Jameleddine Aouididi, économiste et expert en développement
«Alors que les statistiques officielles, publiées par l’INS, font état d’un déficit de 11,7 milliards de dinars, le déficit réel de la balance commerciale en Tunisie s’est élevé à 21,5 milliards de dinars, à fin novembre 2020. Le problème du déficit de la balance commerciale réside dans la méthodologie de calcul du déficit. Ce calcul prend en considération les résultats des transactions effectuées sous les deux régimes, à savoir le régime général appliqué aux sociétés résidentes et le régime off-shore appliqué à celles non résidentes et totalement exportatrices. Or, à l’échelle internationale, il est recommandé, depuis 2008 par le FMI, de se contenter des résultats du régime général uniquement. Les sociétés résidentes sont appelées, selon la réglementation de change en vigueur, à rapatrier les recettes de leurs exportations par transfert de devises. Ce qui affecte directement le niveau des avoirs en devises. Ce subterfuge sert à maquiller une réalité désastreuse de notre économie nationale. Puisqu’il permet de sous-estimer le déficit réel du pays. La balance du régime off-shore affiche des importations de l’ordre de 17,9 milliards de dinars, contre des exportations à hauteur de 27,1 milliards de dinars. Ce qui représente un solde excédentaire de 9,8 milliards de dinars (soit un taux de couverture de 163,5%). Si on exclut les transactions réalisées dans le cadre du régime off-shore, le déficit commercial en Tunisie passerait de 28 milliards de dinars, en 2018, à 31 milliards de dinars, en 2019. Ce qui représente un record jamais enregistré durant toute l’histoire de la Tunisie ».

Hakim Ben Hammouda, ancien ministre des Finances et expert en économie
«… Le récent sondage d’opinions effectué par Sigma Conseil sur l’appréciation des Tunisiens de dix ans de révolution est très riche et comprend une multitude de dimensions… Parmi les questions sur lesquelles nous souhaitons nous arrêter à travers les résultats de ce sondage, l’une concerne les raisons de la déconvenue de la dynamique révolutionnaire, entamée il y a dix ans. L’une des premières raisons évoquées concerne la situation économique et l’incapacité des différents gouvernements à l’améliorer. Pour 85% des Tunisiens, la situation économique avant la révolution était meilleure et les différents gouvernements n’ont pas été en mesure de l’améliorer et de répondre à leurs attentes. Parallèlement aux raisons économiques, la situation sociale constitue l’une des limites du processus révolutionnaire et près de 83% des Tunisiens considèrent que l’influence de la révolution sur la situation sociale a été négative. D’autres causes de cette déconvenue sont évoquées par les Tunisiens. Parmi ces questions, celle de la corruption revient le plus souvent et constitue pour 76% des Tunisiens l’une des raisons de cet échec. Les personnes interrogées indiquent que ce phénomène s’est accentué après la révolution et s’est renforcé suite au recul des institutions de l’Etat et des mécanismes de contrôle. Parmi les raisons évoquées, l’une concerne la situation des infrastructures, qui n’a pas connu d’améliorations depuis le déclenchement du processus révolutionnaire. Pour 88% des Tunisiens, la révolution n’a pas favorisé une amélioration sensible de la part de l’Etat des infrastructures, provoquant un recul considérable à ce niveau… 84% des personnes interrogées considèrent que la révolution n’a pas favorisé de manière effective l’amélioration des conditions économiques de ces régions et n’a pas contribué au déclenchement d’une véritable dynamique de développement ». 

Mourad Ben Chaâbane, DG de Mac SA et président du conseil d’administration de la Bvmt
«Inkadh, le premier Fonds de retournement en Tunisie, initié par l’intermédiaire en bourse Mac SA et l’Amen Bank. Le principe de ce genre de fonds est de fournir des capitaux aux sociétés en difficulté quand les autres sources de financement font défaut. Cet apport est utilisé pour financer le plan de redressement et apurer une partie des dettes. En contrepartie de cette aide financière, le fonds acquiert généralement la majorité de l’entreprise et peut alors orienter sa stratégie et engager sa restructuration. Ce genre de fonds existe partout dans le monde. Les bénéficiaires sont des sociétés en difficulté, pas nécessairement à cause du Covid-19, mais qui ont des problèmes de gestion, de vision ou stratégiques. Ainsi, ces fonds entrent dans ces sociétés pour les restructurer. Je remercie l’Amen Bank qui a été partenaire dans la création de ce fonds avec Mac SA. On espère que les banques tunisiennes vont marcher sur les pas d’Amen Bank. Il y a aussi un autre investisseur qui est toujours présent, la Caisse des dépôts et consignations (CDC), et qui accompagne ces fonds pour leur développement».

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