comptez-vous projeter ces films ? 

Cette action qui vise à promouvoir les projets de réalisateurs palestiniens est soutenue par la fondation Masharaoui pour le soutien du cinéma et des cinéastes à Gaza. Il a été réalisé grâce à certains fonds et autres  donateurs. Cette action à Cannes est privée et se déroule dans le cadre du marché du film. Nous n’avons rien demandé au festival de Cannes. 

Je compte proposer la projection des métrages de «Ground Zero» à plusieurs festivals et autres événements tels les JCC, Le Caire, «Roma Meditérraneen films», en Iran, Genève et autres. 

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